DOUTEUR ET UNE PAGE INTÉRESSANTE

samedi 17 avril 2010

3365

JOURNAL DES DÉBATS DE L'ASSEMBLÉE NATIONALE

39e législature, 1re session

(début : 13 janvier 2009)

Le jeudi 15 avril 2010
http://www.assnat.qc.ca/fr/travaux-parlementaires/assemblee-nationale/39-1/journal-debats/20100415/14897.html

- Vol. 41 N° 105

(…)

La Vice-Présidente (Mme Houda-Pepin): Merci, M. le député de Roberval. Je reconnais maintenant M. le député de Vimont.


SOULIGNER LE MOIS DE L'AUTISME


M. Vincent Auclair


M. Auclair: Merci, Mme la Présidente. Comme vous le savez et comme on nous l'a rappelé hier, en cette Chambre, par le dépôt d'une motion, le mois d'avril est le Mois de l'autisme, qui vise à informer et sensibiliser le grand public sur l'autisme et les autres troubles envahissants du développement.

Chez nous, à Laval, l'autisme et les troubles envahissants du développement touchent plus de 1 000 personnes, sans compter les membres de leur famille immédiate. Mais, grâce à l'engagement indéfectible de la Société de l'autisme et des TED de Laval et au soutien d'organismes comme Le Chat botté, qui offre un service de répit aux familles et des camps de jour, la Bioferme de Laval, qui permet l'intégration à l'emploi, le CRDI Normand-Laramée, l'agence de santé et de services sociaux, TED sans frontières, la commission scolaire de Laval, ville de Laval et de nombreux autres organismes, ces personnes à part entière peuvent se réaliser.

C'est pourquoi, en plus de souligner le Mois de l'autisme, j'aimerais, au nom de tous ces organismes, que le Québec se joigne à plus de 167 pays et reconnaisse le 2 avril comme la Journée mondiale de l'autisme. Merci, Mme la Présidente.

La Vice-Présidente (Mme Houda-Pepin): Merci beaucoup, M. le député de Vimont.

*

La Vice-Présidente (Mme Houda-Pepin): Merci, Mme la députée. Alors, ceci met fin à la rubrique des déclarations de députés.

Je suspends nos travaux quelques instants.

(Suspension de la séance à 9 h 57)

(Reprise à 10 h 11)

Le Président: Bonne journée, chers collègues. Nous allons nous recueillir quelques instants.

Merci. Veuillez vous asseoir.

Avant de poursuivre aux affaires courantes, aujourd'hui, vous me permettrez de souligner l'anniversaire de quelques collègues pour la journée de demain. Alors, M. le député de Beauce-Sud et ministre du Revenu, sera célébré demain son anniversaire. Et, également, samedi sera l'anniversaire du député de Laval-des-Rapides.

*

Le Président: Cet extrait de pétition est déposé. Toujours à l'item des pétitions, M. le député de Vaudreuil.

M. Marcoux: Alors, merci, M. le Président. Je demande le consentement de cette Assemblée pour déposer une pétition non conforme.

Le Président: Est-ce qu'il y a consentement? Il y a consentement. M. le député de Vaudreuil.


Accorder 28 places additionnelles en service de garde subventionné à la Garderie éducative Les Jardinsd'Émilie, de Vaudreuil-Dorion

M. Marcoux: Merci. Je dépose l'extrait d'une pétition adressée à l'Assemblée nationale, signée par 75 pétitionnaires. Désignation: citoyennes et citoyens de la circonscription électorale de Vaudreuil.

«Les faits invoqués sont les suivants:

«Considérant qu'en septembre 2003 la garderie Les Jardins d'Émilie a ouvert ses portes pour 80 places;

«Considérant qu'en avril 2006 52 places destinées au Petit Castel nous ont été données, car le gouvernement s'est retrouvé avec un surplus;

«Considérant que les 28 places subventionnées manquantes devraient être accordées lors du prochain budget;

«Considérant que les parents, les enfants et le personnel se sont retrouvés séparés par deux installations dans une même bâtisse avec plusieurs conditions: deux portes d'entrée, porte de communication interne, clôture dans la cour, perte de la salle de motricité;

«Considérant que, le 4 mars 2008, lors de la consultation publique du CRE, nous représentions 85 %;

«Considérant que, le 15 mai 2008, dans le cadre de l'appel de projets, nous avons déposé une nouvelle demande pour 28 places, dont 15 poupons;

.(10 h 20).

«Considérant que, dans la grille d'analyse des demandes, nous répondions aux priorités ministérielles, aux priorités régionales et au respect des dispositions réglementaires;

«Considérant qu'après nos multiples démarches nous avons obtenu: une dérogation pour la porte interne, une dérogation pour ouvrir la clôture;

«Considérant la décision de la direction sur l'éventuelle cessation des activités;

«Et l'intervention réclamée se résume ainsi:

«C'est pourquoi nous, résidents du comté de [Vaudreuil], demandons, dans le respect de nos enfants et leurs parents, de bien vouloir intervenir auprès du ministère de la Famille pour accorder aux Jardins d'Émilie les 28 places subventionnées manquantes.»

Je certifie que cet extrait est conforme à l'original de la pétition.

Le Président: Cet extrait de pétition est déposé.

*

(…)


QUESTIONS ET RÉPONSES ORALES


Nous en sommes donc présentement à la période de questions et de réponses orales des députés. Et je cède la parole à Mme la députée de Joliette.

PROCESSUS DE NOMINATION DES JUGES


Mme Véronique Hivon


Mme Hivon: Merci, M. le Président. Depuis les déclarations de Marc Bellemare de lundi, les affirmations troublantes se multiplient. Qu'est-ce qu'on apprend aujourd'hui à la une du Devoir? Nomination des juges: le premier ministre a changé la donne - Le titulaire de la Justice maintenant exposé aux pressions politiques. C'est en effet ce que la porte-parole de la ministre de la Justice a confirmé au journaliste du Devoir en indiquant que la liste des personnes aptes à être nommées juges est maintenant connue de l'ensemble des membres du Conseil des ministres et non pas, comme c'était pourtant la règle depuis 25 ans, seulement du ministre de la Justice, et ce, précisément pour préserver l'indépendance et l'intégrité du système judiciaire. M. le Président, vous aurez compris qu'en changeant une telle pratique, on vient soumettre la nomination des juges aux considérations les plus partisanes.

Est-ce que la ministre de la Justice pourrait finalement se réveiller et arrêter de cautionner les atteintes graves portées par son premier ministre à...

Le Président: M. le premier ministre.

M. Jean Charest

M. Charest: M. le Président, il me fait plaisir de répondre à la question, puisque c'est à moi à qui revient la responsabilité directe de mettre en place les mécanismes pour la nomination des juges. C'est à moi à qui revient la dernière responsabilité. Et j'aimerais donc corriger l'information qui a été diffusée dans le journal Le Devoir de ce matin, qui est une information qui est fausse. Les règles de nomination des juges sont exactement les mêmes qu'elles étaient avant l'élection du gouvernement, au mois d'avril 2003. Les règles et le processus de nomination n'ont pas changé. C'est donc dire, M. le Président, qu'une personne qui fait l'objet d'une recommandation au Conseil des ministres aura passé le test d'une entrevue par un comité où se trouvent une personne nommée par la magistrature, une autre par le bâtonnier et un citoyen, que le comité détermine la compétence des candidats, et ensuite le gouvernement soumet une candidature au Conseil des ministres, qui est approuvée. Alors, pour être très clair, M. le Président, très, très clair, le processus n'a pas changé.

Le Président: En question complémentaire, Mme la députée de Joliette.

Mme Véronique Hivon


Mme Hivon: M. le Président, je le répète, c'est la ministre de la Justice qu'on aimerait entendre. Le premier ministre est au coeur des allégations de Marc Bellemare, il est au coeur du prétendu changement du processus, alors on aimerait savoir si la ministre peut nous dire si son attaché de presse a menti au journaliste. Parce que ce qu'on nous dit, c'est que les noms sont connus. Le processus, c'est une chose. Ce qu'on nous dit, c'est que les noms sont maintenant connus de l'ensemble du Conseil des ministres.

Qu'elle nous dise la vérité et qu'elle se lève, la ministre de la Justice.

Le Président: M. le premier ministre.

M. Jean Charest


M. Charest: M. le Président, il y a une seule candidature qui est suggérée au Conseil des ministres, et la liste des candidats n'est pas circulée parmi les membres du Conseil des ministres.

Le Président: En complémentaire, Mme la députée de Joliette.

Mme Véronique Hivon


Mme Hivon: Ça va de soi, M. le Président, que, la ministre, j'espère bien qu'elle fait une suggestion, c'est sa recommandation. Ce qu'on veut savoir, c'est si ce que son attachée de presse a dit est vrai et qu'effectivement tous les membres du Conseil des ministres connaissent l'identité des membres qui sont déclarés aptes.

Est-ce que la ministre, qui est garante de l'intégrité du processus, pourrait se lever et répondre à nos questions?

Des voix: ...

Le Président: Un instant! Mme la ministre de la Justice.


Mme Kathleen Weil


Mme Weil: M. le Président, je peux vous confirmer que le processus de nomination des juges n'a pas changé, qu'en fait c'est exactement comme le premier ministre l'a dit: un nom est soumis au Conseil des ministres. Il n'y a pas de liste qui circule au Conseil des ministres.

Le Président: En question principale, Mme la députée de Joliette.


CONFIDENTIALITÉ DE LA LISTE DES CANDIDATS À LA MAGISTRATURE

Mme Véronique Hivon

Mme Hivon: En tout cas, on joue sur les mots, hein? La liste ne circule peut-être pas, mais les noms sont connus.

Des voix: ...

Le Président: S'il vous plaît!

Des voix: ...

Le Président: À l'ordre, s'il vous plaît! J'ai une demande de question de règlement du leader du gouvernement.

.(10 h 30).

M. Dupuis: Alors, M. le Président, sur la question de règlement, vous connaissez très bien la règle au sujet du fait qu'on doit prendre la parole de... on doit prendre la parole... Non seulement doit-on prendre la parole verbale, mais également dans les gestes qu'on fait dans l'Assemblée. Vous êtes, M. le Président...

Des voix: ...

Le Président: Une minute, ça va être rapide. Allez-y, allez-y, continuez.

M. Dupuis: M. le Président, vous êtes également responsable du décorum en Chambre et vous devez faire respecter non seulement le règlement, mais également le décorum.

Le Président: Mme la députée, vous continuez sur votre question.

Mme Hivon: Alors, on nous dit que la liste ne circule pas, mais on ne nous dit pas que les noms ne sont pas connus, et surtout on ne contredit pas l'attachée de presse de la ministre.

Alors, je poursuis. Selon les déclarations de Marc Bellemare, de lundi, un important collecteur de fonds du Parti libéral aurait non seulement contraint l'ex-ministre à nommer au moins deux juges, mais il aurait eu accès à l'identité des personnes déclarées aptes alors que le ministre ne le savait même pas.

La ministre, qui nous a dit, encore mardi, que tout allait bien dans le système de justice, n'a vu à ce jour aucun problème.

Est-ce qu'elle pourrait nous dire, à titre de dépositaire de la liste et de garante de l'intégrité du processus de nomination des juges, ce qu'elle a fait depuis qu'elle a appris cette affirmation excessivement troublante? Est-ce qu'elle a contacté la Sûreté du Québec pour qu'une enquête soit entreprise?

Le Président: Mme la ministre de la Justice.


Mme Kathleen Weil


Mme Weil: M. le Président, premièrement, pour répondre à la première partie de ces commentaires, je répète: La liste ne circule pas au conseil... n'est pas soumise au Conseil des ministres.

Des voix: ...

Le Président: S'il vous plaît!

Des voix: ...

Le Président: S'il vous plaît! À l'ordre, s'il vous plaît!

Des voix: ...

Le Président: Alors, je vais me lever aussi souvent que requis. Quand on n'est pas en mesure d'entendre la réponse qui est donnée... Ce sont des interpellations qui n'ont pas lieu d'être pendant que la réponse est donnée.

Sur une question de règlement, M. le leader du gouvernement.

M. Dupuis: Sur la question de règlement, M. le Président, il y a un certain nombre de fonctions en cette Chambre qui sont extraordinairement importantes pour la suite de nos débats. L'une de ces fonctions-là, c'est celle de leader de l'opposition officielle. Or, M. le Président, vous le savez très bien, vous le voyez à tous les jours, le leader de l'opposition officielle contribue à faire, malheureusement, et je le déplore, à faire en sorte que l'Assemblée nationale, pour les concitoyens qui nous regardent, a l'air d'un cirque. Pourriez-vous lui demander...

Des voix: ...

M. Dupuis: ...pourriez...

Des voix: ...

M. Dupuis: M. le Président...

Des voix: ...

Le Président: S'il vous plaît! Je vais terminer sur la question de règlement du leader du gouvernement, je vous reviens pour la suite. Et je vous rappelle qu'encore une fois, au moment même où... au moment même où la question est soulevée sur l'état de cette Chambre occasionnellement par le leader du gouvernement, il y a quelqu'un qui l'interpelle. Je vous demande votre collaboration à tous pour qu'on entende correctement et les questions et les réponses, et, quand c'est des questions de règlement, à plus haut titre, qu'on puisse les entendre comme il faut. M. le leader du gouvernement.

M. Dupuis: Je termine, M. le Président, ce ne sera pas long. Je vous prie instamment, je vous prie instamment de rappeler à l'ordre le leader de l'opposition officielle, de lui dire que l'opposition officielle peut poser toutes les questions qu'elle veut dans l'ordre et dans le décorum.

Le Président: Bien. C'est ce que je venais de dire. M. le leader de l'opposition, ça va?

Nous en sommes à la question... à la réponse... nous en étions à la question de la ministre... la réponse de la ministre, qui a quelque 16 secondes d'écoulées. Mme la ministre.

Mme Weil: Bon. Je voudrais donc reconfirmer que je propose un nom au Conseil des ministres.

Pour la deuxième partie, nous avons posé un geste très fort et très important hier: une commission d'enquête qui va enquêter sur les allégations de Marc Bellemare, présidée par un juge retraité de la Cour suprême avec une feuille de route impressionnante, impartial, qui va jeter de la lumière sur toutes ces allégations. C'est un geste important, et Me Bastarache l'a confirmé, qu'il a pris le mandat parce que c'est important.

Le Président: En question complémentaire, Mme la députée de Joliette.

Mme Véronique Hivon

Mme Hivon: Oui, M. le Président. Il y a des fonctions excessivement importantes dans cette Chambre et au gouvernement, et celle de ministre de la Justice en est une, et on aimerait qu'elle soit beaucoup plus responsable, surtout quand le premier ministre, son premier ministre, ne semble voir, lui, aucun problème d'être juge et partie. Alors, ce qu'on apprend aujourd'hui, en plus de ce qu'on apprend concernant la connaissance par l'organisateur du parti des noms, c'est que le processus est changé.

Qu'est-ce que la ministre a fait? Ça prend six mois, une enquête. Qu'est-ce qu'elle fait maintenant?

Le Président: Mme la ministre de la Justice.

Des voix: ...

Le Président: Un instant.

Des voix: ...

Le Président: Alors, tant que vous allez interpeller comme vous venez de le faire, je vais attendre. Mme la ministre.

Mme Kathleen Weil


Mme Weil: M. le Président, j'ai eu l'occasion de le dire en cette Chambre, le processus de nomination n'a pas changé depuis 30 ans. C'est le même processus de nomination, qui fonctionne bien. Mais, à la lumière des allégations, il fallait que le gouvernement agisse avec célérité, et c'est pourquoi, les allégations dont on a pris conscience lundi soir, on a agi rapidement pour mettre en place une commission d'enquête, justement pour analyser, pour faire enquête sur les allégations de Marc Bellemare. C'était le geste à poser.

On... Il faut confirmer la confiance du public dans l'intégrité du système de justice et dans l'indépendance de la...

Le Président: En terminant.

Mme Weil: ...magistrature, M. le Président.

Le Président: En deuxième complémentaire, Mme la députée de Joliette.

Mme Véronique Hivon


Mme Hivon: M. le Président, c'est excessivement grave, l'allégation qu'a faite Marc Bellemare lundi concernant la connaissance par un financier, un grand argentier, un collecteur du parti... de la connaissance des noms, et la ministre de la Justice ne fait rien.

Est-ce qu'elle peut nous dire ce qu'elle fait pour que ces documents hautement confidentiels ne soient plus donnés à des grands collecteurs de fonds du Parti libéral? Pourquoi elle ne demande pas à la SQ d'intervenir?

Le Président: Mme la ministre de la Justice.


Mme Kathleen Weil


Mme Weil: Qu'un membre du Barreau raconte n'importe quoi en cette Chambre, je suis outrée, outrée!

Des voix: ...

Le Président: Sur une question de règlement, monsieur...

Des voix: ...

Le Président: Un instant!

Des voix: ...

Le Président: Un instant!

Des voix: ...

Le Président: À l'ordre, s'il vous plaît! À l'ordre, s'il vous plaît!

Des voix: ...

Le Président: À l'ordre, s'il vous plaît!

Des voix: ...

Le Président: À l'ordre, s'il vous plaît!

Des voix: ...

Le Président: À l'ordre! Il y a une question de règlement qui est demandée. M. le leader de l'opposition officielle.

M. Bédard: ...35. La personne qui dit n'importe quoi ici, je ne le sais pas c'est qui, mais ce qui est clair, c'est qu'on ne peut pas imputer de motifs indignes, surtout dans un dossier, M. le Président, où les collecteurs de fonds du Parti libéral qui détiennent des documents hautement confidentiels ne sont pas enquêtés. Il n'y a même pas eu...

Des voix: ...

Le Président: S'il vous plaît!

Des voix: ...

Le Président: À l'ordre, s'il vous plaît!

Des voix: ...

Le Président: S'il vous plaît! À l'ordre, s'il vous plaît! À l'ordre, s'il vous plaît! À l'ordre, s'il vous plaît!

Des voix: ...

Le Président: À l'ordre, s'il vous plaît!

Des voix: ...

Le Président: Sur la question de règlement...

Des voix: ...

Le Président: S'il vous plaît!

Une voix: ...

Le Président: Mme la députée de Matapédia, s'il vous plaît! Sur la question de règlement, M. le leader du gouvernement.

M. Dupuis: Sur la question de règlement, vous devez... vous devez, M. le Président...

Des voix: ...

Le Président: M. le leader du gouvernement.

M. Dupuis: Vous devez... Vous devez, M. le Président, empêcher que les questions de règlement servent de prétexte à dire des choses fausses et contraires à la vérité. Et là, M. le Président, c'est, de la part du leader de l'opposition officielle, devenu une stratégie. Il se lève, par le biais des questions de règlement, il fait des affirmations qui sont fausses, il fait des discours, il fait des...

.(10 h 40).

Le Président: S'il vous plaît.

Une voix: ...

Le Président: Ça va. Très bien. Alors, je clos là-dessus. La question qui était posée... la réponse qui était donnée comportait une opinion. Il n'y avait pas de contraire... il n'y avait rien qui était contraire au règlement. Par conséquent, nous continuons là où nous en étions.

Une voix: ...

Le Président: S'il vous plaît! Quand il s'agit d'une question d'opinion... ici, ça n'avait rien de contraire au règlement. Mme la ministre, à la réponse à la question qui a été posée.

Mme Weil: M. le Président, le gouvernement a posé exactement le bon geste. Le premier ministre est membre du Barreau. Le ministre responsable de la Sécurité publique est membre du Barreau. Je suis membre du Barreau. Tout de suite, dès que Marc Bellemare a fait ses allégations, tout de suite on a eu les bons instincts. Il fallait nommer une commission d'enquête pour préserver la réputation de la magistrature et de... du système de justice du Québec. Moi, je n'accepterai pas ici, en Chambre, que la députée de Joliette dénigre notre système de justice comme elle...

Le Président: En question principale, Mme la chef de l'opposition officielle.

CONFIDENTIALITÉ DES NOMS DES CANDIDATS À LA MAGISTRATURE


Mme Pauline Marois


Mme Marois: M. le Président, nous souhaitons que la ministre de la Justice et Procureur général s'élève au-dessus de la mêlée. Ce matin, nous apprenons dans les journaux... Ce matin, dans les journaux, deux ministres sont contredits par leurs attachés de presse. Et la ministre n'a pas nié les propos de son attachée de presse. D'ailleurs, vous constaterez que plus personne ne croit le gouvernement. La crise qui secoue ce gouvernement est d'ailleurs sans précédent. On a un premier ministre qui définit le mandat du juge chargé d'enquêter sur sa propre conduite, mandat que le juge Bastarache a lui-même qualifié de politique. On a un premier ministre qui poursuit son ancien ministre de la Justice et Procureur général parce qu'il a accepté de dire des choses à visage découvert. Pas étonnant, d'ailleurs, que les sources veuillent rester anonymes, M. le Président. Ce même ex-Procureur général indique qu'il entend faire une déposition à la Sûreté du Québec, si bien que le premier ministre du Québec, des financiers de son parti risquent de faire l'objet d'une enquête policière. Du jamais-vu dans l'histoire du Québec, M. le Président, ce qui vient ébranler et miner la crédibilité de nos institutions.

La question, elle est simple, ce matin, M. le Président, et la ministre et le premier ministre jouent sur les mots. On nous dit qu'on n'a pas changé le processus. On nous dit qu'on présente un nom au Conseil des ministres. On nous dit qu'il n'y a pas de liste qui circule. S'il n'y a pas de liste qui circule, comment se fait-il que des donateurs du Parti libéral sachent, eux, qui sont éligibles à des postes de juge? Et les noms des gens qui sont éligibles aux postes de juge sont-ils disponibles...

Une voix: ...

Le Président: M. le député, M. le député, on peut aller à la réponse? M. le premier ministre.

M. Jean Charest


M. Charest: M. le Président, je regrette le ton de la chef de l'opposition officielle, qui... Dans les circonstances, on se serait attendus à ce qu'elle puisse se lever un petit peu au-dessus du débat, d'autant plus que c'est des sujets qui touchent très directement le fonctionnement du système judiciaire.

Je veux réitérer, M. le Président, que le processus de nomination des juges, il est rigoureux. Le Barreau le reconnaît, des anciens juges le reconnaissent. Même de l'extérieur du Québec, on reconnaît que le processus de nomination que nous avons actuellement au Québec est rigoureux et permet de déterminer des candidats qui sont compétents. Et le gouvernement nomme des candidats qui sont compétents. Il n'y a personne qui remet ça en question. Personne.

Cela étant dit, M. le Président, la liste des candidats éligibles, elle est confidentielle. Dans toute sa forme. Elle est confidentielle. Et le processus de nomination que nous avons aujourd'hui est le même qui existait avant l'élection du gouvernement.

Le Président: En question complémentaire, Mme la chef de l'opposition officielle.


Mme Pauline Marois


Mme Marois: Alors, M. le Président, ça fonctionnait rigoureusement jusqu'à ce que ce parti arrive au pouvoir. Et maintenant ils veulent faire une enquête... une commission d'enquête sur un processus qu'ils ont eux-mêmes changé. Je veux savoir... je veux savoir du premier ministre...

Des voix: ...

Le Président: Attention! S'il vous plaît! Sur une question de règlement, M. le leader du gouvernement.

M. Dupuis: ...de règlement, M. le Président, sur la question de règlement, la chef de l'opposition officielle, en posant sa question, met en doute la parole du premier ministre, puisqu'il a dit... puisque... Non, non.

Des voix: ...

Le Président: S'il vous plaît! S'il vous plaît! Premièrement, on va s'assurer de vous entendre, M. le leader du gouvernement.

Une voix: ...

Le Président: Oui, bien, c'est ça, on va prendre le temps. Et allez-y rapidement, terminez votre question de règlement. Ça va être rapide.

Des voix: ...

Le Président: S'il vous plaît! Sur votre question de règlement, rapidement.

M. Dupuis: Alors, la chef de l'opposition, la chef de l'opposition, M. le Président, par sa question, contrevient au règlement de l'Assemblée nationale, où il faut accepter la parole du député, et elle continue à dire des choses qui ont été contredites par le premier ministre.

Le Président: Simplement que l'interprétation qu'en fait la présidence... qu'il s'agit ici d'une question d'opinion. Mme la chef de l'opposition officielle, vous continuez votre question.

Mme Marois: M. le Président...

Des voix: ...

Le Président: S'il vous plaît! S'il vous plaît! À l'ordre, s'il vous plaît! Sur la question de règlement, M. le leader du gouvernement.

M. Dupuis: Là, je pense qu'on ne s'est pas compris, M. le Président. Ceci étant dit, très respectueusement, ce n'est pas... ce n'est pas... la question de la députée, de la chef de l'opposition, n'est pas une question d'opinion. Le premier ministre dit, à plusieurs reprises en cette Chambre, qu'il est faux de prétendre que le processus de nomination a changé; elle pose sa question en disant: Le processus a changé. C'est contraire au règlement de faire ça. Voyons!

Le Président: Alors, ma réponse avait été donnée, la décision est rendue. Mme la chef de l'opposition officielle.

Mme Marois: Je veux savoir si la façon d'appliquer le processus a changé et je veux surtout savoir, je veux savoir si les membres du Conseil des ministres ont accès aux noms des juges, ont accès aux noms des juges éligibles, pas à la liste, aux noms des juges éligibles...

Le Président: En réponse, M. le premier ministre.


M. Jean Charest

M. Charest: Bien, vous avez entendu la réponse en choeur, spontanément, venant de la part de ceux qui sont au Conseil des ministres. La réponse est non. Tous ces gens-là qui sont au Conseil des ministres, et depuis 2003, la réponse ne peut pas être autre chose que non, parce que ça n'a pas changé. Alors, voilà. Voilà, M. le Président.

Mais la chef de l'opposition officielle, elle connaît ça, le processus de nomination des juges. Lorsqu'elle était, elle, au Conseil des ministres, en 1993, un nommé Richard Therrien avait été nommé par son gouvernement juge, lui qui avait un passé... Elle dit: Puis?, M. le Président. Elle me dit: Puis? Bien, puis, c'est ceci: Vous avez dit, vous, vous avez déclaré, suite à...

Le Président: En terminant.

M. Charest: ...sa nomination puis l'histoire: «Je [l'avais déjà] rencontré [lorsque] j'étais dans l'opposition. Il m'avait [mentionné] qu'il voulait être juge.» Il avait donc fait du lobbying auprès de la chef de l'opposition officielle, monsieur...

Le Président: En question complémentaire, Mme la chef de l'opposition officielle.


Mme Pauline Marois


Mme Marois: Je comprends que des collecteurs de fonds du Parti libéral auraient, eux, connaissance de la liste des candidats admissibles. Ce que je veux savoir du premier ministre, c'est si les attachés de presse de la ministre de la Justice et du ministre des Transports contredisent... qui contredisent les propos de la ministre, ont tort ou raison.

Est-ce que les membres du Conseil des ministres peuvent avoir accès aux noms des candidatures à la magistrature, M. le Président?

Le Président: Avant de vous céder la parole, M. le premier ministre, je vous indique qu'une seule personne peut répondre aux questions, donc les réponses collectives ne sont pas acceptées. Et la réponse appartient maintenant au premier ministre.


M. Jean Charest


M. Charest: M. le Président, vous avez... vous avez dû entendre, puis les gens qui nous écoutent, peut-être qu'ils l'ont entendue également, spontanément, en choeur, la réponse venant de ceux qui sont directement concernés, qui répondent non. La réponse, c'est non.

Le Président: En troisième complémentaire... En troisième complémentaire, Mme la chef de l'opposition officielle.


Mme Pauline Marois

Mme Marois: M. le Président, ce qui est assez étonnant, c'est qu'il semble que, par ailleurs, les donateurs du Parti libéral, eux, auraient accès à une connaissance des... auraient accès à la connaissance des noms des personnes qui sont en liste pour être nommées comme juges, M. le Président. Nous comprenons qu'à tout le moins des membres de l'Exécutif du gouvernement peuvent influencer ces nominations, puisqu'un des donateurs du Parti libéral l'affirme formellement en ce qui concerne le ministre délégué aux Transports.

Je veux savoir...

.(10 h 50).

Le Président: Votre temps est terminé. Le temps est terminé. M. le premier ministre.

M. Jean Charest


M. Charest: La réponse... la réponse est toujours la même, M. le Président, la réponse, c'est non. Maintenant, M. Bellemare peut faire des allégations, et on sait que la chef de l'opposition officielle a choisi de s'associer corps et âme avec M. Bellemare et tout ce qu'il dit, tout ce qu'il fait.

Une voix: ...

M. Charest: Ah! bien, vivez avec, parce que vous avez... Elle ne peut pas... elle ne peut pas, un jour, se lever puis dire: Je suis d'accord avec M. Bellemare, puis, le lendemain, dire: Non, je ne suis pas avec M. Bellemare. Elle devra vivre avec, M. le Président. Il a beau... S'il fait des allégations, on a nommé un juge, un ancien juge à la Cour suprême du Canada, pour aller au fond des choses, pour justement entendre ceux qui ont des choses à dire là-dessus. Je pense que c'est la façon de procéder pour protéger...

Le Président: En terminant.

M. Charest: ...l'intégrité de notre système judiciaire, et c'est ce que nous ferons, M. le Président. Pour le reste, la réponse, c'est non.

Le Président: En question principale, Mme la leader du deuxième groupe d'opposition.

DEMANDE D'ENQUÊTE SUR LE FINANCEMENT DU PARTI LIBÉRAL DU QUÉBEC

Mme Sylvie Roy


Mme Roy: Merci, M. le Président. Lundi dernier, on a assisté à une première: un ex-membre de la famille libérale, en l'occurrence Me Marc Bellemare, a brisé l'omerta que le premier ministre impose. Le résultat: une importante poursuite judiciaire contre l'ex-ministre et Procureur général. C'est la méthode du gouvernement libéral. J'y ai moi-même goûté, on a tenté de m'expulser de la Chambre pour avoir fait des affirmations qui ne plaisaient pas.

Aujourd'hui, les Québécois disent au premier ministre qu'ils ne sont pas dupes. Pour accourir à la défense du premier ministre, les grands argentiers du Parti libéral clament dans les médias leurs faits d'armes, soit le fait d'avoir influencé le gouvernement pour faire nommer des personnes. Il n'y a qu'un pas à franchir entre ça pour en arriver à la conclusion que, si tu donnes au Parti libéral, tu vas recevoir du gouvernement.

En refusant une enquête sur le sujet, est-ce que c'est ça que le premier ministre veut que les Québécois continuent de conclure?

Le Président: M. le premier ministre.

M. Jean Charest


M. Charest: M. le Président, d'abord, je veux réitérer que nous allons effectivement, par la commission d'enquête, aller au fond des choses sur les allégations qui sont faites par M. Bellemare et que le juge pourra entendre... l'ancien juge Bastarache pourra entendre tous les témoins. Alors, comme ça, on aura... on pourra faire la part des choses. Et je réitère que, sur les affirmations de M. Bellemare, on a eu l'occasion d'y répondre. On a donné des réponses très claires.

Maintenant, elle se plaint du fait qu'elle s'est levée à l'Assemblée nationale et qu'elle aurait, semble-t-il... Selon sa version à elle, on aurait voulu l'expulser. Le souvenir que j'en ai, c'est que la députée de Lotbinière s'est levée à l'Assemblée nationale, puis, en faisant des affirmations, elle a sali la réputation de tous ceux qui sont au Conseil des ministres. Le deuxième souvenir que j'ai, c'est que ce que la députée de Lotbinière a affirmé, c'était faux, ce n'était pas vrai.

Puis je pense que, pour une fois, elle devrait peut-être mesurer, avec les autres députés, que, quand on se lève à l'Assemblée nationale avec l'immunité parlementaire puis on affirme des choses qui sont fausses sur la réputation des gens sans mesurer les conséquences, que ça a un impact sur les gens. On a beau penser que c'est un jeu politique, pour certains, ce n'est pas ça; ça a un impact sur eux, ça a un impact sur leurs familles également, puis ça a un impact sur leur vie. Alors, avant de dire des choses, on devrait peut-être les mesurer. Vous devriez le faire. Moi, j'essaie de le faire dans ma vie, puis, quand je fais une erreur, je me rétracte. Vous devriez peut-être le faire, vous aussi. Puis l'opposition officielle devrait peut-être faire un examen de conscience avant de salir toute la classe politique comme...

Des voix: ...

Le Président: Alors, juste avant de vous céder la parole, Mme la députée, je veux simplement vous indiquer qu'à plusieurs reprises le terme qui a été utilisé aujourd'hui, de «salir des réputations», a été utilisé... Je veux vous indiquer qu'à chaque fois j'ai... J'ai moi-même demandé de retirer ce propos à quelques reprises. Quand ça ne donne pas lieu à des débats... Je remarque qu'au cours des dernières semaines le terme a été utilisé à beaucoup, beaucoup d'exemplaires, et il suscite maintenant des débats, comme ce fut le cas hier. Je ne pense pas que ça contribue ni au climat de cette Chambre ni au décorum en cette Chambre. Alors, conséquemment, je vais demander aux parlementaires en cette Chambre de ne plus utiliser le terme, il sera dorénavant considéré comme étant... ne pas... on ne pourra plus l'utiliser. C'est un terme que je considère qui ne contribue pas au décorum en cette Chambre. Conséquemment, autant au premier ministre qu'à tous les membres en cette Chambre, je demande à ce que ce terme-là soit dorénavant banni de nos propos.

Mme la leader du deuxième groupe d'opposition.


Mme Sylvie Roy


Mme Roy: On a eu une réponse claire de la population du Québec ce matin. Est-ce que le premier ministre se rend compte que des membres influents, des collecteurs de fonds de son parti se vantent d'influencer les nominations du gouvernement parce qu'ils sont d'importants collecteurs de fonds, et ce, publiquement, que les ministres doivent ramasser chacun 100 000 $, que trois ministres sont sous enquête du DGE? Est-ce que le premier ministre se rend compte que c'est sur cela que les Québécois veulent une enquête? Est-ce que le premier ministre les entend, ou c'est le chef...

Le Président: M. le premier ministre.

M. Jean Charest

M. Charest: M. le Président, le parti politique que j'ai l'honneur et le privilège de diriger, c'est un parti politique qui fait son financement en fonction des règles. On est appuyés par des milliers de bénévoles à travers tout le Québec et nous faisons notre financement en fonction puis en vertu des règles, parce que les gens appuient les idées que nous défendons et les principes que nous défendons, ce qui est parfaitement conforme à notre démocratie, M. le Président. On est très fiers de ca.

Et, lorsque... si jamais il y a des... il y a des erreurs, il y a des gens qui ne sont pas dans l'intérieur des règles, on agit tout de suite. C'est plus que ce qu'on peut dire pour le PQ, qui s'est fait payer un lunch de 14 000 $ puis qui n'a pas trouvé le jour de le rembourser...

Une voix: ...

M. Charest: ...l'ADQ, par contre, qui s'est fait payer un lunch de 14 000 $ puis qui, à ce jour, n'a...
Le Président: Mme la leader du deuxième groupe d'opposition.

Mme Sylvie Roy

Mme Roy: M. le Président, est-ce que... Les Québécois nous l'ont dit clairement ce matin, ils veulent connaître la vérité.

Est-ce que, pour une fois, c'est un premier ministre digne de sa fonction qui va écouter la population? Est-ce que le premier ministre va élargir le mandat du juge Bastarache ou, encore une fois, c'est le chef du Parti libéral qui va continuer à faire la promotion du silence sur les méthodes au Parti libéral?

Le Président: M. le premier ministre.


M. Jean Charest

M. Charest: M. le Président, sur la question du financement des partis politiques, il y a une institution très importante que nous avons, nous, créée au Québec, qui s'appelle le Directeur général des élections, tellement importante que la personne qui occupe ce poste reçoit l'appui... est sanctionnée par les deux tiers des députés qui siègent à l'Assemblée nationale du Québec, incluant l'ADQ. Et, lorsqu'il y a des allégations sur la question du financement, c'est la responsabilité du Directeur général des élections à enquêter. Il n'y a personne qui remet en question son intégrité, sa probité, son honnêteté, sauf une personne: Marc Bellemare. Et, si, vous, vous remettez en question l'intégrité du DGE...

Le Président: En terminant.

M. Charest: ...dites-le aujourd'hui. Sinon, c'est là où les choses doivent se régler.

Le Président: En question principale, M. le député de Marie-Victorin.


INFLUENCE DES COLLECTEURS DE FONDS DU PARTI LIBÉRAL DU QUÉBEC

M. Bernard Drainville


M. Drainville: M. le Président, un autre collecteur libéral est intervenu pour faire nommer un juge. Il s'agit de M. Guy Bisson, qu'on a bien connu lors de la commission Gomery et qui est le principal organisateur du Parti libéral du Québec dans l'Outaouais.

Extrait du reportage d'Alain Gravel:

«Est-ce que vous avez déjà demandé à ce que votre fils soit nommé juge?»

Réponse de M. Bisson:

«J'en ai parlé à monsieur [l'actuel ministre délégué aux Transports].»

Question du journaliste:

«Et qu'est-ce que [l'actuel ministre délégué aux Transports] vous a dit?»

«Il m'a dit qu'il serait temps qu'il y ait des procureurs de la couronne qui soient nommés juges, parce qu'il est spécialiste en criminel.»

Et là il s'est passé quoi, M. le Président? Bien, l'actuel ministre délégué aux Transports est intervenu auprès du ministre de la Justice d'alors, Marc Bellemare. Il lui en a parlé comme collègue pour lui dire qu'il y avait quelqu'un dans sa région qui passait les tests, a confirmé le porte-parole du ministre. Ai-je besoin de préciser que le fils de Guy Bisson a été nommé juge, M. le Président?

M. le Président, comment le premier ministre peut-il dire que les noms des candidats à la magistrature ne sont pas connus d'avance, alors que ce sont les ministres eux-mêmes qui mettent les noms sur la liste?

Le Président: Mme la ministre... M. le premier ministre. M. le premier ministre.

Des voix: ...

Le Président: Un instant. M. le premier ministre.


M. Jean Charest

M. Charest: Bien, je trouve intéressant l'extrait du député de Marie-Victorin, alors qu'il relate des propos, qui dit: Un procureur général... ou un procureur de la couronne, par contre, devrait avoir accès également à la magistrature. Ce n'est pas une mauvaise chose, ce n'est pas une mauvaise idée en soi. Mais, dans sa question et la fin de sa question, il prétend, le député de Marie-Victorin, qu'un membre du gouvernement dresse la liste. Il sait très bien que ce n'est pas le cas. Il sait très bien que le processus est tel qu'il y a un comité qui détermine la compétence des candidats, M. le Président. C'est comme ça. Il n'y a personne qui remet ça en question, personne d'honnête, en tout cas.

.(11 heures).

Le Président: En question complémentaire, M. le député de Marie-Victorin.

M. Bernard Drainville

M. Drainville: M. le Président, quand on sait que les collecteurs de fonds du Parti libéral ne perdent pas leur temps avec des petits montants de 200 $, comme l'affirme le collecteur de Québec, Charles Rondeau, qui dit ce matin: Je ne me souviens pas la dernière fois que quelqu'un m'a donné 200 $ pour le Parti libéral, et quand on sait que le ministre délégué aux Transports doit ramasser 100 000 $ par année pour rester ministre, est-ce qu'on peut savoir combien, combien ça lui a rapporté de nommer le fils de son collecteur de fonds juge? Combien ça lui a rapporté sur son 100 000 $?

Des voix: ...

Le Président: À l'ordre, s'il vous plaît! Alors, avant de donner la parole au premier ministre, j'invite les gens qui posent les questions de s'adresser à la présidence.

Des voix: ...

Le Président: Bon. On peut maintenant entendre le premier ministre. M. le premier ministre.

M. Jean Charest

M. Charest: Monsieur... M. le Président, vous êtes témoin d'un contexte puis d'une situation où l'utilisation de l'immunité parlementaire est maintenant abusée systématiquement de la part de l'opposition, systématiquement, tous les jours, à un point tel où ils ne pourraient pas répéter le quart de ce qu'ils... se dit à l'Assemblée nationale à l'extérieur. Ils ne peuvent pas le répéter parce qu'ils ont absolument besoin de l'immunité parlementaire pour affirmer ces choses-là.

Le député de Marie-Victorin sait très bien qu'il vient de déformer les propos de M. Rondeau. Tous ceux qui ont lu l'article ce matin savent très bien que ce n'était pas ça le sens de son propos. Tout le monde le sait, alors... Sauf qu'il joue quand même ce jeu-là.

Le Président: En terminant.

M. Charest: Puis il sait très bien aussi que l'honnêteté du député de Papineau n'est pas remise en question, que la probité non plus... de M. Bisson, non plus.

Le Président: En deuxième complémentaire, M. le député de Marie-Victorin.

M. Bernard Drainville


M. Drainville: M. le Président, le virus de la commission Gomery commence déjà à faire des ravages parmi les collecteurs libéraux. Charles Rondeau, qui organise, entre autres, le cocktail du premier ministre à Québec avec M. Fava, Charles Rondeau est intervenu pour faire nommer un juge, mais il ne se souvient plus de qui au juste. Il dit de celui qu'il a nommé: Je le connais bien. J'étais content pour lui quand il a été nommé. Je le connais parce qu'il a travaillé dans le Parti libéral. Mais il ne se souvient plus de son nom.

M. le Président, pourquoi le gouvernement libéral a-t-il corrompu...

Le Président: M. le député de Marie-Victorin, je vous invite à retirer le dernier propos que vous avez tenu, c'est carrément non parlementaire.

Des voix: ...

Le Président: M. le député de Marie-Victorin, le retirer, sans commentaire.

Des voix: ...

Le Président: M. le député sait le terme qu'il a utilisé.

Des voix: ...

Le Président: Non, non, je ne veux pas reposer la question.

Des voix: ...

Le Président: Alors, je vous demande carrément de retirer le terme qui a été utilisé, qui est le terme «corrompu». Je vous demande de le retirer, sans propos. Veuillez le retirer.

Des voix: ...

Le Président: Très bien. Très bien. Alors... Vous n'avez pas la parole.

Des voix: ...

Le Président: Attention! S'il vous plaît. Le terme est retiré. M. le premier ministre.

M. Jean Charest


M. Charest: Bon, alors, le député de Marie-Victorin a bien été obligé de retirer ses propos, M. le Président, parce qu'encore une fois ça dépasse... ça dépasse ce qui est... ce qui est convenable, ça dépasse l'entendement que d'avoir des questions comme ça.

Comment il explique, lui... Parce que, là, il semble qu'ils ont trouvé cette nouvelle vertu: Comment explique-t-il que son ancien chef, sur la nomination de l'ancien juge Therrien, qui a depuis été démis de ses fonctions parce qu'il avait un passé felquiste, disait: Je l'avais rencontré - hein - et qu'il m'avait mentionné qu'il souhaitait être juge et qu'elle était au Conseil des ministres au moment où il a été nommé?

Le Président: En terminant.

M. Charest: Peut-être qu'elle peut nous expliquer dans quelle circonstance tout ça est arrivé, M. le Président?

Des voix: ...

M. Charest: À moins... à moins que...

Des voix: ...

M. Charest: ...M. le Président, qu'elle soit comme...

Le Président: En question principale, M. le député de Verchères.

*

CONTRATS POUR LA DÉMOLITION ET LA RECONSTRUCTION DU PONT DE LA MONTÉE FASSETT, SUR L'AUTOROUTE 50 EN OUTAOUAIS

M. Stéphane Bergeron


M. Bergeron: En 2008, le ministère des Transports du Québec a dû ordonner la démolition et la reconstruction d'un viaduc flambant neuf de la montée Fassett, sur l'autoroute 50 en Outaouais, parce qu'il présentait des défauts majeurs. À qui avait été octroyé le contrat pour la construction de ce viaduc, M. le Président? À nulle... entreprise que Nelson, du collecteur de fonds libéral Franco Fava. Or, M. Fava a le bras long, M. le Président. Non seulement a-t-il été en mesure de pistonner la nomination de juges et le secrétaire général du gouvernement, mais il a donné en plus, en sous-traitance, le contrat de bétonnage de ce viaduc à l'entreprise du député d'Argenteuil et ex-ministre du Travail, ABC Rive-Nord.

Le ministre... Le premier ministre ne trouve-t-il pas embarrassant de voir que son principal collecteur de fonds dans la région de la Capitale-Nationale peut non seulement influencer les décisions de son gouvernement, mais qu'il gratifie l'entreprise de l'un des membres du Conseil des ministres de généreux contrats? Était-ce, pour M. Fava, une façon de s'assurer de la présence au Conseil des ministres d'un homme de confiance?

Le Président: M. le ministre délégué aux Transports.

M. Norman MacMillan

M. MacMillan: Merci, M. le Président. Tout le monde sait comment c'est important, l'autoroute 50 pour l'Outaouais, et, on sait, pour la montée Fassett, la construction du viaduc qui fait partie de l'autoroute 50, c'est un... c'est un dossier qui est très important non seulement pour l'Outaouais, mais pour les Laurentides aussi. Lors de la construction de ce viaduc, un bris mécanique s'est produit à l'usine de fabrication du béton. Ce bris a occasionné un délai dans la coulée, faisant en sorte que la durée de vie du viaduc aurait été compromise. Alors, face à cette situation, le ministère du Transport a pris ses responsabilités et a demandé de recommencer le viaduc, point à la ligne.

Le Président: En question complémentaire, M. le député de Verchères.

M. Stéphane Bergeron


M. Bergeron: M. le Président, le premier ministre ne trouve-t-il pas embarrassant de voir que son principal collecteur de fonds dans la région de la Capitale-Nationale peut non seulement influencer les décisions de son gouvernement, mais qu'il gratifie l'entreprise de l'un des membres du Conseil des ministres de généreux contrats? N'est-ce pas une façon de... pour M. Fava, de s'assurer de la présence au Conseil des ministres d'un homme de confiance?

Le Président: M. le ministre délégué aux Transports.

M. Norman MacMillan

M. MacMillan: Les deux contrats qui ont été émis pour... sur l'autoroute 50, pour la montée Fassett, ça a été par appel d'offres public et a respecté les règles en toute transparence, et le plus bas soumissionnaire a eu le contrat.

Le Président: En deuxième question complémentaire, M. le député de Verchères.

M. Stéphane Bergeron

M. Bergeron: Sauf que le sous-traitant n'a pas été choisi par appel d'offres, M. le Président. Dans une demande d'accès à l'information présentée en juin 2009, nous avons tenté d'obtenir les documents relatifs à ce fiasco. Le ministère des Transports a refusé, alléguant que cela pourrait avoir une incidence sur d'éventuelles procédures judiciaires.

Peut-on au moins nous dire si l'entreprise Nelson a poussé l'audace jusqu'à présenter des réclamations au gouvernement pour la démolition et la reconstruction de ce viaduc mal foutu?

Le Président: M. le ministre délégué aux Transports.


M. Norman MacMillan


M. MacMillan: M. le Président, on va se rappeler les faits: deux contrats, totalisant 35 millions, ont été donnés, le premier dans les Laurentides, un contrat de 11,6 millions, soit 78 % de l'estimé du ministère du Transport, à 14,8, et le règlement total, à ce jour, est de 12 millions. 9,9 millions de réclamations supplémentaires ont été présentées par la... Le dossier est devant les tribunaux. Et neuf soumissionnaires... le deuxième était de 12,8. Et, dans l'Outaouais, un contrat de 23,9 millions, soit 96 % de l'estimé du MTQ, à 25 millions, et les deux soumissionnaires... le deuxième était le plus bas... était de 25 millions.

Le Président: En question principale, M. le député de La Prairie.

*

CONTRAT ENTRE LA COMMISSION DE LA SANTÉ ET DE LA SÉCURITÉ DU TRAVAIL ET LA FIRME DMR CONSEIL

M. François Rebello


M. Rebello: M. le Président, la CSST va verser 37 millions en pure perte à la firme informatique DMR. Le responsable de cette décision, alors président de la CSST, Gérard Bibeau, a été nommé depuis fonctionnaire en chef du gouvernement. À la suggestion de qui? Franco Fava, collecteur de fonds du Parti libéral et, bien sûr, membre du C.A. de la CSST. Notez bien aussi que Gérard Bibeau a donné le contrat à DMR, la firme où sa femme est conseillère senior. M. le Président, à la CARRA, où on a aussi eu de graves problèmes informatiques, la direction a commandé un rapport de vérification externe.

Pourquoi le ministre du Travail ne demande pas de comptes à la CSST, qui vient de gaspiller 37 millions? Est-ce que c'est pour couvrir Franco Fava, son principal collecteur de fonds dans sa région, M. le Président?

.(11 h 10).

Le Président: M. le ministre du Travail.

M. Sam Hamad

M. Hamad: M. le Président, je dois rappeler le député que la CSST, c'est un conseil paritaire, c'est-à-dire représentant du patronat et représentant des syndicats. Et d'ailleurs un des syndicats... Le député se rappelle, il avait des mandats de ces syndicats-là dans sa vie avant de faire de la politique. C'était son ex-employeur qui est dans le conseil d'administration de la CSST. Alors, c'est un conseil paritaire, c'est extrabudgétaire, donc c'est le conseil et la direction qui gèrent les mandats.

Maintenant, M. le Président, j'aimerais mentionner aussi: Malheureusement, c'est un contrat qui a eu des difficultés en termes d'échéancier, livraison de produits, définitivement. La CSST est intervenue pour arrêter le mandat parce qu'ils ne voulaient plus avoir d'autre dépassement de coûts. Ils ont agi de bonne foi, et il y a eu des discussions. Ils sont... Ils ont nommé un arbitre, et l'arbitre, il a... il a réglé le dossier.

D'ailleurs, l'avocat à la CSST, c'est... c'est M. Bédard, le frère du leader de l'opposition, qui est intervenu dans le dossier, et je pense qu'il a fait son possible. Alors, le...

Des voix: ...

Le Président: À l'ordre, s'il vous plaît! À l'ordre! On n'a pas terminé. M. le ministre, il vous reste 14... quelques secondes pour terminer. Il y a quelques secondes pour terminer.

M. Hamad: Oui. Alors, M. le Président, je pense que les avocats, ils ont fait leur travail, et on les... ils ont fait... ils ont essayé de régler ce litige-là...

Le Président: En terminant.

M. Hamad: ...et maintenant la CSST va...

Des voix: ...

Le Président: En terminant.

M. Hamad: Je ne suis pas capable de parler, M. le Président.

Des voix: ...

Le Président: S'il vous plaît! S'il vous plaît! Collègues, même s'il s'agit d'une dernière réponse, tout ce qui se dit en cette Chambre est important, alors je vous demande de ne pas interrompre la personne qui a à répondre. Alors, M. le ministre, je vous accorde la parole pour les quelques secondes qu'il reste.

M. Hamad: Alors, M. le ministre, depuis que... M. le Président, que la CSST est...

Le Président: Voilà. Alors, ceci met fin à la période de questions et de réponses orales des députés.


MOTIONS SANS PRÉAVIS


La Vice-Présidente (Mme Houda-Pepin): Alors, comme il n'y a pas de votes reportés, nous allons maintenant passer à la rubrique des motions sans préavis.

*

AFFAIRES DU JOUR


Alors, la période des affaires courantes étant terminée, nous allons maintenant passer aux affaires du jour. M. le leader du gouvernement.

M. Gautrin: Je vous remercie, Mme la Présidente, Auriez-vous l'amabilité d'appeler l'article 11 du feuilleton, s'il vous plaît?

Projet de loi n° 93

ADOPTION DU PRINCIPE


La Vice-Présidente (Mme Houda-Pepin): À l'article 11 du feuilleton, M. le ministre responsable de la Réforme des institutions démocratiques propose l'adoption du principe du projet de loi n° 93, Loi modifiant la Loi électorale concernant les règles de financement des partis politiques et modifiant d'autres dispositions législatives. Y a-t-il des interventions? M. le ministre responsable de la Réforme des institutions démocratiques.


M. Robert Dutil


M. Dutil: Alors, Mme la Présidente, il me fait plaisir d'être ici aujourd'hui pour le débat sur l'adoption de principe du projet de loi n° 93, Loi modifiant la Loi électorale concernant les règles de financement des partis politiques et modifiant d'autres dispositions législatives.

(…)

La Vice-Présidente (Mme Houda-Pepin): Je vous remercie, M. le député de Beauce-Nord. Je reconnais maintenant M. le député de Chicoutimi, porte-parole de l'opposition officielle en matière de réforme des institutions démocratiques et leader de l'opposition officielle.

M. Stéphane Bédard


M. Bédard: Merci, Mme la Présidente. Nous parlons d'un important projet de loi dans un contexte très particulier. Vous comprendrez que je me sens particulièrement préoccupé par la suite du projet de loi dans le contexte que nous connaissons. Un projet de loi ne peut pas être fait de manière artificielle ou sans tenir compte de la réalité dans laquelle nous vivons au Québec. Or, je ne peux pas faire autrement qu'après avoir entendu le ministre... constater qu'on fait comme abstraction de notre réalité, notre réalité qui s'est amplifiée, je vous dirais, dans les dernières heures, dans les derniers jours, dans les derniers mois, dans les dernières semaines.

De parler d'un projet de loi ambitieux, je pense qu'on ne peut pas dire ça. Je pense que ce serait même plus que téméraire, ce serait faire de l'aveuglement volontaire, Mme la Présidente, que de parler d'un projet de loi ambitieux. Le but, actuellement, qui est recherché - et c'est le but que nous nous sommes fixé au Parti québécois - c'est celui de ramener la confiance de la population dans la politique, dans ses institutions et, encore plus, dans le système de financement des partis politiques. Quiconque va lire les dispositions de ce projet de loi va constater, Mme la Présidente, avec regret que ce projet de loi ne rencontre pas cette obligation qui est donnée actuellement au gouvernement, mais à tous les parlementaires, à tous ceux, du moins, qui ont à coeur les institutions du Québec de ramener cette confiance, de briser le lien, de briser le lien qui s'est amplifié dans les derniers jours, dans les dernières semaines entre l'argent qui est donné, qui est perçu par les partis et les décisions politiques, les décisions gouvernementales.

Je n'ai pas à vous faire l'apologie... ou plutôt vous faire l'historique des questions, des déclarations de la plupart des... de grands collecteurs du Parti libéral dans les dernières semaines, dans les derniers jours plus particulièrement. Ils se sont même vantés, vous le savez, Mme la Présidente, d'avoir une influence névralgique sur la nomination du plus haut fonctionnaire du Québec. Pourquoi? Pourquoi plus que vous, Mme la Présidente? Pourquoi plus que moi? Pourquoi plus que le secrétaire général de l'Assemblée? Pourquoi plus que le bâtonnier du Québec? La seule réponse qu'il y a, c'est que ces gens détiennent leur pouvoir strictement par le fait qu'ils ramassent de l'argent, et beaucoup d'argent. Quand on a de la misère à savoir si c'est 200, 300 ou 400, c'est qu'on en ramasse pas mal, de l'argent, Mme la Présidente. Et on ne parle pas du plus gros collecteur, on parle d'un collecteur ici, à Québec, et il y en a d'autres. On a parlé de Marc Bibeau à Montréal, Marc Bibeau qui a été identifié, vous le savez, Mme la Présidente, dès 2004 comme étant la personne qui tirait les ficelles au gouvernement. C'était celui qui pouvait modifier les législations. Je vous invite à aller voir un reportage de Mme Sophie Langlois, qui avait établi très clairement qui était, au Québec... dans le gouvernement du Québec, qui était détenteur du pouvoir de ce gouvernement clandestin, qui a assez de pouvoir pour renverser même les décisions d'un ministre.

Le pouvoir qu'on a ici, en cette Chambre, Mme la Présidente, il nous est confié, il nous est confié par des gens qui croient en notre système démocratique. Dans les faits, il nous est confié, mais il nous est emprunté pour une certaine période. Pourquoi? Parce que d'autres après nous devront justement assumer ce rôle mais, en même temps, être les porteurs de cette volonté démocratique. Et, normalement, le pouvoir de faire des lois au Québec, le pouvoir de diriger les actions de ces autres concitoyens devrait être déterminé par une seule chose, Mme la Présidente, par le pouvoir de vote de nos concitoyens.

.(12 h 10).

Je n'ai pas besoin de vous rappeler les citations de Thomas Jefferson jusqu'à... aux grands démocrates encore ici, où il faut se méfier des gens qui prennent plaisir à exercer un pouvoir, comment il se méfiait de ces gens et il disait: La démocratie, ça nous permet de nous prémunir contre ceux qui, avec plaisir, exercent ce pouvoir. Pourquoi? Parce que justement, ultimement, la population peut changer ce pouvoir, peut l'enlever à ceux et celles qui l'exercent. Or, lui, le pouvoir de l'argent, il est constant et, jamais dans l'histoire du Québec. il n'a été exercé avec autant de force que depuis les dernières années. Les révélations qu'on voit, elles ne sont pas nouvelles, mais elles sont faites avec beaucoup plus de force et beaucoup plus de clarification par rapport au rôle obscur que jouent des gens qui n'ont pour fonction que de ramasser de l'argent pour le Parti libéral du Québec.

Je suis convaincu que même des députés de la formation du Parti libéral du Québec ne connaissent pas ces gens. Je suis convaincu que le député de la Gaspésie ne le connaît même pas, ne connaît pas M. Marc Bibeau. Mais la plupart, à Montréal, le connaissent, Mme la Présidente, comme ceux, j'imagine, de la région de Québec connaissaient M. Fava, mais les autres députés ne le connaissent même pas. Or, ces gens détiennent un pouvoir extraordinaire, plus fort que le leur. Ce qu'on a appris, par contre, c'est qu'en plus ils ont un pouvoir même au-dessus du Conseil des ministres. Ils ont un accès direct au premier ministre, soit, mais, moi, j'ai toujours... j'ai été à l'école où, quand tu te confrontes à un élu et tu n'es pas un élu, normalement c'est le non-élu qui perd. Ça a toujours été ça, moi, l'école à laquelle j'ai été élevé. Pourquoi? Parce que l'élu, lui, il détient son pouvoir, qui est beaucoup plus fort, il le tient de la population.

Or, nous sommes dans un cycle politique, Mme la Présidente, où le pouvoir de l'argent occulte a beaucoup plus de force que la simple élection d'un individu ou même son accession au Conseil des ministres. Et ce que je dis là, ce n'est même pas moi qui le dis. Je le dis aujourd'hui, mais, avant moi, d'autres l'ont dit, en 2004, en 2005, vous avez seulement à aller voir dans les archives de Radio-Canada. Mais, dernièrement, tous ces personnages sont revenus à la surface, et, encore cinq ans, six ans plus tard, ils détiennent le même pouvoir, c'est les mêmes personnes qui tirent les ficelles. Mais, savez-vous, par rapport à moi et à vous, ils n'ont pas été élus une seule fois. Nous avons vécu deux élections depuis ce temps-là. À aucune reprise ils n'ont été élus. Bien, ces gens-là, ils sont plus forts que vous et moi réunis, Mme la Présidente.

Je pense qu'on doit s'inquiéter, s'inquiéter que quelqu'un que personne ne connaît puisse se vanter de nommer le plus haut fonctionnaire du Québec. On doit s'inquiéter, Mme la Présidente, si on a à coeur nos institutions, que quelqu'un qui ramasse de l'argent dit qu'il est en relation avec le Secrétaire aux emplois supérieurs - ça, c'est ceux qui nomment les ministres, les sous-ministres, les dirigeants des agences, qui recommandent même les grands postes de nos sociétés d'État - que cette personne-là est en contact avec la Direction des emplois supérieurs, que sa parole a une importance telle que ses recommandations sont acceptées et qu'il vérifie même les membres des conseils d'administration, il donne son avis. Quand on a besoin de nominations, a-t-il dit, on m'appelle, je donne des noms. Quand certains sont proposés, je vérifie les noms, je donne mon opinion. Mais pourquoi cette personne détient autant de pouvoir? Et je vous en nomme une seule.

Aujourd'hui, même une autre est venue dire qu'elle a finalement parlé à l'ancien Procureur général. Elle n'est pas sûre, dit-elle. C'est vrai, j'ai parlé à quelqu'un. Peut-être pas au Procureur général, mais, effectivement, j'ai parlé pour la nomination de quelqu'un au poste de juge.

Je pense que la population du Québec ne croit plus le gouvernement - ça, on peut faire le constat ensemble - mais plus particulièrement une personne, vous le savez. Mais ce qui est plus grave, Mme la Présidente, c'est que l'attaque des institutions que nous connaissons actuellement est sans précédent et qu'elle mine la confiance du public envers tout le monde. Et là je dis tout le monde, c'est tous les membres de cette Assemblée et les juges.

Je vais faire un petit aparté, Mme la Présidente, pour demander au ministre une chose. On a assez de crises institutionnelles actuellement, le rapport du Directeur général des élections est encore... vous le savez, de la Commission de la représentation électorale est encore suspendu parce qu'on empêche la Commission de l'Assemblée nationale d'entendre le comité de représentation électorale pour donner suite à la Loi électorale et enfin avoir une carte électorale conforme à la loi. Là, ça fait un an et demi. Moi, j'ai le système judiciaire qui est ébranlé, j'ai le système exécutif et démocratique, législatif qui est ébranlé. On peut-u au moins laisser de côté le DGE, le sortir au moins de ça? Alors, j'ai fait quatre appels depuis la scission du projet de loi et j'annonce au ministre que, la semaine prochaine, le délai, il va être terminé. On ne peut pas suspendre impunément l'application de lois aussi fondamentales que la Loi électorale du Québec dans le cadre de la révision du processus de la carte électorale, c'est impossible. Mais, en plus, de le faire dans le contexte actuel, ça serait suicidaire, Mme la Présidente. Je pense que cette institution a besoin d'être protégée et je le fais vraiment par esprit de conservation, Mme la Présidente. Pas pour le ministre, pour moi et pour les élus. Je pense que cette institution a besoin d'être protégée, de la sortir de la mouvance actuelle.

Alors, au moins, qu'on demande à la Commission de l'Assemblée nationale d'entendre la Commission de représentation électorale pour qu'on finisse le processus, qu'on fasse en sorte que ces gens soient entendus et qu'on mène à terme le processus tel qu'il est prévu à la loi. Et, si le ministre a d'autres recommandations à faire, s'il veut aller de l'avant avec son projet de loi, bien on verra. On verra, mais on ne peut pas suspendre, comme on le fait actuellement depuis plus d'un an et demi, un processus qui est à la base de notre démocratie. S'il vous plaît, arrêtons, là! Puis là je ne dirais pas ça à la ministre de la Justice, je ne dirais pas ça au premier ministre, je dis ça au ministre du Revenu, mais aussi ministre responsable de la Loi électorale. Là, c'est le garde-fou, j'espère qu'il en est conscient. Et je le dis en toute amitié, puis là je l'ai fait avec...

Et vous savez à quel point je respecte les institutions, Mme la Présidente. Oui, on a des débats houleux, oui, des fois, on va dire des choses dures, mais j'essaie toujours de m'assurer que le président... le poste que vous occupez soit respecté - et, vous le savez, je l'ai fait d'ailleurs à plusieurs reprises - que nos règles soient respectées. J'ai la même préoccupation sur la Loi électorale, Mme la Présidente. C'est dangereux, c'est dangereux de jouer avec des dispositions de la Loi électorale aussi fondamentales que la représentation dans le contexte actuel, où on n'a pas l'accord des partis politiques. C'est dangereux.

Alors, j'ai donné cet avis, Mme la Présidente, à plusieurs reprises: au début de la commission parlementaire, avant même la tenue de la commission parlementaire, pendant la commission parlementaire, à la fin de la commission parlementaire. Je l'ai fait, il y a encore deux semaines et demie environ, avant la suspension des travaux de cette Chambre, où j'ai dit au président: Un seul parti actuellement, et c'est le Parti libéral du Québec, qui bloque la tenue de la commission, donc qui bloque le processus de la loi, qui fait en sorte que nous sommes dans l'illégalité actuellement concernant la Loi électorale. Alors, j'ai demandé à la présidence que, si le gouvernement ne bougeait pas, que, si le Parti libéral ne bougeait pas... nous allons demander à la présidence de trancher. J'espère que le ministre responsable se rend compte qu'il ne doit pas faire en sorte qu'on soit dans une situation où nous invoquions... où nous demandions au président de l'Assemblée nationale de trancher cette question sur un enjeu aussi important que la représentation électorale. Je l'implore, je l'implore parce qu'on n'a pas besoin de ça actuellement. Mais je le dis: On va le faire parce qu'on a assez attendu. D'ailleurs, l'ensemble des commentaires qu'on a... qui sont venus en commission parlementaire ont réclamé la scission mais ont aussi demandé: Mettez ça de côté. Mettez ça de côté pour différents motifs qui sont de divers ordres, mais mettez ça de côté.

Alors, j'espère que le ministre a bien entendu, j'espère que tous les gens qui sont concernés aussi - parce que ça concerne tous les députés - ont bien entendu aussi, nous devons continuer ce processus, et j'espère que ça sera le cas, Mme la Présidente. Je ne souhaite pas en arriver à être obligé de demander à la présidence de l'Assemblée nationale de trancher un débat aussi épineux et aussi, je vous dirais, névralgique quant à l'institution principale qui est le vote... qui est le respect du vote, qui est de la règle aussi claire que de l'égalité devant la loi et dans un système démocratique.

Donc, j'espère, là-dessus, que mes commentaires ont été clairs. C'est un des enjeux du projet de loi qui a été rejeté par la plupart des intervenants, et c'est pour ça qu'on a eu une scission, d'ailleurs. Mais les gens sont allés beaucoup plus loin, et le ministre le sait. Par contre, il peut garder son projet de loi. Moi, mon but n'est jamais, dans ces situations, que quelqu'un perde la face. Je lui dis aussi clair que ça: Je veux que personne ne perde la face. Alors, qu'on garde le projet de loi, suite aux représentations, qu'il reste au feuilleton, je n'ai aucun problème avec cela, Mme la Présidente, pour l'instant. Mais qu'on continue le processus.

.(12 h 20).

Donc, revenons, Mme la Présidente, à un autre aspect qui est très important, et c'est ce que je vous mentionnais d'entrée de jeu, c'était concernant le financement. Le contexte dans lequel le projet de loi a été proposé, vous le savez, était celui où des allégations inquiétantes concernaient tout le domaine de la construction au Québec. Vous vous en souvenez, c'était à l'automne et suite à divers reportages, à des interventions, des rapports, des collusions dévoilées, et même ce qui s'est passé - et on a l'impression que ça fait des lunes, là - à l'élection à Montréal - ça ne fait pas très longtemps, ça fait quelques mois - où on a vu le contrat des compteurs d'eau, là, où des firmes ont eu accès à des contrats sans appel d'offres pas de 1, 2, 5; 10 millions, là - puis là on trouverait ça énorme ici, 10 millions, là - 380 millions. Je n'aurais même pas assez de ma vie pour être capable de compter jusque-là, Mme la Présidente. Vous imaginez à quel point le système était rendu corrompu, 380 millions de dollars, on ne peut pas... Puis, peu importe qui est impliqué, le maire de Montréal a dit: Moi, je ne le savais pas, et, par la suite, il a dû annuler le contrat. Il a été réélu, d'ailleurs.

Mais c'est inacceptable. Quand un système est rendu à un point tel qu'on est capable de passer un contrat de telle nature, c'est que... Vous imaginez comment on en a passé avant, là. Quand on est rendu à essayer 380 millions, là, c'est qu'au début on a dû commencer à 1 000 $, 5 000 $, 10 000 $, 100 000 $, 1 million et on s'est rendu à 380 millions. Parce que, là, je vous dis 380, c'est peut-être 320, je vous dirais.

Alors, vous imaginez à quel point le système était rendu... avait été détourné de son objectif, et ça, toujours - et c'est ça qui est épatant, Mme la Présidente - sous le couvert de la légalité. À tous les moments, les firmes impliquées ont évoqué la légalité. Et, effectivement, on est capable, des fois, avec des lois, de rendre... Ce qui est totalement amoral, immoral, qui est dépourvu d'éthique, on est capable, maintenant, de le rendre légal. Et c'est ça qui est dramatique, Mme la Présidente, et c'est pour ça qu'on parle souvent de hauts standards éthiques dans nos lois. Pourquoi? C'est justement pour éviter que ce qui n'est pas éthique devienne légal. Ce n'est pas la première fois, vous le savez, Mme la Présidente.

Alors, il faut... On était face à ces événements au mois de... pendant toute la période de l'automne. Et, d'autres nouvelles, on a vu même des municipalités en banlieue de Montréal être l'objet des mêmes, je vous dirais... mais à plus petit échelle, évidemment, il y a moins de monde, mais des mêmes affirmations de collusion, de contrôle, même de tentative de contrôle d'une élection municipale. Quand tu es rendu à vouloir être capable de rentrer chez un élu, quelqu'un... un prétendant à une élection puis lui dire: Écoute, tu ne te présenteras pas, je vais te donner des bonnes raisons, là, ça se compte en argent, c'est que, un, c'est inacceptable, mais, quand tu es capable, tu te sens assez en confiance pour le faire, c'est que le système, dans les faits... Mme la Présidente, vous le savez très bien, c'est que tu as la conviction que le système, il te protège, qu'il n'y a pas de problème de faire ça. D'ailleurs, c'est ce que la personne a mentionné: C'est quoi, le problème?, dans ce cas-là, phrase qu'on a réentendue, vous le savez, encore cette semaine. C'est quoi, le problème? Quand le système protège ce qui est inacceptable, ce qui est amoral et non éthique, c'est qu'effectivement il y a un problème, et un problème dans le système.

Toutes ces révélations ont conduit à quoi, Mme la Présidente? À diverses mesures qui n'ont, dans les faits, aucun impact sur la réalité qu'on veut détruire, le système qui s'est établi en dehors même de la volonté, je suis convaincu, et de la connaissance de la plupart, de la plupart des membres de cette Assemblée, peu importe le côté de la Chambre. Au Québec, peu de gens sont au courant de ça. Ça aussi j'en suis convaincu. Quand tu es rendu, Mme la Présidente, qu'aujourd'hui, le 15 avril 2010 - et ça n'a même pas pu être abordé à la période des questions - le président du syndicat, de l'Association des policiers provinciaux du Québec, le président de l'Association des policiers provinciaux du Québec, la Sûreté du Québec, une grande institution, se dit «"déçu" du comportement du gouvernement [...] et de son ministre de la Sécurité publique[...], [qu'ils] ne cessent de répéter qu'il faut faire confiance aux enquêtes policières en cours, au détriment d'une commission d'enquête publique»... C'est la police qui dit ça. C'est elle-même qui fait les enquêtes.

Et elle dit plus loin... M. Dagenais «estime que le gouvernement libéral utilise le travail des enquêteurs de l'opération Marteau comme "parapluie" présentement, en disant que les enquêtes policières vont être en mesure de faire le ménage dans la corruption et la malversation. Il croit [...] que le gouvernement y va d'une "diversion"...» Ce n'est pas moi qui le dis, là, c'est un policier. Parce qu'en plus d'être président du syndicat des policiers à la Sûreté du Québec il est policier. «Il croit donc que le gouvernement y va d'une "diversion" avec sa commission d'enquête publique restreinte. "Si on veut faire le ménage une fois pour toutes, on ne peut pas limiter une commission d'enquête sur les nominations à la magistrature", a-t-il lancé.»

Personne ne peut forcer un policier au Québec de faire ça. Personne au Québec ne peut forcer le président du syndicat de la Sûreté du Québec de rappeler à l'ordre le gouvernement, ni son ministre ni le premier ministre, personne ne peut l'obliger. Ça, je peux vous le dire. Je connais assez les policiers de la Sûreté du Québec pour vous dire qu'il n'y en a pas un qui peut lui dire ce qu'il a à faire. Bien, lui, il dit: À chaque fois que le premier ministre se lève puis il parle de Marteau, là, bien il s'en sert comme parapluie, puis ça n'a pas de bon sens. C'est ça qu'il dit.

Honnêtement, Mme la Présidente, j'ai seulement 42 ans. Je suis sûr que vous n'avez pas tellement plus que moi, à peine, mais je ne pense pas que vous ayez vu ça de votre vivant, Mme la Présidente. Je ne pense pas que vous ayez vu ça de votre vivant et je ne pense pas que ni le leader adjoint du gouvernement ni même le ministre du Revenu a déjà vu ça de son vivant. Même dans les pires années de l'ère Duplessis, ce n'est jamais arrivé.

Je pense qu'il faut se rendre compte de la crise dans nos institutions. Je pense que c'est réel, Mme la Présidente. Puis, au-delà des débats qu'on fait à cette Assemblée, mon discours, il ne passera pas aux nouvelles, puis ça ne m'intéresse pas qu'il passe. Ce que je vous dis, c'est que je n'ai jamais vu une telle...

Une voix: ...

M. Bédard: Elle aura l'occasion, la députée de Gatineau, je crois, de se faire entendre. Je vais être très heureux de l'entendre là-dessus, sur la crise des institutions qu'on vit. Je serais curieux de l'entendre, d'ailleurs. Ça la fait rire, Mme la Présidente. Bien, je vous dis, au Québec, ça ne fait plus rire personne. Il n'y a plus personne qui rit de ça. Il n'y a plus personne qui trouve drôle le premier ministre quand il nous parle d'où est le lunch au Conseil des ministres. Il n'y a plus personne qui rit de la diversion.

Les gens, en fin de semaine, ils vont peut-être aller dans leurs comtés, et certains, plutôt, vont aller au conseil libéral. Bien, je les invite à entendre... Moi, chez nous, les gens, ils sont écoeurés. Puis ils sont écoeurés pas seulement dans mon comté, partout où je me promène. Puis ils ne me félicitent pas, ils me disent: On est écoeurés. Il faut l'entendre, là. On ne peut pas faire attention qu'on... on ne peut pas faire semblant de ne pas entendre ça. On ne peut pas dire que tout le monde a fait comme ça, c'est faux.

Le premier ministre parle d'Oxygène 9. Oxygène 9, là, c'est un ministre devant un député libéral, le député de Hull à l'époque, où il y a quelqu'un qui vient le voir - je le dis au long parce qu'on a une minute à l'Assemblée, on ne peut pas le dire - alors, qui vient le voir et qui rentre dans son bureau avec le député libéral. Vous vous souvenez, à l'époque c'est Roch Cholette, qui n'était quand même pas quelqu'un qui était réputé pour son manque de... C'était quelqu'un qui était plutôt partisan, qui avait un rôle très partisan, mais qui était un bon député, je pense, de son comté... Enfin, je le souhaite, mais c'était quelqu'un qui exerçait ses fonctions très bien. Oui, on peut l'applaudir. Alors, devant lui, il lui dit: Oui, il y a telle chose effectivement, le projet est bon, ça a de l'allure. Là, vous êtes à Investissement Québec, ce serait peut-être bien... Il y a telle firme que je connais, ils font de la représentation là-dessus. Ce serait peut-être bon que... pour vous aider à ce que le dossier chemine, le projet est très bon. C'est ça, Oxygène 9. C'est un ministre du gouvernement, devant un député libéral, qui dit à quelqu'un: Écoutez, ton projet est bon. Là, il y a des... Dans Investissement Québec, effectivement, ce n'est pas moi qui dicte, donc il y a des gens qui, au niveau économique, qui ont une bonne connaissance, qui peuvent t'aider. Devant un député libéral.

Est-ce que c'était bon ou ce n'était pas bon? Je pense que ce n'était pas bon de le faire. Qu'est-ce qui est arrivé? On a créé la loi sur le lobbying pour ça, Mme la Présidente, pour ce que je viens de vous raconter, seulement pour un aspect que, moi aussi, je trouve... Est-ce qu'il aurait dû faire ça? Non, mais est-ce que... quelle ampleur doit-on lui donner?

Le gouvernement s'est dit à l'époque: On ne doit pas donner des pouvoirs occultes ou qui ne sont pas connus. Le lobbying, avant, n'était pas encadré au Québec. On a dit: Il faut que ce soit connu, et c'est ce qui fait que, maintenant, on peut consulter les registres. Mais ce n'est pas des gens qui ont été payés, ce n'est pas une ristourne. Il n'a aucun intérêt, le député, à l'époque. Il ne recevait pas un salaire de personne autrement que de la population. Il n'y a rien de tout ça. Il n'y a pas d'argent qui transitait puis des contrats de construction, il n'y a rien de tout ça. Mais on a fait une loi sur le lobby.

Nous, on est dans de la collusion à grande échelle, on est dans des contrats sans appel d'offres qui sont donnés, des gens qui occupent des hautes fonctions dans des ministères, qui vont travailler pour des firmes sans qu'il n'y ait pas de garde-fou actuellement, plus particulièrement au ministère des Transports. Je pourrais faire une liste, qu'on n'a pas encore, malheureusement, pu faire à cause des événements, mais de gens qui ont traversé du jour au lendemain, puis, tout d'un coup, bien, les contrats ont suivi.

.(12 h 30).

Il vient un moment, il faut que ça arrête, il faut que ça arrête. La réponse du gouvernement à tout ça, là... Puis là je vous en nomme une partie, mais ce qu'on parle encore aujourd'hui, ce qu'on parle depuis des mois, ce n'est pas des allégations, Mme la Présidente. On a même, à Montréal, cassé un contrat. On a fait des démonstrations dans le système des garderies. Il va falloir en sortir combien, de scandales dans les garderies, madame... Quand on est rendus à utiliser les garderies, vous ne pensez pas qu'on est rendus loin, là, dans l'allocation de places? Bien, ça va prendre quoi, là, pour que quelqu'un se réveille?

Alors, quand on fait le summum... la somme de tout ça, M. le Président, on dit: La réaction du gouvernement, ça devrait être - ce que les gens s'attendent - ramener la confiance. Bien non, on attend encore. On amplifie la crise. Ce qui a amené quoi, Mme la Présidente? On a passé d'une crise reliée aux contrats de la construction, on est rendus à une crise sur le financement du Parti libéral, et là on est rendus à une crise sur la nomination des juges. Ce n'est quand même pas rien, là. Deux des... de la démocratie qui sont attaqués, puis le premier ministre me parle de lunch.

J'espère du moins qu'on va mettre de côté le DGE. D'ailleurs, l'idée du premier ministre de rentrer le DGE dans le débat, c'était une très mauvaise idée, je peux vous le dire, dans le contexte actuel qu'on connaît. C'est manquer à son premier devoir qui est celui de la protection des institutions, en plus de ne pas... même pas protéger cette apparence-là, au moins de chercher à rétablir cette confiance de la population envers ses institutions. Puis là je n'ai pas besoin de rappeler les sondages, on est rendus à, je pense, 84 % des Québécois, 85 %, là. Il y a seulement ceux qui n'écoutent pas la TV ou qui sont à l'extérieur du pays qui ne veulent pas de commission d'enquête, Mme la Présidente. Bien, normalement, le premier ministre, il aurait dû déjà, depuis plusieurs mois, le faire. Bien non, le premier ministre, en plus de ne pas le faire, c'est qu'il continue à s'enfoncer.

Le processus de nomination de M. Bastarache. Moi, M. Bastarache, puis je connais son allégeance politique, je connais sa... où il a logé. Je sais même qui l'a nommé à la Cour suprême, c'est Jean Chrétien. Ce n'est quand même pas le plus grand des souverainistes de la terre, Jean Chrétien, hein? Est-ce que j'ai attaqué une fois son intégrité, moi, à M. Bastarache? Est-ce que j'ai déjà dit que c'était un juriste de bas niveau, ou c'est un gars de spectacle, ou c'est un gars qui a profité de nomination partisane? Non. Ce que j'ai fait, c'est que j'ai dit qu'un processus comme ça, qui implique le premier ministre, il ne doit pas... il doit se tasser. Il doit se tasser, Mme la Présidente. Mais le premier ministre ne s'est pas tassé. Il l'a nommé, puis il a... il a trouvé le moyen de donner le mandat. On ne verra plus ça, Mme la Présidente, là.

À Ottawa, Stephen Harper... Puis là je ne peux pas dire que c'est moi qui fais l'apologie de Stephen Harper en général non plus; ce n'est pas un gars de ma gang, comme on dit, là. Bien, Stephen Harper... Brian Mulroney était impliqué dans un scandale, dans des allégations graves, où il y avait deux versions différentes. Bien, il a dit: Je vais me donner une distance. Il y a quelqu'un quelque part au ministère de la Justice qui a dit: Ça ne peut pas être ça, ça ne peut pas être vous qui déterminiez le mandat, parce que, même si vous prenez la bonne décision, ça va avoir l'apparence de partisanerie, parce que ça concerne des gens près de vous.

C'est ça, l'apparence de justice. Ça n'a rien à voir avec les qualités intrinsèques d'une personne. Ça n'a rien à voir avec sa faculté de connaître les lois. C'est que l'apparence n'est pas préservée. En justice, c'est ce qu'on préserve le plus, au-delà de l'attitude, au-delà de la qualité des gens. C'est l'apparence de justice. Bien, Stephen Harper, il a dit, puis ça concerne un ancien premier ministre du Québec, quelqu'un qui était près de lui, il a dit: Je vais donner le mandat à quelqu'un d'autre. Puis là on a dit: Effectivement, c'était la chose à faire. Et on a connu la suite. Ça, c'est s'assurer du respect d'un processus qui doit respecter les règles de base au niveau des règles de justice naturelle qu'on appelle. Ça, c'est... qui fait qu'en dehors de toute règle il faut au moins respecter ces règles-là si on veut conserver une apparence de justice, parce que la justice s'est défini des règles beaucoup plus sévères en plus, elle, justement pour protéger cette apparence. Mais au moins les règles de justice naturelle imposent ça.

Le premier ministre, il ne l'a pas fait. Il n'a pas fait ça. Mais il a fait pire que ça. Ça, je n'en reviens pas encore, Mme la Présidente. On n'a pas eu le temps de l'aborder. On se dit ici: Pour éviter tout ça puis la crise des institutions, prenons quelqu'un d'indépendant. On a pensé au Vérificateur général. Pourquoi? Parce que... Le premier ministre a eu l'idée formidable d'impliquer le DGE dans l'affaire Bellemare. Ça, c'est l'idée du premier ministre. On lui a impliqué Bellemare, ce qui fait que le DGE, il est contaminé. C'est incroyable, il a réussi ça. Formidable! Alors, on ne peut pas l'utiliser, le DGE.

Alors, on a dit: Il reste le Vérificateur général, au moins, lui, il est indépendant, puis il n'a pas été mêlé à ces affirmations. Donc, on a dit: Le Vérificateur général. Par contre, quelqu'un a dit au comité: Il n'est pas juriste, c'est un comptable de haut mérite, mais il n'est pas juriste. Ça prendrait peut-être une caution juridique qui ait une bonne expérience. Alors, tout le monde connaît des avocats ici, là. J'en connais un très bon, qui est juste à ma droite ici, le député de Lac-Saint-Jean. Mais on n'ira pas dans la liste des noms. C'est difficile dans un contexte actuel de ne pas accoler une étiquette à quelqu'un. Alors, on a pensé à qui? John Gomery.

John Gomery, le député de Mercier le connaît bien. Le seul... En tout cas, tout le monde le connaît bien ici, au Québec. C'est la personne, je vous dirais... s'il y a une personne qui incarne le respect de l'éthique au Québec, c'est John Gomery, et je le dis. Puis John Gomery, je le dis aujourd'hui, mais tout le monde sait en même temps que ce n'est pas un souverainiste, John Gomery. Ce n'est pas quelqu'un qui a partagé à une seule occasion mes idéologies qui concernent la souveraineté du Québec. S'il avait à siéger ici, il ne serait pas de mon bord de Chambre. Je ne vous dis pas qu'on n'aurait pas des idées qui se ressembleraient à bien des égards, mais il serait obligé d'être de l'autre côté, et, moi, je serais ici ou inversement, parce qu'on croit foncièrement à quelque chose de différent pour l'avenir du Québec, et, moi, je respecte ça.

Bien, moi, j'ai vu le gouvernement me dire que John Gomery, là, c'était un gars qui était fort en spectacle. J'ai entendu ça dans cette Assemblée, Mme la Présidente. J'ai entendu de quelqu'un: Il n'a pas l'autorité de faire quoi que ce soit ici, parce que justement la Cour d'appel fédérale aurait dit qu'à certains égards la commission a ressemblé à un spectacle, et ça, ça le discréditait, cet homme, au Québec de donner son opinion.

Est-ce que vous pensez ça, vous, Mme la Présidente? Est-ce que vous pensez qu'il y a un seul citoyen au Québec qui pense ça? Bien, moi, j'ai entendu ça. On s'attaque à un ancien juge, à quelqu'un qui a présidé la plus importante commission sur du trafic pas seulement d'influence, d'argent et de corruption à haut niveau, bien on a trouvé le moyen d'y rentrer dedans. Aïe! Puis là j'en veux... je n'en veux pas à tous les députés de l'autre bord, là, j'en veux à deux personnes.

Ça n'a pas de bon sens, Mme la Présidente. On est au coeur de nos institutions, on l'attaque, on essaie de discréditer cet homme. Là, il vient un moment, là, les techniques de tenter d'avoir raison, là, elles ont leurs limites. On ne peut pas agir comme ça. À la limite, proposez un autre nom, trouvez-moi quelqu'un qui a autant d'aura que cet homme-là puis qui a eu un jugement aussi clair dans la façon qu'il a mené une des commissions les plus difficiles, les plus longues, puis que peut-être qu'on ne reverra pas, qui s'est détaché du pouvoir - parce que c'était quelqu'un qui avait été nommé même par le Parti libéral - qui s'est détaché du pouvoir, qui a réussi à exercer ses fonctions avec indépendance malgré... malgré le fait qu'il avait été nommé à l'époque par des gens qui l'avaient nommé comme juge. Il a réussi ça. Moi, à partir de là, qu'il soit fédéraliste, souverainiste ou seul Dieu sait quoi, moi, cet homme-là, il a droit à mon respect le plus profond, Mme la Présidente. Et je ne me permettrai jamais de... Je peux ne pas avoir son opinion sur certains aspects, mais jamais je ne vais tenter de miner sa crédibilité, jamais, sur des aspects aussi importants que sa capacité ou son indépendance d'esprit. Jamais je ne ferai ça. Bien, on l'a fait ici, en cette Chambre, Mme la Présidente.

Alors, je vous dis, quand on dérape, là, on ne peut pas plus déraper que ça. Là, on est rendus au summum. Et d'ailleurs on est peut-être le seul parti qui n'avait aucun lien avec John Gomery. Même, il s'est présenté dans... pas il s'est présenté, il avait pour mandat pour conseiller dans le cadre de l'élection à Montréal. Est-ce que ça le discrédite? Qui dans cette Chambre trouve qu'il est discrédité? Qu'est-ce qu'il a dit de... dans cette campagne? Il a dit plutôt: Je pense qu'effectivement les gens doivent avoir la vérité et je vais regarder ça. Et je pense qu'à Montréal ce qui se passe, ça n'a pas de bon sens. Il n'a pas perdu une once, Mme la Présidente, de son prestige. Bien, ça a pris le premier ministre et le leader du gouvernement pour attaquer, pour attaquer cet homme ici, dans cette Chambre.

Alors, Mme la Présidente, non, ce n'est plus drôle, ce qui se passe ici. Je pense que le projet de loi du ministre, il ne répond pas à la commande qui lui est faite actuellement par les événements. Moi, demain matin, là, on adopte ce projet de loi là, là, j'espère qu'il est conscient qu'à la fin de la conférence de presse tout le monde va dire: Il n'y a rien de changé. On n'a pas réussi à briser les liens qui existaient entre ceux qui donnent, les collecteurs de fonds, et ceux qui prennent les décisions, et là, je vous dis, à tous niveaux: politique, fonctionnaires, tout ça. On n'a pas réussi à briser.

.(12 h 40).

Ça, c'était vrai avant tout ce qui s'est passé cette semaine, depuis deux semaines. Je dis ça depuis le début de la commission. Et c'est pour ça qu'on a proposé d'autres moyens, sur lesquels je vais revenir. Mais, si on adopte le projet de loi tel qu'il est, puis le ministre nous annonce... De remplacer le crédit d'impôt non remboursable par un crédit d'impôt remboursable, écoutez, là, les institutions, là, ils ne seront pas mieux pour autant, Mme la Présidente, là. Ça ne peut pas être l'amendement, là, qu'on réclame, que la population réclame.

Je pense que le ministre doit se rendre compte que, là-dessus, ça va prendre de l'ambition, là. Puis ce n'est pas de la partisanerie qu'on fait, là. Ça dépend toujours de l'objectif qu'on a. Si l'objectif, c'est rétablir la confiance, je pense que ça prend de l'ambition. Si c'est de passer le projet de loi le plus rapidement possible, bien là c'est une autre affaire... ou de mettre ça en arrière de nous. La situation qui a amené le projet de loi...

Et, moi, j'avais même demandé au ministre de l'époque de ne pas faire ça, pas dans le contexte actuel. Il ne fallait pas ouvrir la Loi électorale dans un contexte où les institutions sont attaquées, où on parle de collusion. On l'a fait, et là ça crée un climat qui fait en sorte qu'il est... Il a été très difficile, dans le cadre de la commission parlementaire, d'aller au fond des choses. Mais, depuis ce temps, ça s'est amplifié, Mme la Présidente. D'autres accusations, d'autres allégations claires, d'autres confirmations sont venues accréditer le système de collusion, le système de gouvernement occulte.

Bien là, moi, le projet de loi, là, il devient caduc. On ne peut pas, aujourd'hui, dire: Le projet de loi est bon, on va l'adopter, puis tout va être réglé, là. Vous ne me croirez pas, puis il n'y a personne qui va me croire ici. Alors, moi, je demande au ministre: S'il veut vraiment faire le travail que nous convoque la population...

Au-delà de la commission d'enquête, au-delà de ce qu'on réclame, au-delà du travail de la ministre de la Justice, lui, son travail, c'est qu'on s'attelle et on travaille sérieusement pour faire en sorte que ce projet de loi là ait au moins le début du commencement de quelque chose qui va ramener la confiance. Puis, moi, demain matin, on sort avec ça, là, on n'est pas là.

Alors, on a proposé des choses, Mme la Présidente. On s'est dit... Plusieurs députés d'ailleurs, de notre formation, on s'est réunis, on a dit: Qu'est-ce qu'on peut faire pour proposer justement des... je vous dirais, des modifications ou un ensemble de dispositions qui aura un effet bénéfique sur la confiance et qui fera en sorte que la Loi électorale ait plus de... de... ait plus de dents, ait plus d'impact sur le financement, et fasse en sorte que la population dise: Bon, bien, au moins on a bougé là-dessus? Alors, on s'est assis, sept, huit députés ensemble. On a entendu le caucus à deux reprises, sinon trois reprises, le député de Lac-Saint-Jean faisait partie d'ailleurs du comité. On a réfléchi ensemble. On est revenus devant le caucus. Pourquoi? Parce que ça intéresse qui, ça?

Ça intéresse les élus. Les élus, à la base, ils doivent adhérer à une réflexion. Si les élus, à la base, n'y adhèrent pas, ça ne fonctionne pas. Donc, on a passé trois fois devant le caucus, Mme la Présidente - puis je ne suis pas au gouvernement, moi, je suis dans l'opposition - pour des propositions. Puis on revenait, puis on revenait: Voici qu'est-ce qu'on peut améliorer. Puis je parle de propositions, là, pourquoi? Parce que les gens doivent adhérer à ça. Ils doivent dire: Là, vous faites fausse route; là c'est bon.

En même temps, qu'est-ce qui nous guidait? On s'était fixé au départ cinq conditions, que je ne vous énumérerai pas mais qui sont de base, et qui indiquent comment on peut ramener la confiance dans la population. Donc, chacune des mesures avait une justification par rapport à ce degré de confiance qu'on veut améliorer. Et là on était avec des propositions, on a dit: Il y a des éléments du gouvernement qui sont bons. D'autres d'ailleurs avaient été proposés, et il y en a même deux qui ont été proposés par moi en comité avec le DGE.

Il y en a deux précisément où... et là ces comités sont confidentiels, mais entre autres sur les dons où c'est moi qui ai dit: Non, non, non, il n'y a pas d'exception. Nous, on propose ça. Et je l'ai pris à brûle-pourpoint, comme ça, puis tout le monde a acquiescé. Une réunion confidentielle, ça. À deux des mesures on a dit: C'est correct, ça, c'est bon. Certains ont applaudi, ont dit: On peut aller plus loin. La base est bonne, on peut aller plus loin, renforcer les liens entre les responsabilités.

Moi, je pense que même les amendes devraient être plus... devront être plus fortes. Mais, au-delà de ça... puis la conséquence sur les contrats, mais, au-delà de ça, ce qui est clair, c'est qu'au Québec, moi, je pense, à 3 000 $, il n'y a personne au Québec qui dit que c'est du financement populaire. La base du système, c'est faire en sorte que la population puisse avoir son mot à dire, mais pas par l'argent, par son nombre. Ça, c'est la base d'un système démocratique. Alors... Et c'est pour ça qu'on a fait la loi sur les financements politiques avec M. Lévesque. Mais à 3 000 $, aujourd'hui, c'est clair que ce n'est pas... c'est clair qu'on est dans un ordre de grandeur qui fait en sorte que la population du Québec n'a pas confiance.

Alors, moi, ça n'a rien à voir avec la qualité intrinsèque de la personne qui la donne. Quelqu'un va me dire: Ah! bien oui! lui, il t'a donné 3 000 $. C'était-u pour t'influencer? Non, non. Ce n'est pas intrinsèque. On est sur l'apparence.

Où il y a un problème, c'est quand quelqu'un dit: Moi, je suis capable de ramasser 400 000 $, puis ça me permet de dire où est le... qui va être le plus haut fonctionnaire du Québec. Ça, il y a un problème. Mais la personne qui donne 3 000 $... Ce n'est pas vrai que chacune des personnes au Québec qui donne 3 000 $ veut avoir le contrôle de la politique au Québec. Ce n'est pas vrai. Mais, moi, je suis capable de percevoir que le citoyen qui regarde ça, il dit: Plusieurs 3 000 $ ensemble, ça fait vite 15 000 $, 20 000 $, 30 000 $. Bien, il y a un problème.

Et, savez-vous, Mme la Présidente, dans le blanchiment d'argent, on a même aboli les 1 000 $. Pourquoi? C'est justement... Pas parce que c'est mauvais, un 1 000 $. Parce que justement ça rend la chose plus facile au crime organisé. On a ramené ça plus bas. Est-ce que ça fait en sorte que les 1 000 $, c'est mauvais? Est-ce que chaque personne qui avait un 1 000 $ au Québec était quelqu'un qui était malhonnête? Pas du tout. L'objectif, c'était... on a un problème, puis il y en a qui s'en servent pour détourner la loi.

Alors, on a le même problème actuellement. Donc, si on ne comprend pas ça, on n'a... je pense qu'on n'a pas fait de pas encore. Premièrement.

Nous, on a proposé 500 $. Ça peut être d'autre chose. Mais je pense que ça prend quelque chose qui est une indication claire à l'effet qu'on va changer les choses.

L'autre chose, et on avait le ministère... le ministre du Revenu... Moi, je m'attendais... On s'est dit: Pour donner plus de pouvoir au DGE, au Directeur général des élections, moi, je pense qu'il doit lui-même soit appliquer la loi ou soit... donc le crédit, ceux qui donnent, avoir accès à l'information sur ces personnes, donc appliquer... et en plus avoir accès aux informations détenues par le ministère du Revenu.

Moi, je pensais que cette façon de faire là est bonne parce que tout d'abord le DG est une institution qui est très indépendante, plus indépendante même, je vous dirais, que le ministère du Revenu. Elle est aux deux tiers. Donc, elle peut maintenant détenir ces informations. D'ailleurs, même le leader... le leader adjoint du gouvernement sait qu'avec la modification de la loi d'accès à l'information et la protection des renseignements personnels ce transfert d'information est possible dans le respect des lois, justement.

Alors, j'aurais aimé entendre le ministre dire, effectivement: Le DGE doit avoir toutes ces informations, y incluant c'est qui, la personne qui donne, son conjoint, son employeur. Moi, que je ne le sache pas, ça ne me dérange pas. Mais que le DGE le sache. Pourquoi? Parce qu'il va être capable de repérer des procédés qui contournent la loi. Là, actuellement, c'est qu'il n'agit que sur plainte. Alors là, on lui donnerait la possibilité, justement, dans le cadre des vérifications, d'aller beaucoup plus loin, Mme la Présidente.

Puis, les plaintes, c'est dur, faire des plaintes au Québec, Mme la Présidente. Pourquoi? Quand on parle, on est poursuivi. Dans le contexte actuel, ça fait en sorte que... Puis là je ne vous parle pas... Il y avait un article, je pense, c'était Josée Boileau dans Le Soleil, là, qui faisait référence au fait que c'est dur même pour les journalistes d'exercer leur travail actuellement. Bien, quand les journalistes laissent sous-entendre... là, il vient un moment...

Comme on disait dans le temps, là, on est au coeur de la patente. Là, il faut arrêter, là. Les commentateurs, ceux qui ont à coeur le fonctionnement du gouvernement puis qui ont... Ils n'ont pas d'animosité envers les gens, là. Je ne cultive pas, moi non plus, l'animosité personnelle. On peut être révolté, des fois, mais il ne faut jamais cultiver l'animosité personnelle. Ces gens-là commentent l'actualité, parce qu'ils sont aussi découragés, comme les autres que je vous ai nommés tantôt. Bien là, il y a des signaux, Mme la Présidente, des signaux que la dérive... et que le temps n'arrangera pas les choses.

.(12 h 50).

En fin de semaine, le Parti libéral va se réunir en invoquant la mémoire d'un grand homme au Québec: Robert Bourassa. Bien, Robert Bourassa, dans des mêmes circonstances, il a ordonné des enquêtes. Je vous dirais même pour moins que ça, pour moins que ce qu'on voit actuellement. J'invite ceux qui vont entendre ces valeurs-là, les valeurs de Claude Ryan d'ailleurs, vont comprendre qu'il y a urgence d'agir. Moi, je pense qu'il n'y a plus de garde-fou, Mme la Présidente. Un garde-fou, c'est quelqu'un qui se lève, là, puis qui dit: On dérape, là.

À l'époque, je vous dirais, il y a quelqu'un que j'estimais beaucoup, puis on avait une opinion assez différente sur bien des affaires, mais on a fait ensemble la loi d'accès à l'information, 44 heures en commission parlementaire, pas pour... je vous dirais, pas parce qu'on filibustait, c'est que c'était une loi qu'on considérait très importante, c'est pour ça que je la connais bien, cette loi. On l'a fait pendant 44 heures sur une loi et, à la fin, il m'a dit: J'ai appris aujourd'hui c'était quoi, légiférer, pas pour me rendre... pas pour... Et je n'étais pas seul, il y avait le député de Mercier à l'époque, qui était Daniel Turp, on était plusieurs, et tout le monde s'était intéressé. Les gens travaillaient, d'un bord et de l'autre, de l'autre côté aussi, à améliorer la loi. 44 heures. C'est long. C'était le député de Gatineau - là, ça me fait exprès, j'oublie son nom - Pelletier, Benoît Pelletier...

Une voix: ...Chapleau.

M. Bédard: Le député de Chapleau, voilà. Oui, le député de Chapleau. Bien, le député de Chapleau, moi, je le considérais comme un garde-fou... moment, il y a des gens comme ça qui connaissent ce qu'on fait, dans le sens qu'il y a des moments où le langage va s'élever, où il y a un... il y a un rapport qui s'établit, il y a même une impression qui se dégage, mais, à travers tout ça, quand vient le temps de se réunir entre nous, quelqu'un qui se lève puis qui dit: Ceci dit, là, peu importe la journée, qui l'a gagnée ou qui l'a perdue, ce n'est pas ça qui est important, là, on a un problème, on ne peut pas faire ça. Il y a des gens comme ça, puis je peux vous le dire, Mme la Présidente, puis je le dis, c'est rare - je peux vous dire que mon père, à une certaine époque, l'a été - où des gens très enthousiasmés peuvent avoir des volontés quelconques, et là il y a quelqu'un qui se lève puis qui dit: Ça, peu importe ta volonté, qui est bon, qui n'est pas bon, on ne peut pas le faire, ça ne se fait pas, on a un problème.

Mais malheureusement, moi, ce que je constate, c'est qu'on n'en a plus, de ces garde-fous-là actuellement. Et je ne le sais pas, parce qu'il y a autant de gens qui ont quitté le Conseil des ministres, autant qui ont quitté la politique, genre même la ministre des Finances, l'ancienne ministre des Finances, des gens qui avaient un langage franc, direct, qui... sur lequel on n'était pas tout le temps d'accord, mais qui disaient rarement le contraire de ce qu'ils pensaient quand ils étaient... quand on était dans des cercles fermés. Alors, moi, j'ai hâte de voir réapparaître ces garde-fous-là, parce que la dérive, elle est totale. Elle est totale, Mme la Présidente.

Et je ne demanderai pas à un député qui vient d'arriver de le faire, il ne peut pas faire ça, parce qu'il sait bien que les conséquences, c'est que c'est à peu près la fin, pour les trois prochaines années, de tout ce qu'il peut... de tout ce qu'il peut espérer comme... pour avoir plus de responsabilités. Ça prend quelqu'un qui a l'expérience, qui a la crédibilité, mais qui dit en même temps: Je prends ce risque-là parce qu'on est en train de dériver. Moi, je pense qu'on est rendus là, Mme la Présidente.

Au PQ, je dois nous donner ça, c'est que, bien avant que ça ne dérive à l'interne... à l'externe, ceux qui trouvaient que là on dépassait les limites, ça sortait vite. Puis des gens nous reprochaient d'ailleurs qu'on se chicanait tout le temps. C'est que, dans les faits, les gens acceptaient... ils n'acceptaient pas des situations qui allaient à l'encontre de leur éthique, et ça faisait en sorte effectivement que, dans les journaux, rapidement, on avait des discordances assez claires. On ne nommait pas les députés ni les ministres, mais on savait bien qu'au Conseil des ministres il y avait eu des discussions sur lesquelles des ministres importants n'étaient pas d'accord, il y avait eu des... mais nous n'avons plus ça.

Je souhaite que ça arrive, Mme la Présidente, parce que, moi, j'entends peu d'échos discordants. Ce que j'entends plutôt par contre, là, c'est des gens... c'est effectivement des allégations... des gens qui demandent même la protection... On a vu Alain Gravel... on couvre même la voix, de peur de se faire reconnaître, parce que, pour un entrepreneur qui est n'importe qui, il y a une conséquence à faire ça. Un juge, je vous dirais, un avocat qui a vu son nom ne pas être retenu dans le processus, il sait qu'il est un bon avocat, il sait que son nom n'a pas été retenu. Pensez-vous qu'il va se lever aujourd'hui pour des mauvaises raisons? Puis il sait que celui qui a été retenu, c'est pour des mauvaises raisons qu'il a été nommé. Aïe! il ne se lèvera pas pour dénoncer ça, Mme la Présidente, il sait que ça met fin à tous ses... ses espoirs d'avoir accès... à quoi? Pas à de l'argent, pas au pouvoir. Lui, il croit sincèrement qu'il peut être un bon juge, il peut servir la justice.

Alors, combien de sacrifices qu'on va demander, là, à des gens? Puis Marc Bellemare, ce qu'il fait, là, au-delà de savoir s'il a raison ou tort, ça a des conséquences, puis je pense qu'il est le premier à le savoir. Mais ça va en prendre combien, de ces gens-là? Combien de gens vont être obligés de parler dans... sous le couvert de l'anonymat?

J'espère, Mme la Présidente... Et c'est peut-être une chance, c'est qu'on est ici jusqu'au mois de juin, puis la population, je vous dis, au Québec, il y a une qualité forte qu'on a, c'est qu'effectivement on pardonne, même. C'est arrivé, des gens qui se sont amendés. On est capables de dire: Il s'est trompé, on passe la moppe, on recommence. Les gens, ils sont capables. Mais, moi, je pense que, si on attend, là, les gens, ils ne pardonneront plus. Ils ne pardonneront plus. Et là qu'est-ce que ça amène? C'est que ça amène que de plus en plus d'informations vont sortir, parfois des vraies, parfois des non vérifiées, parfois des fausses.

Mais qui est gagnant là-dedans, Mme la Présidente? Parce qu'ultimement, Marc Bellemare, qu'est-ce qu'il voulait, lui? Il voulait la même chose que M. Dagenais, de la Sûreté du Québec. Ce qu'il veut, lui, c'est une commission d'enquête sur le secteur de la construction, sur la construction au Québec. Deux personnes. Et là on dit: M. Bellemare, c'est un gars qui veut régler ses comptes avec le premier ministre. Moi, je ne participe pas à ça. Moi, je vous dis que M. Dagenais, il veut régler ses comptes avec qui, lui? Avec qui il ne s'entend pas dans le gouvernement? 84 % de la population, avec qui ces gens-là veulent régler leurs comptes, là? C'est quoi, leur problème, eux autres?

Tous ces gens-là veulent la même chose. Le premier ministre, il ne pourra pas discréditer tout le monde, là. Il ne pourra pas discréditer John Gomery, Marc Bellemare, Dagenais puis tous ceux qui vont se lever pour réclamer la commission d'enquête. On ne pourra pas aller jusque-là. Si le Vérificateur général du Québec, demain, se lève puis il dit: Je pense qu'on est rendu là au Québec, qu'est-ce qu'il va faire, le premier ministre? Il va-tu dire que, lui aussi, c'est un gars qui ne l'aime pas, c'est un gars qui lui en veut ou c'est un gars qui ment?

On est même rendu, Mme la Présidente, que l'ancien Procureur général s'en va déposer une plainte. Au-delà de savoir si c'est bon, ce n'est pas bon, c'est vrai, ce n'est pas vrai, ça n'a pas de bon sens, là, il faut arrêter là. Il faut arrêter là.

Donc, j'espère que la fin de semaine va porter, va porter conseil à nos amis. Je le dis, «à nos amis», parce que j'en ai plusieurs de l'autre côté. Je le dis. Aujourd'hui, ce n'est peut-être pas bon de le dire. Je ne suis pas sûr si ceux qui le sont lèveraient la main, d'ailleurs. Mais, oui, effectivement j'en ai. J'en ai avec qui je m'entends très bien, puis on partage bien des choses en commun. Puis il y a des fois où on ne s'entend pas, mais ça ne fait pas de nous des moins bons amis.

Mais ça va prendre ce réveil-là, et j'espère qu'il va être au rendez-vous avant que le lien de confiance ne soit irrémédiablement rompu, parce que, quand on est rendu à parler de légitimité, quand on est rendu à parler d'absence totale de confiance, c'est qu'on a débordé du cadre normal de ce qu'est la politique en général. On est rendu dans les institutions, Mme la Présidente.

Alors, je ne sais pas à quel point va faire mal cette commission, je n'en ai aucun doute, mais on est rendu là, Mme la Présidente. Et je demande au ministre, lui... Je ne lui demande pas de demander une commission d'enquête, je le lui demande dans le cadre du processus qu'on a sur la Loi électorale, que je suis prêt à faire avec tout le sérieux que les gens savent, dans un cadre légal et législatif. J'aime faire de la législation. D'ailleurs, je suis porte-parole de plus grand-chose, Mme la Présidente, depuis que je suis leader. C'est peut-être un de mes seuls regrets, c'est que j'aimais faire beaucoup de législation. Là, on en a une importante. J'espère qu'il sera animé de cette inquiétude et en même temps de cet objectif de faire en sorte que... du moins en ce qui concerne la Loi électorale et le financement, qu'on puisse dire que la population, elle, elle pense qu'on a fait un pas.

Est-ce que ça va être suffisant pour ramener la confiance totalement? Je suis conscient que non, mais on doit faire plus que ce qui est là actuellement.

Alors, je l'invite à une bonne réflexion là-dessus. Je ne sais pas à quel moment il sera appelé en commission, ça me fera plaisir d'y participer. Et je l'invite, d'ici à la semaine prochaine, à faire en sorte que son parti ramène - Mme la Présidente, je termine simplement là-dessus, vous me permettrez, parce que ça vous concerne aussi - ...

La Vice-Présidente (Mme Houda-Pepin): Oui, O.K.

M. Bédard: ...fasse en sorte que la Commission de la représentation électorale soit appelée devant la Commission de l'Assemblée nationale dès la semaine prochaine.

La Vice-Présidente (Mme Houda-Pepin): Très bien. M. le leader de l'opposition officielle, il est 13 heures, avez-vous terminé votre intervention? Avez-vous terminé votre intervention?

Une voix: ...

La Vice-Présidente (Mme Houda-Pepin): Parfait. Donc, compte tenu de l'heure, je suspends nos travaux jusqu'à cet après-midi, 15 heures.

(Suspension de la séance à 13 heures)

*

(Reprise à 15 h 5)

Le Vice-Président (M. Gendron): Alors, bonjour, chers collègues. Veuillez vous asseoir.

Alors, ce qu'on a à faire aujourd'hui, c'est: L'Assemblée poursuit le débat sur l'adoption du principe du projet de loi n° 93, Loi modifiant la Loi électorale concernant les règles de financement des partis politiques et modifiant d'autres dispositions législatives.

Et je suis prêt à entendre les intervenants et je reconnais Mme la députée de Taschereau pour son intervention. Alors, Mme la députée de Taschereau, à vous la parole.


Mme Agnès Maltais


Mme Maltais: Merci, M. le Président. Alors, nous allons examiner un projet de loi qui au départ, au départ, portait deux grandes idées. Une de ces grandes idées était la réforme de la carte électorale. L'autre grande idée, le financement des partis politiques.

D'ores et déjà, nous voyons que la réforme, la partie réforme de la carte électorale est scindée maintenant, va être traitée de façon séparée. C'est bien. C'était une demande qui venait de l'ensemble des gens qui sont venus. Et il nous semble tout à fait fondé de dire que ce sont deux sujets complètement différents, qui régissent deux parties dissociées de notre vie électorale, de notre vie démocratique. Et en ce sens la réforme de la carte électorale, la révision du système de l'attribution des circonscriptions et même du nombre de parlementaires, parce que c'est ce qu'il y avait comme proposition, devait être traitée séparément.

Ceci dit, M. le Président, ceci dit, mon collègue le leader de l'opposition officielle a soulevé avec raison un sérieux problème que nous vivons actuellement à l'Assemblée nationale, un très, très, très sérieux problème, le fait qu'actuellement toute la... la trame qui nous mène vers une révision de l'attribution des circonscriptions, de la diminution... de la délimitation des circonscriptions électorales est bloquée et que cela ne doit plus durer.

Le Directeur général des élections a fait des travaux sérieux, des travaux importants. Il y a eu une consultation à travers tout le Québec. Le Directeur général des élections, celui que l'on dit autonome et indépendant à chaque jour, à chaque période de questions, du côté gouvernemental, celui dont on vante l'indépendance, la transparence et la légitimité, attend que nous respections la loi. Le Directeur général des élections attend que cette Assemblée, que la Commission de l'Assemblée nationale reçoive le résultat de ses travaux et que nous puissions enfin nous entendre sur l'adoption de son rapport.

Le Directeur général des élections est une institution qui a l'aval des parlementaires. Il faudrait qu'elle soit respectée par les parlementaires. Et présentement nous frôlons, je dis bien, je pèse mes mots, M. le Président, nous frôlons l'irrespect face aux travaux du Directeur général des élections. Et frôler l'irrespect, c'est frôler l'irrespect de la loi, parce que ses travaux ont un aboutissement normal, qui est l'adoption de son rapport, de ses propositions. Et cette adoption est retardée indûment depuis des mois, M. le Président. Et c'est un important vice de forme. Nous devons entendre le Directeur général des élections. Nous devons recevoir son rapport à la Commission de l'Assemblée nationale. Alors, de ce côté-là, si nous sommes satisfaits de voir que cette portion de la loi va être traitée séparément, il faut que l'Assemblée nationale se saisisse du rapport du Directeur général des élections et fasse son travail, M. le Président. Voilà pour une première partie.

.(15 h 10).

La deuxième partie, je l'aborderai ainsi. J'étais avec des collègues tout à l'heure et je faisais cette réflexion: J'ai vu ce matin se clore la période de questions de ce que je nommerai comme la semaine la plus triste de ma carrière politique dans cette Assemblée nationale. C'est la semaine la plus triste parce que c'est la plus sombre. Et, si je prends la peine de le dire, c'est que ce n'est... c'est le résultat de discussions avec des collègues. Ce que nous voyons depuis une semaine, la légèreté, la légèreté avec laquelle le gouvernement et les parlementaires prennent les... les allégations qui sont en circulation au Québec actuellement, entache le système démocratique, entache non seulement la vie parlementaire... elles entachent la réputation des institutions qui gouvernent la société québécoise. Les allégations touchent les fondements même de nos institutions. Et la réponse à ces allégations provoque la même chose. Parce que c'est une chose que des personnes disent des choses qui nous montrent qu'il pourrait y avoir dysfonctionnement dans le système, c'est autre chose que de ne pas entendre, et de ne pas agir avec transparence, et de ne pas immédiatement défendre les institutions, défendre les personnes qui incarnent ces institutions de façon correcte, et respecter les rôles que nous avons à jouer. Et nous avons actuellement de nombreux piliers de notre société démocratique qui sont attaqués, et le gouvernement ne règle pas le problème, au contraire - au contraire.

Alors, il est important d'en parler parce que le projet de loi que nous avons devant nous parle justement, M. le Président, du financement des partis politiques. C'est un projet de loi qui essaie de resserrer les règles du financement des partis politiques et des règles aussi... qui essaie aussi de resserrer des règles qui gouvernent les élus. Mais, M. le Président, le financement des partis politiques, c'est ce qui est au coeur, au coeur des débats de cette semaine très sombre pour la vie démocratique. Pourquoi cette semaine est si sombre? Pourquoi elle est si pénible à vivre comme parlementaire? Parce que plusieurs institutions sont attaquées.

D'abord, le système de justice qui est attaqué, est attaqué de toutes parts. Nous avons la une du Devoir, ce matin, qui nous apprend... qui nous apprend que le système de nomination des juges, ceux et celles qui président à nos cours de justice, aurait été infiltré et que des contributeurs du Parti libéral auraient maintenant eu vent et seraient intervenus dans la liste des nominations des juges au Québec. C'est ce qui est allégué. Et, aux questions qui ont été posées, les questions... les réponses qui ont été données nous conservent un certain... un certain trouble. Le système de justice, c'est un des piliers de nos institutions. Si des gens qui ont des intérêts peuvent s'infiltrer dans le système de justice, c'est un des piliers des institutions d'une société démocratique qui est attaqué.

Depuis 25 ans, il est impossible pour qui que ce soit, hormis le ou la ministre de la Justice, de connaître le résultat des recommandations d'un comité externe indépendant qui choisit les personnes aptes à devenir... à devenir juges. Or, des personnes, des contributeurs, des contributeurs au financement du Parti libéral, se sont vantées d'avoir eu en main cette liste, se sont vantées d'avoir eu en main un document qui est hautement confidentiel. D'autres... d'autres se sont vantés d'avoir pu intervenir et réussir à faire nommer des juges. C'est sur la place publique. La... Cela en soi est une chose. Le problème qu'on a, c'est qu'en plus ces personnes sont directement liées au financement du Parti libéral. Ceci est une chose.

Deuxièmement, l'autre problème, c'est qu'un ancien ministre de la Justice, un ex-Procureur général a déclaré que le premier ministre était au courant et que le premier ministre lui avait dit de se taire, que ça fonctionnait comme ça. Et les allégations de Me Bellemare, ex-ministre de la Justice, sont à l'effet que c'est cinq fois qu'il y aurait eu des rendez-vous où il aurait essayé de dire ça au premier ministre et qu'il aurait réussi à le lui dire. À la suite de cela, Me Bellemare se serait fait dire de rentrer dans le rang. En soi, c'est un problème. C'est énorme et c'est le débat... c'est le débat de la semaine.

Mais, si ce n'était que cela, ce serait déjà énorme pour une Assemblée nationale, mais le problème est beaucoup plus sérieux, M. le Président, c'est que cela s'ajoute à une série d'allégations qui toutes, depuis des mois, des mois et des mois, en fait depuis presque un an maintenant, ont... ont trait au financement du Parti libéral du Québec, au lien potentiel, je dis «potentiel», entre l'industrie de la construction, de grands entrepreneurs, l'attribution de contrats sans soumissions, sans appels d'offres, l'attribution de places en garderie, des liens directs qui existent dans l'attribution de places en garderie entre des contributeurs et des organisateurs libéraux et... C'est immense, c'est énorme!

Ça aussi, c'est un des piliers d'une société de savoir que tout le monde a accès au marché public de la même façon, de façon égalitaire, qu'il ne peut pas y avoir de lien entre le financement des partis politiques et l'attribution de contrats. Or, M. le Président, nous n'avons pas de réponse à toutes ces questions. Nous avons... Le gouvernement traite actuellement tous les liens potentiels entre le financement du Parti libéral et tous ces événements de façon saucissonnée. Ah! il y a des problèmes dans le monde de la construction? On créé l'opération Marteau qui ne réglera pas tout le problème, qui va aller chercher certains cas, certaines choses. C'est la SQ qui enquête, on n'a pas accès, le public, ils ne savent pas. Ça ne touchera pas à l'idée du système. Ça n'empêchera pas la collusion. On ne saurait pas comment on procède. Tout ce qu'il y a, c'est que la SQ est en train d'enquêter.

Sur le financement des partis politiques, allez voir le DGE. Ça va se passer dans une pièce fermée, on ne saura pas, on ne saura pas l'état des travaux, on ne saura pas qui, on n'est pas protégés. Sur l'attribution des places en garderie, pas moyen d'avoir... pas de dépôt ici... pas de dépôt ici de la liste des garderies puis comment elles ont été choisies. Quelles sont leurs cotations? Quels sont les liens entre le financement, encore une fois, et l'attribution des places en garderie? Ça, il n'y a rien, il n'y a pas de réponse. Un déni total du gouvernement.

Or, dans tous ces éléments, qui sont des éléments fondamentaux, l'attitude du premier ministre quant aux déclarations de M. Bellemare, selon les allégations de M. Bellemare, l'introduction de contributeurs financiers dans la nomination de juges, l'attribution de places en garderie, l'industrie... les liens entre les élus municipaux et les firmes d'ingénierie... Je rappelle qu'il y a ici le député de Rivière-du-Loup qui a violé la loi sur le lobbyisme, qui a été président du Parti libéral, qui donc connaît toutes ces règles du jeu normalement. Il a quand même violé la loi sur le lobbyisme. On a tout ça, là. Dans cette atmosphère-là arrive cette crise sur le système de justice.
M. le Président, il y a une trame de fond là-dedans, c'est le lien entre les décisions du gouvernement et le financement du Parti libéral. Le Parti libéral est un gouvernement. C'est le gouvernement. Il ne peut pas laisser actuellement cette situation... Il ne peut pas permettre qu'on ne traite pas cela de façon transparente, parce qu'étant le gouvernement c'est toute l'institution qui est entachée.

Je dis que c'est une semaine sombre parce que nous ne voyons pas comment nous réussirons à sortir les institutions de cette situation pénible. Jour après jour, nous devons faire notre travail d'opposition. Nous sommes obligés, M. le Président, de critiquer les gestes du gouvernement et de lui démontrer là où il y a des failles, mais la difficulté que nous avons, c'est que c'est rendu à un niveau tellement élevé que nous attaquons l'institution même et nous n'avons pas le choix. Et nous n'avons pas le choix.

Il est hors de question de laisser le gouvernement dériver et il y a dérive actuellement. Cette dérive, elle est dans le fait que systématiquement, à chaque fois qu'on trouve une faille dans le système, il y a un lien avec le financement du Parti libéral. Dans tous les dossiers que j'ai nommés, il y a un lien avec le financement du Parti libéral. Alors, vous comprenez l'importance de ce projet de loi qui est un projet de loi qui veut délimiter de nouvelles règles.

.(15 h 20).

Nous avons des propositions, M. le Président, nous avons des propositions parce que... parce qu'il va falloir prendre le taureau par les cornes. Une de ces propositions, par rapport à ce projet de loi, est majeure. Elle va déranger. Elle va déranger les parlementaires, elle va déranger les contributeurs, elle va déranger les façons de faire, elle va forcer à travailler mieux, à travailler plus fort, certains. C'est de descendre la contribution maximum de 3 000 $ à 500 $. Voilà ce que nous proposons. C'est un amendement à cette loi qui ne veut pas toucher à ce montant maximum de 3 000 $.

Pourquoi on fait ça? Pourquoi on se place dans une position où ça va être encore plus difficile de ramasser des fonds pour financer nos partis? Parce qu'il y a un problème actuellement. Parce que la population est en train d'être convaincue. J'ai lu les derniers sondages, là, elle est convaincue qu'il y a un lien entre les gros contributeurs et les décisions prises par le gouvernement. Et ça ramasse tous les partis, ils pensent que tous les partis sont pareils. C'est terrible, parce que ça aussi, les partis politiques, ça fait partie des institutions d'une démocratie. Les gens doivent pouvoir se retrouver en parti ensemble autour d'une vision, autour d'une décision, autour de projets collectifs, de projets communs et puis, pour cela, demander aux gens de les appuyer financièrement pour qu'ils puissent s'organiser pour faire valoir ces projets en commun sur la place publique. C'est normal.

Un parti politique, c'est une des... c'est une base de la démocratie. Une bonne démocratie, d'ailleurs, c'est plusieurs partis, alors... Mais, si les gens ne croient plus que les partis politiques pensent de façon indépendante par rapport au financement des partis, c'est encore un des piliers de notre vie démocratique qui est attaqué.

Qu'est-ce qu'ils pensent, les gens? Ils pensent qu'à coups de 3 000 $, par exemple, une entreprise peut financer jusqu'à 15 000 $, 20 000 $. Comment? En ayant quatre, cinq, six personnes à l'intérieur de l'entreprise qui agissent un peu comme prête-noms, c'est ce qui a été soulevé, puis qui iraient... qui iraient... Donc, on peut donner 15 000 $, tu as cinq prête-noms, puis ils se font rembourser après ça par la compagnie.

C'est contraire à l'esprit de la Loi électorale. C'est un détournement du sens de la grande loi de René Lévesque qui a mis fin justement au pouvoir des contributeurs sur les décisions gouvernementales et à cette atmosphère délétère qui pesait, à une certaine époque, sur les décisions gouvernementales. C'est une grande loi, qui est saluée, qui a été un modèle et que maintenant... à laquelle les gens ne croient plus. Alors, il faut la rénover comme il faut rénover une maison. Il faut la remettre... il faut remettre les choses à l'ordre. Alors, notre proposition, c'est que le montant maximum pour un don ne sera plus de 3 000 $, il sera de 500 $. Ça va être...

L'autre bout qui s'ajoute à ça, qui vient en complément, qui vient en aval, finalement, c'est qu'il y ait des liens entre le Directeur général des élections et des données qu'il reçoit et le ministère du Revenu du Québec, afin qu'il ne soit plus possible d'obtenir un remboursement de son entreprise pour une contribution électorale, parce qu'on nous dit que ça se fait. Alors, il est temps de mettre de l'ordre dans la maison. Si la maison est en désordre, attaquons-nous-y.

Alors, à coups... D'abord, à coups de 500 $, une entreprise va y penser. Avant de pouvoir donner de grosses sommes, ça va devenir difficile, très difficile.

Deuxièmement, bien, si en plus le ministère du Revenu est associé au... s'associe... associe ses données à celles du Directeur général des élections, bien, il va devenir difficile, à ce moment-là, de réussir à contourner la Loi électorale.

Nous avons plusieurs propositions en ce sens, M. le Président, parce qu'il va falloir faire le ménage de la maison. Ce sont... C'est, je le répète, une semaine extrêmement sombre dans l'histoire de l'Assemblée nationale. Moi, dans ma carrière politique, ça fait 11 ans que je suis ici, c'est la semaine la plus difficile, non pas parce que je trouve... ça en fait partie, mais non pas seulement parce que je trouve que c'est difficile de faire ce travail, c'est toujours très difficile, mais c'est parce qu'actuellement la réaction du gouvernement nous force à toucher aux institutions, en fait nous porter à la défense des institutions, et c'est un peu triste. Voilà.

Alors, M. le Président, nous allons, avec plaisir, adopter le principe, probablement être... nous allons être d'accord avec le principe de ce projet de loi, mais il y a un avertissement au gouvernement, c'est: Nous voulons travailler avec vous à mettre de l'ordre dans la maison et à redonner confiance aux citoyens et aux citoyennes du Québec aux piliers de notre vie démocratique. Et un des grands piliers de cette vie démocratique, M. le Président, c'est la vitalité de nos partis politiques, et ça passe par leur financement et l'indépendance du gouvernement. Merci, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Gendron): Je vous remercie, Mme la députée de Taschereau, de votre intervention.

Et, pour la poursuite du débat - c'est toujours sur le principe de ce projet de loi là, n° 93 - je cède maintenant la parole à Mme la députée de Gatineau. Mme la députée, à vous la parole.

Mme Stéphanie Vallée


Mme Vallée: Merci, M. le Président. Alors, je suis particulièrement touchée, aujourd'hui, dans le contexte des événements qu'on vit cette semaine, de prendre parole sur l'adoption de principe du projet de loi n° 93.

J'ai écouté, et je pourrais... je pourrais m'attaquer, ou je pourrais répondre aux différents éléments qui ont été soulevés par l'opposition, depuis cet avant-midi, sur la question du financement, où on tente à tort d'associer une série d'événements et d'allégations à des malversations.

Je dois vous dire, M. le Président, et, avant d'entrer dans le coeur du projet, il y a une chose que je... je tiens à dire ici, et j'ai la tribune pour le dire: J'ai profondément confiance en la bonne foi des gens et de mon chef et des gens qui constituent le gouvernement du Québec. Et les manoeuvres qui sont mises en place actuellement par l'opposition me démontrent, encore une fois, que, faute d'arguments sur le fond et sur les choix faits par notre gouvernement depuis son élection, on va tenter d'attaquer la crédibilité des individus qui composent ce gouvernement-là sur la foi d'allégations lancées par des tiers, des tiers qui ont probablement d'autres agendas en tête. Alors, je tenais à... à rectifier les choses.

Parce que c'est certain qu'on pourrait soulever plein de trucs. Le financement des partis politiques, M. le Président, ce n'est pas illégal, c'est sain; c'est sain, dans une démocratie. C'est tellement sain, M. le Président, que le Parti québécois en a... lancé sa campagne, et j'apprends, en regardant le site Web, campagne Investissez dans votre avenir, que vous êtes même l'un des porte-parole, M. le Président, de cette campagne. Et j'ai énormément d'estime pour vous, M. le Président, et je sais que, dans ce contexte-là, si vous vous associez à une cause comme le financement de votre parti politique, c'est parce que vous considérez qu'il s'agit là d'une démarche tout à fait saine et respectable dans notre démocratie.

Alors, dans le cadre du projet de loi n° 93, M. le Président, mon collègue, le ministre du Revenu et ministre responsable des Institutions démographiques, a déposé... avait déposé, le 23 mars dernier, une motion de scission pour le projet de loi n° 78. Alors, on a partagé... on a partagé le projet de loi n° 78 en deux. Il y a le projet de loi n° 92, qui modifie la Loi électorale concernant la représentation électorale, et il y a le projet de loi n° 93, qui modifie la Loi électorale concernant les règles de financement des partis politiques et modifiant d'autres dispositions législatives.

Cette scission-là résulte d'un travail fait en commission parlementaire et du travail tout à fait légitime de législateurs qui, suite aux consultations, a démontré la nécessité de traiter de ces deux enjeux-là de façon distincte afin de bien travailler les enjeux, afin de bien les maîtriser, et également afin de respecter la volonté de certains des intervenants. Parce qu'il y a eu plusieurs groupes, des groupes fort importants, qui se sont adressés à la Commission des institutions et qui ont fait valoir l'importance de traiter de ces deux enjeux-là de façon distincte. Et la question du financement des partis politiques fait partie de ces... ces modifications-là.

J'ai fait des remarques introductives, mais je dois vous dire, évidemment, avec ce qui se passe aujourd'hui et ce qui se passe depuis quelques jours dans les médias, il y a une attention qui a été portée plus que jamais au sein des médias.

Lorsqu'on parle de la Loi sur le financement des partis politiques, M. le Président, souvent on va référer au fait qu'il s'agisse de la loi de René Lévesque. Le Parti libéral du Québec aussi, il y a 30 ans, a adopté des règles concernant le financement, des grands principes et des règles qui sont encore valides aujourd'hui.

.(15 h 30).

En 1977, M. le Président, le chef intérimaire du Parti libéral du Québec, M. Gérard D. Levesque, avait fait de cette question une de ses priorités, et ce, dès sa nomination à titre de remplaçant du chef du Parti libéral. Au conseil général de février 1977, le parti avait adopté des règles afin de démocratiser complètement ses finances et notamment pour avoir un recours annuel à une campagne de financement publique, une campagne de financement publique, de financement par la population, un financement par des gens qui croient aux valeurs véhiculées par les différents partis politiques du Québec.

L'adoption par le Parti libéral de ces nouvelles règles de financement faisait suite à deux grands principes directeurs qui étaient affirmés dans les statuts du Parti libéral du Québec, savoir que personne ne doit avoir la possibilité d'acquérir une influence indue sur un parti, d'où la nécessité de limiter les contributions, et le public a droit de savoir d'où proviennent les contributions. Au-delà du projet de loi, il y a des principes fondamentaux qui sont à la base de notre démocratie. Ces principes, qui nous ont été légués par M. Gérard D. Lévesque il y a plus de 30 ans, guident encore aujourd'hui tout ce qui touche le financement de notre parti, et ça, soyez-en assuré.

Dans le passé, à plusieurs reprises, le Directeur général des élections a mandaté des groupes de travail et de recherche, sur lesquels siégeaient les partis politiques, les partis représentés à l'Assemblée nationale, afin de réfléchir notamment sur la question des financements des partis politiques. À chaque fois, M. le Président, les recommandations ont été unanimes: il ne faut pas ouvrir cette porte et risquer de ramener le Québec 30 ans en arrière. C'est clair.

Les projets de loi que nous proposons entérinent une large partie des recommandations qui ont été publiées en 2007 par un groupe de travail mandaté par le DGEQ, qui était mandaté afin de réfléchir spécifiquement sur la question du financement des partis politiques. Mon collègue le député de Huntingdon l'avait d'ailleurs souligné lorsque notre gouvernement avait procédé à la scission du projet de loi n° 78.

Alors, le projet de loi qu'on propose d'adopter, le principe d'aujourd'hui, constitue le plus important renforcement à la Loi électorale depuis les 30 dernières années. De plus, la limite des dons à 3 000 $ est encore aujourd'hui jugée honnête et raison... d'autant plus qu'elle n'a pas été indexée depuis 1977.

Le plus important, M. le Président, c'est la transparence. J'aimerais revenir là-dessus parce que, depuis 1977, la contribution maximale d'un électeur à un parti politique est de 3 000 $ par année. Une des recommandations du Parti québécois, c'est d'abaisser la limite du financement de 3 000 $ à 500 $. On a entendu la députée de Taschereau là-dessus tout à l'heure.

Selon le Parti québécois, ça permettrait une contribution populaire puis à la limite des capacités de payer des contributeurs. À l'époque et lors des consultations, le Parti québécois a beaucoup, beaucoup insisté sur le fait que le revenu moyen personnel d'un citoyen du Québec était de 25 500 $ et que la contribution de 500 $ était plus représentative de la somme versée par la majorité des donateurs. Ils ont mentionné que le 3 000 $ fixé en 1977, c'était une première étape pour limiter le financement des partis politiques et que, selon eux, il est maintenant temps de franchir une seconde étape.

En 1977, là, le revenu moyen d'un électeur était pas mal en dessous de 25 500 $. Je n'étais pas très vieille à l'époque, M. le Président, mais il y a quelque chose qui me dit que le revenu moyen était pas mal en deçà de 25 000 $.

C'est sûr, c'est certain qu'il n'est pas donné à tous de contribuer pour 3 000 $. Par contre, il y a des gens qui ont la capacité de le faire. Et, si ces gens-là croient profondément dans les valeurs d'un parti politique, que ce soit le Parti québécois, que ce soit Québec solidaire, que ce soient l'Action démocratique du Québec ou le Parti libéral, allons-nous empêcher quelqu'un qui en a les moyens de faire une contribution politique à la hauteur de ses moyens? C'est tout à fait honnête, puisque cette contribution-là apparaît à l'intérieur des registres. Il n'y a rien de malhonnête.

Et ce qui m'inquiète, M. le Président, du débat et de la tangente qu'on est en train de donner au débat actuellement, c'est qu'il est rendu, à en croire les dires de certains collègues de l'opposition, qu'il en est malsain de contribuer à un parti politique. Ce n'est pas malsain, c'est sain de contribuer à la démocratie, M. le Président, et de le faire à l'intérieur de notre capacité financière. Et il y a des gens qui contribueront, je suis persuadée, dans votre propre comté, M. le Président, vont contribuer pour soutenir l'homme que vous êtes, le député que vous êtes, la personne qui croit aux intérêts de son comté. Il y a aussi de ça. C'est un appui au député, c'est un appui à la personne, au représentant et au travail qui est fait pour permettre à cette personne de se représenter. Il n'y a rien de malsain derrière ça.

Il faut cesser de prétendre qu'une contribution politique, c'est malsain. Il faut cesser de prétendre que ce qui se fait ici, à l'intérieur des murs du salon bleu, c'est malsain. Lorsqu'on lance des allégations comme ça, c'est toute la classe politique et ce sont tous les partis politiques qui sont éclaboussés. Il faut que ça cesse.

Alors, évidemment, on souhaite, dans le projet de loi, respecter l'intention du législateur de 1977. Et on souhaite vraiment aller au-delà... Alors, on s'est questionnés: Elle était quoi en 1977, l'intention du législateur? Qu'est-ce qu'on avait en tête à l'époque, au moment de l'adoption de ce projet de loi?

Alors, on est retournés en arrière, parce qu'évidemment, dans des questions... lorsque se posent certains... certaines problématiques, l'histoire peut vraiment être source d'inspiration, peut nous permettre de nous replacer, de nous resituer, de recadrer. Parce qu'il n'y a pas grand monde dans cette salle qui était là en 1977. Très peu sont les collègues - sauf vous, M. le Président - qui étaient présents à l'époque pour guider l'intention du législateur.

Alors, pour nous... pour nous, les collègues qui sommes encore nouveaux, j'aimerais reprendre les grands principes. Alors, évidemment, à l'époque, le ministre d'État à la réforme électorale soutenait que l'objectif de démocratisation du financement politique financerait... favoriserait le service par les politiciens de l'intérêt général plutôt que particulier. Et là je cite: «La diversification des contributions empêche à toutes fins pratiques un parti et même un homme politique d'être soumis aux intérêts de quelques-uns de ses concitoyens...» Fin de la citation. Et ça, c'est tiré du Journal des débats.

Le 7 juillet 1977 toujours, lors de la deuxième lecture du projet de loi 2, le ministre d'État à la réforme électorale, M. Robert Burns, affirmait ceci: «Je voudrais également [...] vous souligner que le plafond fixé à 3 000 $ oblige les partis politiques à diversifier leurs sources de revenus, à se donner des assises populaires. [...]La diversification des contributions empêche à toutes fins pratiques un parti et même un homme politique d'être soumis aux intérêts de quelques-uns de ses concitoyens, et ça aussi est un but fondamental du projet de loi n° 2.»

Et il poursuit: «On me permettra de noter qu'à l'intérieur de la limite de 3 000 $ des électeurs québécois pourront décider, par souci démocratique, de faire parvenir des contributions à plusieurs partis politiques, soucieux qu'ils seront de maintenir un éventail de formations politiques représentatif d'une société ouverte. Peut-être est-ce [...] une fois trop rêver de penser qu'un jour un électeur québécois puisse décider de contribuer à l'un ou à plusieurs partis politiques sans aucune partisanerie, mais le projet de loi ne ferme pas la porte là-dessus. Le projet de loi ne souhaite pas que ce soit impossible, et c'est [ça] qui est particulièrement important.» Fin de la citation.

Il existe, M. le Président, des citoyens qui justement, parce qu'ils en ont la capacité, utiliseront cette possibilité de contribuer jusqu'à concurrence de 3 000 $ pour contribuer à différentes formations politiques. Il en existe, on en connaît, des gens qui souhaitent encourager la démocratie, souhaitent encourager certains députés dans leurs démarches et certaines formations politiques dans leurs démarches. C'est sain ça, M. le Président. Il n'y a rien de malsain derrière ça.

Alors, ce qui est proposé, M. le Président, par notre gouvernement, 30 ans plus tard, respecte l'objet et respecte l'intention du législateur, respecte la volonté du gouvernement de M. René Lévesque.

.(15 h 40).

Il y a d'autres choses aussi que le plafond aux contributions politiques de prévues à l'intérieur du projet de loi. Il y a un resserrement au niveau des amendes, parce qu'actuellement on semble que, compte tenu des amendes qui sont à la loi, il n'y a peut-être pas un élément dissuasif pour s'assurer d'un respect à la lettre de la loi. Alors, on veut resserrer les règles du financement des partis politiques, mais surtout, surtout, M. le Président, punir ceux qui contreviennent et les punir plus sévèrement.

On prévoit également une augmentation de ces amendes et distinguer, permettre de faire une distinction entre le contrevenant qui est une personne physique et le contrevenant qui est une personne morale. Pour que ce soit plus clair pour tous et pour qu'on ne transgresse pas les règles du financement politique, le projet de loi va faire en sorte que quiconque, qu'il s'agisse d'un citoyen, d'une entreprise ou de ses dirigeants, d'une société, d'un de ses associés, qu'il soit déclaré coupable d'une infraction en matière de contribution à un parti politique ou à une campagne à la direction d'un parti politique, ne puisse, pour une période de cinq ans, obtenir un contrat public. C'est clair. De contribuer au-delà de la contribution minimale ne sera pas... sera considéré comme une contravention à la loi, sera puni de façon très claire non seulement par l'imposition d'une amende, mais également par l'impossibilité d'obtenir un contrat. Alors là, on va vraiment poser des gestes clairs et concrets afin d'éviter des situations malheureuses, et ça, M. le Président, c'est une mesure responsable, une mesure qui est à l'image de notre gouvernement.
Encore une fois, M. le Président, ce projet de loi là est important. Cette scission-là s'imposait, et il est important d'aller de l'avant avec ce projet de loi là dans le respect de l'intention initiale du législateur, mais aussi dans le respect de ce que nous sommes et de ce que nous faisons, parce que, dans cette salle, M. le Président, il y a des gens de bonne foi, il y a des gens qui travaillent avec coeur pour le bien-être de leurs citoyens et des gens qu'ils représentent. Et le spectacle auquel nous assistons depuis quelques jours me déçoit énormément, et il est important pour moi de le mentionner. Et, comme je le dis et je le réitère, j'ai une confiance la plus absolue en mon chef et aux membres de l'équipe libérale.

Alors, sur ce, je vous invite à adopter le principe. Et j'espère que nos débats pour les prochaines semaines seront un petit peu plus respectueux. Merci.

Le Vice-Président (M. Gendron): Alors, je vous remercie, Mme la députée de Gatineau, pour votre intervention sur le principe du projet de loi n° 93. Et, pour la poursuite du débat, je reconnais maintenant M. le député de Mercier. M. le député de Mercier, à vous la parole.


M. Amir Khadir


M. Khadir: Merci, M. le Président. Je vais annoncer, bien sûr, que nous allons voter en faveur de l'adoption de principe du projet de loi, puisque ce projet de loi découle d'une initiative commune des partis d'opposition, que le gouvernement a accepté de scinder le précédent projet de loi, si je me rappelle encore bien le numéro, n° 78, qui a donc été scindé pour qu'on se penche sur le financement des partis politiques. Il est vraiment grand temps.

Je vais bientôt revenir sur les propositions, propos et analyses qui viennent de nous être faits par la députée de Gatineau, parce que je... disons que je suis très sensible à ses propos et à ses arguments. Je suis prêt à, disons, accepter plusieurs de ses affirmations, mais j'expliquerai en quoi il y aurait, à ce moment-là, matière donc à poursuivre cette logique pour permettre d'arriver donc à concrétiser le souhait que vous avez de voir l'Assemblée, notre fonctionnement comme partis politiques et nos débats être le plus possible à l'abri des accusations qui, bien que... dans certains cas, doivent certainement être fondées, mais la plupart du temps émanent surtout à cause d'une atmosphère de suspicion qui, je dois le rappeler, plane encore en raison de l'obstination de la partie gouvernementale de ne pas permettre une enquête publique justement pour permettre à ce que tout le monde respire, et que la lumière soit faite, et qu'on ne soit pas simplement en prise avec des allégations.

Mais je voudrais d'abord rappeler une motion votée à l'unanimité le 12 novembre dernier: «...l'Assemblée nationale demande au gouvernement du Québec de tenir compte dans son projet de réforme de la Loi électorale des engagements de tous les partis [...] représentés à l'Assemblée nationale pour assurer une juste représentation du pluralisme politique.»

Le 25 novembre, le projet de loi n° 78 a été déposé, a été présenté; il n'y avait pas de mesure pour favoriser le pluralisme politique, à ce que je sache. Ensuite, sont venues les consultations générales. Le 23 mars, on a adopté une motion de scission, ce qui a été salué par tout le monde. Tout au cours des consultations qui ont précédé, de nombreux groupes sont venus, préoccupés par le fait d'abord que le découpage de la carte électorale, plutôt que de respecter le souhait d'une meilleure représentation du pluralisme politique, entraînait de graves entorses en fait à une représentation plus équilibrée de l'opinion des citoyens, notamment en termes démographiques, étant donné les distorsions qui existent dans la démographie des comtés très vastes, nombreux et surtout inhomogènes du Québec.

Face à cette situation, on se serait attendu qu'au moins le gouvernement fasse une annonce pour indiquer comment il entend corriger ça, comment il entend respecter une... une motion unanime dans laquelle il promettait d'aller dans ce sens. Je me rappelle très bien, par exemple, le ministre qui s'occupait du dossier à l'époque, le ministre... enfin, le député du Kamouraska-Témiscouata, me regarder dans les yeux au moment où on adoptait la motion, avec cette... cette, je dirais, entente tacite entre tout le monde qu'il allait y avoir un processus alentour de ce... de l'adoption d'un projet de loi sur la réforme de la Loi électorale pour qu'on assure une meilleure représentation, qui voulait dire considérer aussi une forme de proportionnelle.

Maintenant, la question qui se pose: Est-ce que les votes qu'on prend ici ont une valeur? Est-ce qu'on n'aggrave pas, en ne respectant... même les votes qui ne datent que de quelques mois, les votes unanimes qu'on prend alentour d'une motion, en ne les respectant pas, est-ce qu'on n'aggrave pas la perception du public comme quoi le travail ici n'est pas sérieux, la parole donnée n'a pas d'importance?

Je me rappelle, quand je voulais abandonner ma pratique de médecine et me porter candidat, avec la perspective que je sois élu, combien de gens m'ont dit, et je le regrette qu'ils aient dit... qu'ils aient dit ça, que tout ça, l'Assemblée nationale, c'est un spectacle. J'étais persuadé du contraire, je le demeure. Je prends comme une insulte lorsque les gens, par exemple, des fois, en remarques à ce que je leur dis sur les activités ici, ils disent: Oui, oui, «the show must go on». Et je suis venu un peu dans l'Assemblée avec la conviction que beaucoup de gens veulent restaurer le plus possible... ou maintenir la noblesse du travail qu'on fait, l'importance du travail qu'on fait, la crédibilité du travail qu'on fait. Mais, pour ça, il faut respecter un tant soit peu nos engagements. Et c'est sûr que les députés qui sont les plus à même de matérialiser la tenue de promesses, bien, c'est ceux et celles qui détiennent le pouvoir, donc c'est la partie gouvernementale, à travers les projets de loi qu'ils nous offrent. Donc, je le rappelle, il y a une parole donnée...

D'ailleurs, le député de Verdun, qui était impliqué dans les négociations à ce moment-là, se rappellera que, tacitement, ce qu'on voulait dire, c'est qu'il y aura un élément de proportionnelle dans le nouveau projet de loi, on va aborder cette chose-là. Or, il n'en est rien.

Est-ce que le simple citoyen, qui est un peu écoeuré d'aller voter parce qu'il a l'impression que son vote ne compte pas étant donné qu'il n'y a aucune proportionnelle, est-ce que ces simples citoyens doivent se regrouper en lobby, donc procéder à quelque chose de légal - je ne parle pas de trafic d'influence - en lobby, les payer pour obtenir une oreille attentive? Je ne sais pas trop.

.(15 h 50).

Je pense que, tant et aussi longtemps qu'au Parlement les citoyens sont bien représentés par des députés et des ministres qui font leur travail, ils n'ont pas besoin de lobby. En principe, ils n'auraient pas besoin de lobby, ils auraient juste besoin d'arguments convaincants. Ils auraient besoin de faire la démonstration de la justesse de leur demande, de leur cause. Et il me semble qu'une demande qui a été entérinée dans les programmes des quatre partis représentés à l'Assemblée nationale, c'est-à-dire une réforme de la Loi électorale pour qu'il y ait une proportionnelle, on ne peut pas trouver quelque chose de plus consensuel et qui est de plus légitime. Alors, pourquoi aurait-on besoin, je dis à ces citoyens, de lobby pour le faire? Je dis non. Est-ce qu'on a besoin de trafiquer des influences? Non. Tout le monde est d'accord. Donc, tout ce qu'on a besoin, c'est d'une volonté politique.

Peut-être que ce qui nous aiderait davantage, c'est la réalisation des circonstances particulières dans lesquelles se trouvent la politique en général au Québec, le travail parlementaire, le travail du gouvernement, et on pourrait faire des efforts pour restaurer la crédibilité de notre travail, donc de réaliser un engagement pris déjà depuis près de 40 ans par l'ensemble des partis politiques.

Je rappelle que le premier ministre avait pris l'engagement, lors des élections de 2003, en campagne électorale, que la réforme du mode de scrutin pour une proportionnelle serait faite dans la première moitié du premier mandat. Ça nous amène à au moins cinq ans. Donc, on est cinq ans en retard. Et j'imagine que, donc, on n'a pas besoin de démontrer la légitimité de cette demande.

Et je vous rappelle, pour l'histoire, qu'un ministre libéral, très soucieux, très respectueux de sa parole, a tout fait pour le faire. Je parle du ministre Benoît Pelletier. Je n'ai pas besoin de vous faire l'historique en détail, mais déjà le ministre actuel de la Sécurité publique avait présenté un avant-projet de loi. Ensuite, il y avait eu la Commission spéciale sur la Loi électorale. Les suites des travaux avaient amené M. Pelletier à demander au DGEQ d'évaluer les modalités de mode de scrutin mixte compensatoire, d'accord, ici. En décembre 2007, le DGEQ, après un... un travail sérieux, a présenté un volumineux rapport.

Je demande à M. le Président la permission de déposer le résumé du rapport du Directeur général des élections, qui a été présenté, donc, en décembre 2007, à la suite, donc, du mandat que lui avait confié le ministre Benoît Pelletier.

Le Vice-Président (M. Gendron): Merci. Juste pour solliciter... Il y a consentement?

Une voix: ...
DOCUMENT DÉPOSÉ

Le Vice-Président (M. Gendron): Alors, il y a consentement de dépôt. Merci. Vous pouvez... Veuillez poursuivre.

M. Khadir: M. Pelletier, le ministre responsable de la Réforme des institutions démocratiques, a dû battre en retraite à ce moment-là, alléguant qu'il n'y avait pas consensus. Or, l'absence de consensus n'était pas tant à l'Assemblée nationale, en société, mais c'était l'impossibilité de contourner certains lobbys très puissants. Je pense, et je le dis ouvertement, à la Fédération des municipalités du Québec. Et je le dis comme je le pense, je le dis comme je l'ai dit à son président, c'est que la Fédération des municipalités du Québec n'a pas fait son travail.

La Fédération des municipalités du Québec ignore les avantages considérables d'un scrutin mixte proportionnel, pour les régions du Québec, pour une véritable démocratie axée sur le pouvoir régional. Et nous allons, nous, s'atteler au travail de les convaincre, de leur démontrer, preuves à l'appui, expériences européennes à l'appui, modélisation à partir des données des dernières élections à l'appui, que c'est à l'avantage des régions. Ça permet une meilleure emprise des régions sur leur députation et une meilleure intégration de leurs préoccupations régionales, pour une représentation plus effective de leurs préoccupations, qui sont souvent similaires dans une grande région qui regroupe plusieurs circonscriptions.

Mais, bon, je relève quand même que le ministre qui a utilisé l'argument d'un manque de consensus des partis politiques fait partie d'un gouvernement qui nous vient, donc... qui nous est venu avec le projet de loi n° 78 pour un découpage de carte électorale qui était tout à son contraire, qui n'avait aucun consensus, à commencer par un consensus du... près des gens représentés à l'Assemblée nationale.

Pour la deuxième moitié de ma présentation, je voudrais donc revenir maintenant sur la loi n° 93, la Loi modifiant la Loi électorale, donc, concernant les règles de financement des partis politiques.

La députée de Gatineau a mentionné à juste titre... Je suis persuadé qu'elle est tout à fait de bonne foi quand elle pense, elle, que tout le monde ici, particulièrement les membres de son parti, sont de bonne foi. Je suis persuadé de ceci, moi aussi, parce que, quand je vois, par exemple, le ministre délégué aux Transports, député de Papineau, se lever sans être gêné et en toute franchise dire que c'est normal et que ça fait 30 ans que c'est comme ça, donc ce n'est pas juste lors de l'exercice du pouvoir de son parti, mais que c'est normal que des entreprises contribuent à la caisse électorale d'un parti, moi, je pense que la députée de Gatineau a raison de penser que tout le monde agit de bonne foi. Sauf qu'il y a un problème, c'est que, depuis l'instauration de cette loi, on a oublié le sens, on a oublié pourquoi on avait institué ces règles.

Ces règles ont été instituées dans plusieurs démocraties comme la nôtre pour garder une distance qui soit raisonnable entre les intérêts économiques, les pouvoirs économiques qui jouissent déjà d'un pouvoir considérable en société en raison de leur richesse, en raison du fait qu'ils détiennent déjà le pouvoir économique... Alors, pour qu'on n'ait pas - oui, M. le Président - pour qu'on n'ait pas donc une influence indue, un rapport disproportionné dans les pouvoirs que doivent détenir les citoyens sur le contrôle démocratique du gouvernement, on a introduit des lois pour instituer une distance.

Or, il y a une culture politique en Occident qui s'est répandue depuis les 15, 20, 30 dernières années, qui est allée dans le sens contraire, hein, c'est les vents de droite qui ont balayé l'Occident depuis l'époque de Reagan et de Thatcher, qui ont érigé en dogme le fait que, dans le fond, les pouvoirs publics devaient reculer et laisser le plus de place possible au privé.

Donc, c'est sûr que, dans cette logique-là, petit à petit, on en vient à croire qu'il n'y a aucun problème que les partenaires privés de l'activité économique, et surtout ceux qui sont les plus habiles, donc ceux qui sont les plus forts, qui ont le plus de moyens, exercent toutes sortes d'influences, toutes... et en fait exercent toutes sortes de contrôles sur les décisions publiques. Et ils le font de plusieurs manières, et la meilleure manière qu'eux connaissent, c'est à travers les moyens dont ils disposent, ça veut dire: ça se matérialise comme argent, comme dons aux partis politiques.

C'est pour ça qu'il faut refaire nos devoirs et s'assurer qu'en faisant ce devoir maintenant on limite les dégâts causés. Par exemple, au Parti libéral, avec tout ce qu'on connaît depuis un an, moi, je suis sûr que les gens n'ont pas cherché ça. Les députés qui sont là n'ont pas cherché à contourner la loi ou l'esprit de la loi. Mais ces dégâts sont causés par une culture qui, petit à petit, a infecté notre pratique politique. Et ce n'est pas juste le parti au pouvoir, ce n'est pas juste l'opposition officielle. Québec solidaire, une fois au pouvoir, peut être vulnérable aux mêmes choses si on ne change pas les règles, si on ne refait pas notre travail pour changer cette culture.

Alors, je voudrais vous proposer, M. le Président, à l'Assemblée, une série de propositions qu'on fait pour que, lors de la révision de la Loi électorale sur le financement... pour limiter les coûts des courses au leadership, pour encadrer les campagnes électorales, pour disposer d'un certain nombre de balises afin de diminuer la pression sur le financement des partis politiques, afin que les candidats, les titulaires de poste, les députés puissent se consacrer véritablement à leur travail, qui est celui de la représentation, de l'écoute des citoyens, plutôt que d'être tout le temps préoccupés à ramasser de l'argent pour la caisse électorale du parti, à organiser des activités de financement, des soupers spaghetti, ou que sais-je.

Pourquoi on en est rendus là? Parce qu'il y a des impératifs logiques, matériels. Et, quand il n'y a pas de limites aux dépenses électorales ou des limites qui sont très élevées, trop élevées... Quand, d'autre part, il y a des campagnes électorales qui deviennent de plus en plus coûteuses parce qu'on n'a pas accès à l'espace public à travers des moyens légitimes d'accès à l'espace public que sont la radio et télédiffusion publiques, c'est sûr qu'on a besoin de beaucoup d'argent pour se faire entendre.

Donc, il faut contourner ces obstacles autrement que par l'illégalité, autrement qu'en contournant l'esprit de la loi, donc en encadrant mieux. Donc, voici les propositions que je fais au ministre responsable.

Mieux encadrer les publicités électorales en offrant plus de temps d'antenne gratuit et heures de grande écoute aux partis politiques. Hein, c'est une partie très importante des dépenses des... surtout des partis dominants, qui sont proches du pouvoir et qui peuvent éventuellement aspirer à accéder au pouvoir.

Limiter l'affichage électoral. Chose qui ennuie de plus en plus la population, nos électeurs, ces grosses affiches, ces pancartes qui occasionnent des dépenses absolument... une pollution visuelle et des dépenses... des dépenses qui sont fastes et inutiles.

Diminuer le montant autorisé, donc, des dépenses électorales. Ça revient à... En fait, pour s'assurer qu'on a... on a une limitation dans ce genre de dépenses là, donc il y aurait un plafond plus bas des dépenses électorales autorisées.

.(16 heures).

L'équivalent de ça pour toutes les questions qui touchent les allégations de trafic d'influence, qui est souvent exercé par des prête-noms de gens qui ramassent des grosses sommes d'argent, donc limiter sérieusement le plafond des dépenses... des contributions des individus.

Et l'idée de 500 $ est très honnête et très raisonnable. Je rappelle que la moyenne des contributions du Parti libéral, qui est le parti le plus efficace pour ramasser de l'argent, c'est à peu près 400 quelques dollars. C'est entre 400 $ et 500 $. La moyenne du PQ est un peu moins élevée, notre moyenne vraiment ferme la marche. D'accord?

Et je rappelle à la députée de Gatineau... Elle a raison, les gens qui sont de conviction donnent à leur parti. D'accord. Mais, quand je regarde le Parti libéral, j'ai fait le calcul, je l'ai dit dans une de mes questions, la moyenne de la contribution des trois principaux dirigeants du Parti libéral au cours des années disponibles sur le site de la DGEQ, c'est environ 800 $. Donc, les gens, en principe, les plus convaincus, qui portent la parole de votre parti, qui exercent le pouvoir, c'est à peu près ça. Donc, il n'y a rien de déraisonnable à limiter ça à 500 $.

Pour compenser, le corollaire de ça, c'est que la contribution de l'État soit plus importante. Alors là, je pense qu'il faut qu'on soit un peu plus généreux. Et je vous rappelle: ça permet aux députés de mieux respirer, dans une atmosphère plus saine pour vaquer à leurs vraies occupations, qui n'est pas d'organiser des soupers spaghetti, ou des campagnes de financement, ou des cocktails mais d'être à l'écoute de leurs citoyens et de travailler à leurs dossiers. Donc, de les dégager d'une responsabilité qui est inutile, qui est... surtout qui les met à découvert, qui les rend vulnérables à des pressions indues, puis qu'ils se consacrent au véritable exercice, je dirais, de leur jugement, de leur discrétion dans la priorisation des choses que leur demandent les entreprises de leur comté, les citoyens de leur comté, les groupes de leur comté.

Limiter, voire abolir les dons anonymes aux partis politiques. À l'instar de la France, la distribution par la Direction générale des élections du Québec de l'ensemble des plateformes électorales de tous les partis, ce serait un exercice, un coût fixe assumé par la DGEQ, contrôlé avec un cadre précis. Tout le monde serait sur le même pied. Assujettir aussi toutes les municipalités à des règles de financement et pas seulement les municipalités de 5 000 habitants et plus.

Alors, ceci met fin à ma présentation. Le financement populaire des partis politiques serait mieux assuré, ça limiterait les tentatives illégales des gens qui essaient d'utiliser notre vulnérabilité. Sachant que le travail est difficile, qu'on doit ramasser de l'argent, on doit se battre pour convaincre des gens, on a besoin d'accès à l'attention du peuple, et, dans les conditions où tout se marchande, malheureusement, bien, on a besoin d'argent. Alors, pour nous rendre moins vulnérables, il faut imposer des balises. Puis ça me fera plaisir de participer activement aux travaux de la commission. Merci, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Gendron): Alors, je vous remercie, M. le député de Mercier, de votre intervention. Et je suis prêt à entendre le prochain intervenant, s'il se manifeste.

Mise aux voix

Comme je ne vois pas d'autre intervenant, est-ce à dire que le principe du projet de loi n° 93, Loi modifiant la Loi électorale concernant les règles de financement des partis politiques et modifiant d'autres dispositions législatives, est adopté?

Des voix: Adopté.

Le Vice-Président (M. Gendron): M. le leader adjoint du gouvernement.

Renvoi à la Commission des institutions

M. Gautrin: Alors, je fais motion pour que ce projet de loi soit déféré à la Commission des institutions pour étude détaillée.

Mise aux voix

Le Vice-Président (M. Gendron): Est-ce que cette motion est adoptée?

Des voix: Adopté.

Le Vice-Président (M. Gendron): Adopté. M. le leader adjoint du gouvernement.

M. Gautrin: Auriez-vous l'amabilité, M. le Président, d'appeler l'article 21 du feuilleton, s'il vous plaît?

Projet de loi n° 64

ADOPTION


Le Vice-Président (M. Gendron): Alors, j'appelle l'article 21 du feuilleton d'aujourd'hui, et, à l'article 21, c'est M. le ministre du Revenu qui propose l'adoption du projet de loi n° 64, Loi donnant suite à l'énoncé économique du 14 janvier 2009, au discours sur le budget du 19 mars 2009 et à certains autres énoncés budgétaires.

Y a-t-il des interventions? Oui, M. le ministre du Revenu. À vous la parole, M. le ministre du Revenu.

M. Robert Dutil

M. Dutil: Merci, M. le Président. Je soumets à cette Assemblée le projet de loi n° 64, intitulé Loi donnant suite à l'énoncé économique du 14 janvier 2009, au discours sur le budget du 19 mars 2009 - 2009, M. le Président, et non pas 2010 - et à certains autres énoncés budgétaires. (…)

Le Vice-Président (M. Gendron): Alors, je vous remercie, M. le ministre du Revenu, de votre intervention. Et, pour la poursuite du débat sur le projet de loi, je reconnais maintenant M. le député de Rimouski, porte-parole de l'opposition officielle en ces matières. M. le député de Rimouski, à vous la parole.


M. Irvin Pelletier


M. Pelletier (Rimouski): Merci, M. le Président. D'entrée de jeu, je voudrais d'abord souhaiter un bon anniversaire à M. le ministre du Revenu. Vous comprendrez, M. le Président, que je ne l'ai pas fait personnellement ce matin parce que, de mon siège à son siège, on aurait retardé les travaux de l'Assemblée. Alors, ça me fait plaisir de le faire tout de suite, à titre personnel. Et je ne sais pas quel numéro il est rendu, mais j'espère que le numéro est plus proche du numéro de projet de loi qu'on regarde plutôt que de celui qu'il vient de regarder.

Alors, M. le Président, ces projets de loi, d'abord... ce projet de loi là, là, relatif au budget 2009-2010... Vous savez, un budget, c'est la pièce maîtresse des travaux de l'Assemblée, des travaux de la Chambre, et puis c'est une pièce aussi qui traduit l'ensemble, si vous voulez, du programme d'un parti politique.

Alors, si je vous dis qu'on est contre ce projet de loi, je pense que vous ne seriez pas surpris. Parce qu'après les élections du 8 décembre 2009 c'est le Parti libéral qui a été élu. Alors, le Parti libéral a mis sa plateforme électorale dans son programme, puis c'est avec ce document-là qu'on travaille.

Nous, on a mis le nôtre dans notre tiroir, mais on ne l'a pas serré loin, là, on le garde très proche, de sorte que le budget qui est là, ce n'est pas notre programme, alors on est obligés d'être contre. Et ça, ce n'est pas surprenant, parce que, moi, je ne me souviens pas d'avoir vu un parti d'opposition être en faveur du budget qui est déposé par le parti au pouvoir. C'est déjà arrivé au moins une fois depuis que je suis ici, mais c'est très, très... très rare. Puis des fois c'est pour des intérêts autres que les intérêts du Québec.

Mais, ici, ce qui me surprend, M. le Président, c'est qu'à peu près... à peine un an et quelques mois des dernières élections, ce qui me surprend, c'est qu'à peu près 80 % de la population n'acceptent pas ce budget-là. Quand je dis 80 % de la population qui n'acceptent pas ce budget-là, là, ce n'est pas... dans ça, ce n'est pas seulement des péquistes, ce n'est pas seulement des adéquistes non plus puis ce n'est pas seulement des Québec solidaire. Pour 80 % contre, ça veut dire qu'il y a des libéraux qui sont contre, aussi.

Puis je peux vous dire, M. le Président, la semaine dernière, j'ai reçu un courriel d'un individu de mon comté, un individu que je respecte énormément, j'ai beaucoup d'estime pour lui, il est un bon intervenant économique dans notre comté, mais il est fédéraliste. Alors, je respecte ça, c'est son idée, mais, s'il est fédéraliste, pour lui c'est dans l'intérêt des Québécois. Vous pouvez être sûr que ce n'est pas contre les Québécois...

Une voix: ...

.(16 h 10).

M. Pelletier (Rimouski): ...c'est dans l'intérêt des Québécois, selon ce qu'il pense. Et puis il m'a envoyé un courriel puis il m'a demandé ceci: il m'a demandé de demander à ma chef de présenter une motion dans cette Assemblée, une motion demandant une enquête sur la collusion, je ne dirai pas «la corruption» tout de suite, là, mais, disons, le favoritisme dans la construction et autres sujets. Puis il m'a dit de demander à ma chef qu'elle demande au premier ministre de demander... de faire un vote libre, de demander, autrement dit, aux députés de voter en leur âme et conscience et non pas selon une ligne de parti.

Qu'est-ce que ça veut dire, ça, M. le Président? Ça veut dire que cet individu-là, un bon libéral, fédéraliste, veut une enquête puis il aimerait que les libéraux se prononcent librement sur le sujet. Je n'ai pas tellement fait la commission encore, là. Bien, en fait, elle se trouve à être faite, là, actuellement, mais ça me surprendrait que ça soit possible de l'autre côté, parce que, quand on voit avec quelle façon, quelle banalité on reçoit les motions sérieuses que l'on fait, je pense que ça serait difficile de leur demander cet effort-là.

Alors, comme je vous le disais, ce qui me surprend, c'est l'hostilité dans laquelle le budget est reçu dans la population. Puis, en fait, on le sait un petit peu, pourquoi. D'abord, il y a une question de crédibilité du gouvernement, on en parle beaucoup dans ces temps-là. Pourquoi que le gouvernement a des problèmes de crédibilité? Bien, si on regarde depuis que ce gouvernement-là est au pouvoir, depuis 2003, si on regarde sa feuille de route, 2003 à 2008, pendant qu'il y avait une croissance économique, ça allait bien, le gouvernement fédéral faisait des profits, baissait sa dette, c'était la même chose pour le gouvernement de l'Ontario, faisait des profits, baissait sa dette, bien, ici, au Québec, on a trouvé le tour à ne pas faire de profits, à continuer à faire des pertes puis à augmenter nos dettes.

Selon le Vérificateur général, c'est à peu près 5 milliards de pertes qu'on a faites dans ces cinq années-là. C'est sûr que ça a baissé à 3 milliards, dû à des ventes d'actif d'Hydro-Québec, ça a baissé à 3 milliards, puis le 3 milliards a été, je dirais, illégalement transféré à la dette... à la dette, tout simplement. Appelons-la la mauvaise dette. Parce que la dette du gouvernement, c'est un peu comme du cholestérol: il y en a une bonne, puis il y en a une mauvaise. Alors ça, c'est envoyé à la mauvaise dette.

2008, des élections arrivent. En campagne électorale, là, on ne le sait plus, là. Au printemps 2008, on appréhendait une crise économique, on a annoncé des milliards dans les infrastructures, puis on arrive en élection, 2008, à l'automne 2008, puis là il n'y a plus de crise économique, il n'y a plus de problème avec les déficits, il n'y a plus de problème avec les pertes à la Caisse de dépôt, et les élections se passent comme ça. Puis je me souviens, M. le Président, lors du débat des chefs, lorsque notre chef parlait d'une perte possible, à la Caisse de dépôt, de 30 milliards puis que le chef de l'ADQ parlait de 40 milliards, ils se faisaient un petit peu ridiculiser. Mais, par la suite, au mois de février, on s'est aperçu que le 40 milliards, c'était ça au mois de février, mais, en campagne électorale, au mois de novembre, 30 milliards, c'est un chiffre qui était juste.

Alors, la population, quand est arrivé le mois de janvier, février, un mois, un mois et demi, deux mois après les élections, ils ont vu que finalement les chiffres qui étaient annoncés en campagne électorale par le premier ministre, ce n'était pas correct. De toute façon, ce n'est pas ça qui est arrivé. Pourtant, c'était deux mois avant qu'on connaisse les chiffres réels, là. Alors, comment le premier ministre pouvait-il ne pas savoir qu'on s'en allait sur une perte importante puis que la Caisse de dépôt s'en allait sur une perte importante? Comment fait... Comment ne le savait-il pas? S'il ne le savait pas, M. le Président, il était le seul au Québec qui ne le savait pas. Puis, s'il le savait, puis il ne l'a pas dit ou il a dit des choses différentes, il y a, encore là, un problème aussi.

2008 à 2010, crise économique, il faut se serrer la ceinture, les Québécois doivent se serrer la ceinture, puis les Québécois acceptent de se serrer la ceinture parce qu'ils savent qu'on est en crise économique. Mais, pendant ce temps-là, on permet des bonis dans des sociétés de l'État: Caisse de dépôt, SAAQ, SAQ, CSST, puis ainsi de suite. Et le premier ministre, on se rend compte, le gouvernement, en fait, n'a aucun contrôle là-dessus. Le gouvernement ne peut pas arrêter ça, ne peut pas ou ne veut pas, mais ne peut pas arrêter ça.

Alors, toutes ces choses-là, M. le Président, la population le voit, ces affaires-là, le voit et l'entend, et ça rentre dans les cerveaux, et puis ça met en place un climat de non-crédibilité envers le gouvernement, qui fait que la population n'accepte plus grand-chose du gouvernement.
Après ça sont arrivées toutes les situations de favoritisme, de collusion. Qu'on parle, par exemple, du salaire du premier ministre, qui était... qui est au moins 75 000 $... Parce qu'il y a trois ans il était 75 000 $. Il a peut-être été indexé. On ne le sait pas, nous autres, si ça n'a pas été indexé. Personne ne nous en a reparlé par la suite. Mais la population peut penser: Si le premier ministre a un salaire du Parti libéral, qui nous dit qu'il n'y a pas d'autre ministre qui en a aussi, hein? On ne le sait pas. On ne le sait pas. Avec la confiance que les gens ont maintenant dans le gouvernement, pourquoi ne pas penser ces choses-là?

Ensuite, il y a eu... on a parlé des problèmes dans la construction, favoritisme dans la construction. Les programmes FIER, qui avantageaient des amis aussi. On a parlé... Lorsqu'on parle de service de garde, on veut travailler sur le développement des services de garde dans les régions et partout, mais, quand on parle des services de garde, la première chose qui nous saute aux yeux, c'est encore du favoritisme.

En éducation, on aimerait ça travailler sur des programmes sérieux pour contrer le décrochage scolaire, mais, quand on rentre dans l'éducation, on s'aperçoit qu'il y a encore du favoritisme, changer le régime pédagogique pour satisfaire à certaines personnes, et ainsi de suite, M. le Président. Puis là on parle d'autres sujets. Qu'on pense, cette semaine, au niveau du financement des partis, puis ainsi de suite.

Bien, tout ça, là, ça a fait que la population est rendue hostile au gouvernement. La population n'a plus confiance parce qu'ils se rendent compte que le gouvernement a manqué de franchise, le gouvernement manque de rigueur, manque de transparence et en plus manque de vision. Puis ça, c'est très sérieux, pour les prochaines années.

Alors, tout ça, c'est très important. Puis, moi, je peux vous le dire, M. le Président, les grandes erreurs du... les principales erreurs du gouvernement, au cours des dernières années, on a eu en 2007 une baisse d'impôt de 1 248 000 000 $ qui a profité aux deux tiers... aux plus riches de notre société, des gens qui gagnent 85 000 $ et plus. Les conséquences de ça, ça a été des conséquences désastreuses. Ça a fait, par exemple, que M. Harper a dit: Quand j'envoie 700 millions au Québec puis qu'eux prennent cet argent-là pour le donner en baisses d'impôt, bien, qu'est-ce que ça fait, c'est qu'il dit: Moi, là, je suis capable de faire ça, moi aussi, des baisses d'impôt. Envoyer ça au Québec, ça ne me donne aucun crédit politique, mais le donner en baisses d'impôt, ça m'en donne un. Alors, ça a été fini, plus de transfert.

Ensuite, lorsque M. Harper a baissé la TPS et la TVQ... la TPS, pardon, on ne savait pas trop pourquoi il faisait ça, là, mais, nous autres, on a recommandé au gouvernement de le récupérer en TVQ parce qu'on avait des besoins d'argent. On ne l'a pas fait, puis le déséquilibre fiscal, qui était rendu à 2 milliards à ce moment-là... on s'est aperçus, après deux baisses de TPS de 1 %, qu'il n'y en avait plus, de déséquilibre fiscal, puis il n'y a plus personne qui en parle. Alors, ça veut dire, ça, que M. Harper, il a dit: Bon, bien, je vais baisser ma TPS de 1 %, puis une autre année de 1 %, puis avec ça je viens de régler le déséquilibre fiscal et puis... Autrement dit, j'ai transféré plus de 2 milliards au Québec. C'est fini. Et puis c'est moi qui a l'avantage politique parce que c'est une action directe dans la population.

On nous dit souvent... on nous a dit souvent: Bien, faites-nous des propositions, faites-nous des recommandations. Nous autres, on vous dit: Bien, écoutez, ce n'est pas nous autres qui est au pouvoir, c'est le gouvernement libéral, c'est à eux à gérer. Mais on a fait quand même des propositions, M. le Président. En 2007, on était contre la baisse d'impôt de 700 milliards... de 700 millions. On aurait préféré que ce 700 millions là aille en santé puis en éducation. Aujourd'hui, on le sait, que c'est une erreur qui a été faite.

On aurait voulu, en 2006-2007, récupérer le point de TPS qui a été laissé. Aujourd'hui, dans une situation de crise économique, c'est difficile, mais en 2006-2007 c'était possible, puis les Québécois ne s'en seraient pas rendu compte tellement. Et puis c'est peut-être une des taxes les plus justes parce que c'est tout le monde qui paie. Par contre, ceux qui consomment le plus paient plus.

.(16 h 20).

Ensuite, on aurait aimé... on proposait... Lorsqu'on parle d'investissement en infrastructures, oui, on peut investir dans des infrastructures pour contrer la crise économique, mais nos investissements, on peut les faire aussi dans les PME au Québec pour stimuler l'économie, autrement dit investir dans l'emploi, investir dans le développement, la recherche, et ainsi de suite. On aurait aimé que les budgets prévoient plus d'argent dans ces investissements-là.

On propose aussi ce qu'on appelle une ingénierie des processus. En 2003, le gouvernement nous a parlé d'ingénierie de l'État. C'est un beau grand terme, mais il faut quand même savoir ce que ça veut dire. Ce qu'on s'est rendu compte: le gouvernement ne savait pas trop ce que ça voulait dire, réingénierie de l'État. Mais parlons de réingénierie des processus, puis en même temps on peut parler de standardisation des processus. Je vais vous donner un petit exemple là-dessus.

Le 23 février dernier, nous avons eu un talon de paie. Comme à tous les deux mardis, on reçoit un talon de paie dans une enveloppe brune à notre adresse personnelle. Celle-là, on peut l'ouvrir, c'est notre talon de paie qui est dedans, et puis le jeudi la paie est déposée dans notre compte de banque. Moi, je connais quelqu'un qui travaille dans la fonction publique puis qui reçoit la même chose, son enveloppe brune le mardi, sa paie est déposée le jeudi dans son compte de banque. La même chose. Ça, on peut dire que c'est ce qu'on appelle une standardisation des processus. Il y a de l'économie là-dedans, puis ça, on le fait.

Mais, quand on parle de réingénierie des processus, c'est que le 25 février j'ai reçu une autre enveloppe brune. Là-dedans, il y avait mes T4, mes T4 pour l'année 2009. Je me suis dit: Si mon T4 avait été mis dans la même enveloppe que mon relevé de paie de mardi, on aurait sauvé une enveloppe, un timbre, de la manutention. Ce n'est pas une grosse... ce n'est pas une grosse économie, peut-être 1 $ par enveloppe, mais, s'il y a 500 000 enveloppes à chaque deux semaines, peut-être que c'est une économie qui peut être intéressante. Ça fait une économie... ça aurait fait une économie de 500 000 $ pour l'année. Ce n'est pas beaucoup, là, sur l'ensemble du budget, mais, si on trouve un processus comme ça à corriger, si on en trouve un par semaine, savez-vous que ça peut faire un montant intéressant?

On a proposé ici l'abolition du poste de lieutenant-gouverneur, d'une dépense inutile qui nous coûte 800 000 $, 850 000 $ par année. On a eu une objection pas trop fouillée. On a dit non à notre proposition, tout simplement. On ne sait pas trop pourquoi, parce que vous pouvez vous dire que les arguments qu'on a eus, ce n'était pas tellement fort. Il y avait le député d'Orford qui nous a dit qu'on voulait déclencher une guéguerre avec je ne sais pas qui. Est-ce qu'il veut dire que, le 850 000 $ qu'on paie pour maintenir le lieutenant-gouverneur en poste, on s'achète de la protection, comme ça se passe dans des endroits qu'on aime mieux ne pas trop fréquenter? Le député de Vaudreuil nous disait... il nous a rappelé des chiffres. Il nous a dit qu'en 2002-2003 c'était 1,2 milliard que ça nous coûtait, le Vérificateur... pas le Vérificateur général, le lieutenant-gouverneur, parce que, du temps du Parti québécois, il y avait le lieutenant-gouverneur, puis le budget était de 1,2 ou 1,3 milliard, qu'il nous a dit, en voulant nous dire que le chiffre avait baissé. Mais, M. le Président, si, en 2002-2003, l'opposition n'a pas fait sa job, est-ce qu'on peut nous reprocher de faire la nôtre aujourd'hui?

Ensuite, on a parlé du rapport d'impôt unique. Le rapport d'impôt unique, ce serait une économie de 840 millions. Ça aussi, c'est une proposition que l'on a faite, une motion du mercredi que ça a été refusé assez rapidement. Il me semble que 840 millions, ça vaut la peine, ça vaut la peine de le regarder. Puis les arguments qu'on nous a donnés, évidemment, ce n'était pas tellement fort. En tout cas, c'était loin à côté des arguments qu'on avait pour, parce qu'on disait: Il y a à peu près 5,9 millions d'impôt... de rapports d'impôt québécois qui se font au Québec, et puis il y a à peu près 75 % des gens qui ne sont plus capables de faire ces rapports d'impôts là tout seuls, c'est compliqué, ils sont obligés de faire affaire avec des consultants, qu'ils paient des honoraires. Alors, si on avait un rapport d'impôt à faire au lieu de deux, moi, je pense qu'il y aurait une économie dans les poches des Québécois et des Québécoises. Il y aurait une économie, on parlait de 150 millions.

C'est la même chose au niveau des entreprises. Moi, je ne connais pas une entreprise qui fait son rapport d'impôt toute seule. Il y en a peut-être, mais c'est très minime. Alors, on trouvait... on parlait d'une économie de 190 millions à peu près.

Ensuite, si on prenait tous les emplois... Parce que les... les traitements des rapports d'impôt, ça se fait en double, hein? Parce que, quand j'envoie mon rapport d'impôt, moi, j'envoie ma copie québécoise à Québec puis ma copie fédérale à Jonquière. Il y a deux personnes qui le reçoivent, un à Québec puis un à Jonquière, qui examinent les mêmes données. Alors, si on avait un rapport d'impôt unique, on sauve une personne sur deux au niveau du traitement des déclarations. À ce moment-là, si on sauve une personne sur deux, on sauve combien? 1 000, 1 500, 2 000 personnes? Est-ce qu'on met 1 000, 1 500, 2 000 personnes à pied? Non. Le ministre du Revenu se cherche du monde, M. le Président, pour faire de la vérification contre le travail au noir, contre l'évasion fiscale, et ainsi de suite, il se cherche des vérificateurs. Toutes ces personnes-là pourraient être... Il y en a plusieurs qui sont prêts à le faire, il y en a d'autres qui auraient besoin d'un peu de formation, il y en a d'autres qui prendraient leur retraite parce qu'ils sont rendus là. Alors, c'est un travail qui pourrait se faire sans perte d'emploi. Et on évaluait cette économie-là à 500 millions, soit 250 millions, fédéral, 250 millions au provincial. Puis, dans le 250 millions au fédéral, bien, il y en a 23 % que c'est pour les Québécois. Alors, je pense, ça valait la peine qu'on le regarde.

D'ailleurs, si j'en parle aujourd'hui... J'en ai parlé à la commission parlementaire sur l'étude de ce projet de loi là. Si j'en parle aujourd'hui, c'est parce que je remplis une promesse que j'ai faite à... ministre du Revenu, je lui ai dit: À chaque fois que je serai devant lui en Chambre, je vais lui en reparler, parce que, vous savez, le premier... le ministre du Revenu, il est aussi ministre de l'Agriculture, et tout ça. Et, quand on a eu la motion du mercredi, M. le ministre n'a pas pu intervenir, mais j'ai hâte d'entendre le ministre sur ce projet-là.

En terminant, dernier sujet, M. le Président, je voudrais vous parler d'un autre sujet qui... Lorsque le gouvernement nous dit: On s'en tire mieux, on s'en tire mieux que partout au niveau de la... lors de la crise économique, c'est sûr qu'on ne peut pas perdre ce qu'on n'a pas, hein? Quand on est arrivés en 2008, ça faisait quatre ans qu'il y avait la crise forestière, les problèmes en agriculture, il y avait eu énormément de fermetures, pertes d'emploi, et tout ça. C'était déjà fait, chez nous, le ravage de la crise économique. Alors, quand la vraie crise économique est arrivée, on avait déjà perdu pas mal. Puis, comme je vous le dis, on ne peut pas perdre ce qu'on n'a pas. Mais, quand je regarde... Quand on nous dit qu'on s'en tire mieux qu'ailleurs, on peut... lorsqu'on regarde un budget, l'état de revenus et dépenses, où on dit: Bon, bien, on s'en va... ou: On a fait un déficit de 4,2 milliards; l'Ontario a fait, je ne sais pas, 14, 15, 20 milliards; on s'en tire mieux. Mais il faut comparer des pommes avec des pommes.

Puis, moi, je regarde... J'ai regardé, dans le budget, un petit fascicule qui s'appelle La dette du gouvernement du Québec. Pourquoi ça, ça m'intéresse plus qu'autre chose? Parce que tout se ramasse là si on a des problèmes de comptabilisation ou si on comptabilise des choses différemment. Pour donner un exemple, par exemple, lorsque le gouvernement s'engage à subventionner une installation culturelle dans une ville, par exemple, et puis qui... la façon de la subventionner, il dit: Empruntez, faites-la, puis, nous, on va prendre charge d'une partie de votre dette. L'Ontario, eux autres, ils comptabilisent ça dans leurs états financiers. Il dit: On a une perte là, puis on a une dette à payer, puis... C'est aussi simple que ça. Au Québec, on dit: Bien, on va considérer qu'on a un engagement, sur 15 ans, 20 ans, supposons, de 5 millions, et puis on va noter ça dans nos livres. On a une note, un compte à payer.

Puis, dans les états financiers du gouvernement, vous savez, on ne voit pas ça dans l'état des revenus et dépenses, on ne voit pas ça dans le bilan, sauf qu'au bilan, à droite, on voit une petite note, c'est marqué: Éventualités... Engagements et éventualités, voir note 22, par exemple. On va à la note 22, puis là c'est écrit: «Le gouvernement du Québec s'est engagé à.» Bien, de ça, il y en a pour 6,5 milliards, déclaré par le Vérificateur général au mois de novembre. En Ontario, eux autres, c'est dans leurs états financiers, c'est rendu déjà dans les dettes puis c'est rendu dans les déficits.

.(16 h 30).

Le petit fascicule qui est ici, peu importe la façon qu'on comptabilise, là, ça se ramasse tout à la même place, dans la dette. Alors, c'est par la dette qu'on peut voir la situation financière du gouvernement. Puis, moi, je peux vous dire qu'en lisant ça ici, page par page, là, on peut pratiquement refaire le bilan. Le bilan du gouvernement n'est pas là-dedans, mais on peut le refaire, par exemple. Moi, je sais qu'au gouvernement, au 31 mars 2010, des chiffres non vérifiés évidemment, le gouvernement a des actifs pour à peu près 76,3 milliards. Il a des dettes, des dettes à court terme, si vous voulez, pour environ 21 milliards. Déficit cumulé: 106 milliards, qui est couvert par une mauvaise dette de 106 milliards, et puis le reste, 36 plus 17, sont des immobilisations, et tout ça... c'est-à-dire, c'est des dettes qui couvrent les immobilisations et les actifs financiers, il y en a pour à peu près 52 milliards, ce qui fait une dette totale de 160 milliards. Alors ça, c'est une chose.

Si on va quelques pages plus loin et on regarde pour l'année 2009-2010, c'est dans les chiffres du ministre des Finances, il prévoit finir avec un déficit de 4,2 milliards. Je signale que 2009-2010, c'est le budget qu'on regarde, là. Le projet de loi n° 64, c'est... Bon, on dit: Le déficit budgétaire va être de 4,2 milliards, mais il faut considérer certains petits redressements. Il faut considérer qu'Hydro-Québec, pour se rendre conforme aux normes comptables internationales, devra passer dans ses livres une radiation ou une dépense de 3,9 milliards. Hydro-Québec, possédée à 100 % par le gouvernement du Québec, donc c'est un placement du gouvernement du Québec... le gouvernement du Québec devrait comptabiliser une perte, sur placement, de 3,9 milliards, mettre ça dans ses dépenses, puis après ça ça s'en va dans sa mauvaise dette, si vous voulez, puis dans les déficits. Pourtant, dans le tableau ici, on voit que, si on comptabilisait ces éléments-là à la bonne place, le déficit 2009-2010 ne serait pas de 4 257 000 000 $, il serait de 8 169 000 000 $. On se rapproche peut-être un petit peu de ce qui se passe ailleurs, là, avec ces chiffres-là.
On va un petit peu plus loin. On se rend compte que la dette brute que je viens de parler est de 160 milliards. Ça veut dire 53,2 % du PIB. Et je vais aller tout de suite, M. le Président, à la page 30, et 31, du petit fascicule... page 31, où on se rend compte que, si on considère, le Québec, toutes ses dettes, là, secteur public, les dettes directes, et ainsi de suite - je parle du budget 2009-2010, M. le Président, je sais que vous venez d'arriver - le Québec, savez-vous qu'il y a juste quatre pays... qui est plus endetté que le Québec? C'est le Japon, l'Italie, la Grèce et l'Islande, puis le Québec vient en cinquième position avec 94,5 % du PIB. Tous les autres sont en bas. 32e, là, 32e moins pire, là, l'Estonie, 8,2 % du PIB. Par contre, l'Estonie est cotée par Moody's A-1, puis il est en régression, négatif. Le Québec, 94,5 %, est coté AA-2. AA-2, M. le Président, c'est la troisième cote, ce n'est pas la meilleure, là, ce n'est pas le AAA. Il est coté à la troisième. Standard & Poor's le cote à A plus. Ce n'est pas la meilleure, c'est la cinquième cote de Standard & Poor's. Et puis, Fitch, c'est AA moins. C'est la quatrième cote de cette entreprise-là. Alors, le Québec se comporte mieux qu'ailleurs.

Ensuite, si on regarde ces cotations-là, pourquoi ces cotations-là sont comme ça? C'est parce que... Puis c'est bien expliqué dans ça aussi, c'est que les cotes, c'est toujours évalué en fonction de la facilité d'un gouvernement de rembourser sa dette à long terme. Pourquoi le Québec est considéré comme étant... il est mieux coté que l'Estonie, qui est en 32e position à 8,2 % du PIB? C'est parce qu'au Québec il y a Hydro-Québec. Demain matin, le Québec vendrait Hydro-Québec, il pourrait payer ses dettes. Ce n'est pas recommandé, là, parce que c'est Hydro-Québec qui permet de garder la cotation. Puis, si on vendait Hydro-Québec, on paierait toutes nos dettes, mais je suis convaincu qu'après la vente, là, on serait décoté. On dirait: Comment ça se fait, ça, qu'on n'a plus de dette puis on est décoté? Puis là on a une grosse dette puis on est quand même assez bien coté.

Alors, c'est ça que ça veut dire, les cotes. Il ne faut pas trop se baser non plus seulement sur les cotes. Ce n'est pas parce que Moody's nous dit qu'on est à AA-2 ou qu'on est à AAA, peu importe, qu'on est meilleurs qu'ailleurs, c'est parce qu'on a Hydro-Québec. Il faut protéger Hydro-Québec. C'est parce qu'on a Hydro-Québec, puis on a les ressources au Québec aussi. C'est pour ça que le Québec est considéré comme étant capable, capable très favorablement de rembourser ses dettes à long terme.

Alors, tout ça pour vous dire, M. le Président, que, quand on nous dit, là, qu'au Québec on est mieux qu'ailleurs, on se comporte mieux qu'ailleurs, on a peut-être fait, en 2009-2010, mieux qu'ailleurs, là, pour cette année-là, mais c'est parce qu'on avait été pires dans les cinq, six années précédentes. Mais, quand on dit qu'on a 3,9 milliards de déficit à comptabiliser d'Hydro-Québec, peut-être qu'on n'est pas beaucoup mieux qu'ailleurs.

Pour toutes ces raisons, M. le Président, le budget 2009-2010, qui aura... dans la lignée de tout ce qui a été fait depuis 2003 par ce gouvernement et puis ce qu'il semble vouloir se continuer en 2010-2011, on est obligés d'être contre, contre ce gouvernement. Je vous remercie, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Chagnon): Merci, M. le député de Rimouski. Est-ce que j'ai un autre intervenant? M. le député de Mercier, nous vous écoutons.

M. Amir Khadir


M. Khadir: D'accord. Merci, M. le Président. C'est sûr que c'est le genre d'intervention qu'on ne s'attend pas de la part de... d'un projet de loi assez technique, surtout pour l'énoncé économique de janvier 2009 puis certaines autres annonces budgétaires, qui sont à l'avenant, mais je voudrais prendre cette opportunité simplement pour parler de certaines mesures qui illustrent tout le problème des deux poids, deux mesures, qui choque tellement la population qui, nous l'avons vu... Qu'on soit d'accord avec le budget ou pas, une chose qu'il faut constater, qu'il faut admettre, c'est que la population n'est pas d'accord. La population a reçu le budget comme une attaque, a été choquée par les éléments contenus dans le budget, des mesures qui lui sont... qui lui apparaissent... qui apparaissent à la population d'autant plus injustes qu'il y a une politique de deux poids, deux mesures, puis la série de dispositions législatives puis d'annonces que vient entériner ce projet de loi n° 64 illustre une partie de ça, et je m'explique.

Les centres financiers internationaux, hein... On voit dans les notes explicatives que la Loi sur les centres financiers internationaux est modifiée afin de considérer comme admissible une série de transactions financières. Je n'irai pas dans le détail, mais je voudrais simplement apporter à l'attention du ministre du Revenu à quel point le gouvernement du Québec a consenti des efforts pour attirer et développer le secteur financier, des efforts qui n'ont pas été consentis par nous, là, qui ont été consentis grâce à l'impôt prélevé dans les poches des contribuables. C'est des centaines de millions de dollars. Je n'ai pas tous les détails, mais c'est des chiffres relativement très importants. Or, de l'avis de tout le monde... je vous réfère, par exemple, à l'article de Sophie Cousineau du 17 mars dernier qui fait aussi allusion... en fait, qui commente le dossier de Stéphanie Grammond, le 15 mars, qui avait fait, dans La Presse des affaires, tout un dossier sur l'historique des actions du gouvernement du Québec pour attirer les centres financiers internationaux, la situation du Québec, la situation des centres financiers de Toronto, Vancouver, Montréal, notre classement, positionnement, etc., mais c'est tombé à plat, d'accord, plusieurs des initiatives se sont terminées en queue de poisson. Il suffit de rappeler NASDAQ, annoncé en grande pompe à Times Square, puis finalement, quatre ans plus tard, ils sont partis sur la pointe des pieds.

La Caisse de dépôt et placement du Québec a été largement sollicitée, mais... et lamentablement, malheureusement, échoué lorsqu'il a voulu bâtir une industrie québécoise de gestionnaires de fonds. Le souhait était correct, que les fonds des Québécois, de l'épargne des Québécois soient gérés à partir d'ici, mais on s'est aperçu que les avantages fiscaux qu'on consent au milieu financier, je vous rappelle les mots de Michel Chartrand, ils sont sans foi ni loi, ils sont apatrides. Littéralement, quand on regarde le dégât causé à l'économie américaine, aux emplois aux États-Unis, à l'épargne de millions d'épargnants à travers le monde, littéralement la culture, c'est une culture de banditisme, et ils en sont fiers et ils recommencent, et c'est systémique.

.(16 h 40).

Je vais, à une autre occasion, je ne l'ai pas avec moi, amener ici, en Chambre, le livre qui fait loi, qui fait référence... Galbraith, le fils de l'autre qui a conseillé le président Roosevelt lors du New Deal américain, d'accord, qui a permis le développement et le... Son fils, qui est professeur à Harvard, qui a conseillé Clinton, a écrit, en 1994, un livre lors d'une autre crise financière qu'on a connue en 1994, qui s'appelle La bulle... non, L'euphorie financière, où il décrit comment, depuis l'euphorie entourant la Bourse des tulipes, il y a quatre siècles en Hollande, cette institution-là, cette industrie-là est portée, est programmée pour continuellement générer des crises, enrichir quelques-uns au sommet, puis ruiner littéralement la vie de milliers d'épargnants, de milliers de gens qui sont allés là. Alors, il faut cesser de gaver cette industrie-là d'avantages indus.

Dans l'article de Sophie Cousineau, on dit: «Quant aux avantages fiscaux consentis par le Centre financier international de Montréal, ils subventionnent en bonne partie du déplacement d'emplois. Vrai, Montréal a convaincu Investissements Standard Life de déménager sa gestion des actions américaines d'Édimbourg à Montréal. Mais, sur les 115 entreprises admises au Centre financier international - qui jouit d'importants crédits d'impôt et d'avantages fiscaux accordés par le gouvernement - les deux tiers viennent du Québec ou d'ailleurs au [Canada].» D'accord? Donc, on y trouve des institutions financières qui n'ont pas besoin... qui sont déjà très, très... qui font des affaires, qui font du profit puis qui sont ici, comme Jarislowsky Fraser, Van Berkom associés, puis il y en a plusieurs autres, que je vous épargne.

Pire que ça, pire que tout ça, Maples and Calder, son siège social est aux îles Cayman, M. le Président. M. Dutil... je m'excuse, le ministre du Revenu, j'imagine, n'a pas une très bonne opinion des îles Cayman, pas plus, je crois, que le président Obama. Là, je prête des intentions au ministre du Revenu, j'en suis conscient, mais je suis persuadé qu'il ne me reprendra pas là-dessus. Les îles Cayman sont reconnues comme la pire des paradis fiscaux... le pire des paradis fiscaux. Aux îles Cayman, Maples and Calder permet à 18 000 de ses sociétés clientes de ne payer que 5 % d'impôt. La firme les a toutes enregistrées à sa propre adresse. Il y a 18 000 entreprises, qui sont programmées pour organiser la fuite de capitaux, la fuite en fait de leurs profits à l'abri de l'impôt, qui sont enregistrées chez Maples and Calder aux îles Cayman, ce qui faisait dire au président Obama lors de son discours, et j'implore la partie gouvernementale d'y accorder attention... la firme Calder était décrite par le président Obama comme le plus grand bâtiment au monde... ou la plus grande arnaque fiscale au monde. Ça, c'est le discours du président Barack Obama à propos de Maples et Calder.

Or, qu'est-ce qui arrive? La filiale de Maples et Calder ouvre un bureau à Montréal pour bénéficier des avantages fiscaux accordés par le ministre des Finances. Moi, je demande, M. le Président, au ministre du Revenu de me dire s'il est d'accord avec ça, que la plus grande arnaque au monde, selon les dires du président Obama, qui enregistre à son adresse 18 000 entreprises... Pourquoi cette firme-là doit venir à Montréal bénéficier d'avantages fiscaux qui vont coûter cher aux Québécois, alors qu'on demande aux Québécois et aux Québécoises de consentir des sacrifices dans le budget actuel? Pourquoi cette politique du deux poids, deux mesures?

Je rappelle, pour terminer, qu'au sommet du G20 à Londres en avril 2009, donc il y a un an, les dirigeants des 20 pays économiquement les plus avancés, les plus développés qui s'étaient réunis avaient demandé, au milieu de la crise financière, un document de travail à des experts pour permettre de saisir l'ampleur des paradis fiscaux rendus souvent possibles grâce au travail effectué par des entreprises de finance qui ne créent souvent pas de richesse, qui délocalisent des emplois, qui maximisent des opérations, je dirais, de spéculation pour faire mal à quelques investisseurs et pour engranger des profits. Ça ne crée pas de richesse sur l'ensemble, c'est une mauvaise économie, c'est une économie empoisonnée. Or, les paradis fiscaux sont justement l'instrument, je termine avec ça, grâce auquel ces entreprises peuvent cacher leurs profits de la fiscalité, de l'impôt légitime qu'en principe ils devraient payer comme tous les citoyens.

Or, l'OCDE... en fait, le groupe des G20... le document estimait que des 43 pays de l'OCDE étaient sortis, au total, 11 000 milliards de dollars dans les 84 législations ou paradis fiscaux existants. Comme les 43 pays de l'OCDE, selon mes calculs, ont 1 170 000 000 d'habitants, ça fait 10 000 $ par habitant, mais ce n'est évidemment pas mon père, ma mère ni le proche parent du ministre du Revenu, je suppose, d'accord, ou du ministre des Finances, c'est des riches Québécois, autrement dit, parce que, si vous faites le calcul, 10 000 $ par habitant pour le Québec, qui se situe bien au-dessus de la moyenne du PIB par habitant de ces 43 pays, ça fait 70 milliards de dollars, 70 milliards, je le répète, de dollars d'argent du Québec qui sont dans les paradis fiscaux. Pourquoi faut-il encore davantage leur accorder des avantages?

Le Vice-Président (M. Chagnon): Merci, M. le député de Mercier. Est-ce qu'il y a d'autres intervenants? S'il n'y a pas d'autre intervenant...

Une voix: ...

Le Vice-Président (M. Chagnon): Voulez-vous intervenir, M. le député de Verdun?

Une voix: ...

Le Vice-Président (M. Chagnon): Non. Alors, s'il n'y a pas d'autre intervenant, je vais vous demander si le principe du projet de loi n° 93, Loi modifiant la Loi électorale... Non. Je m'excuse.

Une voix: ...

Le Vice-Président (M. Chagnon): Et là, oui, j'ai cru comprendre que...

Une voix: ...


MISE AUX VOIX

Le Vice-Président (M. Chagnon): Je dois vous demander si le projet de loi n° 64, Loi donnant suite à l'énoncé économique du 14 janvier 2009, au discours sur le budget du 19 mars 2009 et à certains autres énoncés budgétaires, est adopté?

Des voix: Adopté.

Une voix: Sur division.

Le Vice-Président (M. Chagnon): Sur division, j'entends bien. Alors, les débats de séance sont terminés, mais j'ai l'impression que c'est ce que vous allez nous dire.

M. Gautrin: J'ai une motion à faire, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Chagnon): Une motion à nous faire? Alors, nous vous écoutons, M. le leader.


AJOURNEMENT


M. Gautrin: Alors, je vous remercie, M. le Président. Je fais motion pour ajourner nos travaux à mardi le 20 avril, à 13 h 45.

Le Vice-Président (M. Chagnon): Alors, compte tenu de l'heure et compte tenu de la motion, est-ce que la motion est adoptée?

Des voix: Adopté.

Le Vice-Président (M. Chagnon): Elle est adoptée avec plaisir. Alors, je vais ajourner les travaux à mardi le 20 avril, à 13 h 45.

(Fin de la séance à 16 h 47)