DOUTEUR ET UNE PAGE INTÉRESSANTE

jeudi 17 juin 2010

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GAÉTAN FRIGON ÉTAIT EN CONFLIT D'INTÉRÊTS À LA SAQ

LE PRÉSIDENT DE LOTO-QUÉBEC FORCÉ DE DÉMISSIONNER

L’INDICATEUR. SYNDICAT DES CROUPIERS DU CASINO DE MONTRÉAL
2003-02-14
http://sccm3939.com/modules/pages/index.php?id=16&langue=fr

Président de Loto-Québec depuis moins d'un an, Gaétan Frigon a été forcé de quitter son poste parce qu'il s'était placé en situation de conflit d'intérêts dans ses anciennes fonctions, à la barre de la Société des alcools (SAQ).

[La Presse->http://www.cyberpresse.ca]

Denis Lessard Président de Loto-Québec depuis moins d'un an, Gaétan Frigon a été forcé de quitter son poste parce qu'il s'était placé en situation de conflit d'intérêts dans ses anciennes fonctions, à la barre de la Société des alcools (SAQ).

Dans une longue lettre qu'il a fait parvenir hier à la ministre des Finances, Pauline Marois, M. Frigon explique son départ-surprise par les attaques récentes touchant son intégrité, des allégations qui, selon lui, ont «miné sa capacité à bien remplir ses fonctions à la tête de Loto-Québec».

Mais des sources sûres ont confié hier à La Presse que sa démission avait été, en pratique, exigée par le gouvernement.

En matinée hier à Québec, M. Frigon avait été convoqué par le sous-ministre aux Emplois supérieurs, Gilles Rosario Tremblay, qui avait terminé la vérification que lui avait demandée, fin janvier, la ministre des Finances, Pauline Marois. Corroboré par le ministère de la Justice -une procédure normale pour ce genre de vérification-, le verdict du mandarin Tremblay était formel:

M. Frigon, quand il était patron de la Société des alcools, s'était placé en situation de conflit d'intérêts en accordant un contrat sans appel d'offres, de 200 000 $, à la firme de publicité Scriptum, une entreprise qui lui devait personnellement 400 000 $.

Ce geste seul contrevenait au code de déontologie des hauts fonctionnaires; au surplus, M. Frigon n'avait jamais déclaré cette transaction au gouvernement.

L'autre allégation, la participation du Fonds de solidarité à Publipage, compagnie dont M. Frigon est propriétaire, ne contrevenait pas, semble-t-il, au code de déontologie des grands commis de l'État, explique-t-on.

La situation était tout au moins embarrassante car le Fonds de solidarité était en même temps le partenaire de la SAQ dans la Maison des Futailles.

Dans sa lettre, M. Frigon explique se retirer pour ne pas nuire à Loto-Québec, qui «ne mérite pas d'être éclaboussée par les allégations à son endroit».

Dans une formule soigneusement rédigée, il soutient être convaincu que «les vérifications en cours (...) démontreront que j'ai toujours agi de bonne foi, sans chercher d'aucune façon à tirer un profit personnel de mes fonctions».

Il semble que M. Frigon n'ait pas attendu qu'on lui demande formellement de tirer sa révérence; devant la présentation de M. Tremblay, il a vite dit qu'il jetait l'éponge.

Une fois rentré à Montréal en matinée, M. Frigon a rédigé sa lettre de démission, qui a été transmise au cabinet de Mme Marois.

La veille, cette dernière avait déjà eu un avant-goût des conclusions de l'enquête de M. Tremblay. Du côté libéral, le député Jacques Chagnon qui, depuis des mois, menait la charge contre le président de Loto-Québec, pavoisait. Mais comme l'adéquiste Marie Grégoire, critique de son parti en matière de finances, M. Chagnon a prévenu que ce départ ne dédouanait pas le gouvernement; ce dernier doit maintenant rendre publiques les conclusions de l'enquête sur le respect du code de déontologie.

«Ce n'est pas parce qu'il n'y a plus de corps qu'il n'y a plus de cause»,

a lancé M. Chagnon.

M. Frigon a soutenu publiquement ne pas savoir que la SAQ avait signé un contrat avec Scriptum.

Or, selon M. Chagnon, c'est M. Frigon qui avait lui-même signé les chèques pour payer les honoraires de cette firme.

D'autres sources indiquent que M. Frigon avait aussi signé le contrat liant la SAQ avec Scriptum.

Arrivé au secteur public en 1998, après une longue carrière dans le secteur de l'alimentation -chez Steinberg puis Métro-Richelieu-, M. Frigon a, dans sa déclaration publique, réglé ses compte hier avec l'administration publique.

Il a indiqué préférer

«le secteur privé où le processus décisionnel n'est pas ralenti par les contraintes inhérentes aux multiples règles en vigueur dans le secteur public...»

«Ma vision et mes actions ont toujours été axées sur les résultats avant tout»,

affirme-t-il dans sa lettre rendue publique, hier.

En commission parlementaire mardi, M. Frigon avait subi toute une dégelée.

Relevant des transactions passées où l'ancien président de la Société des alcools s'était mis, en apparence tout au moins, en conflit d'intérêts, la porte-parole libérale, Monique Jérome-Forget, avait soutenu que Loto-Québec, opérant dans le secteur délicat des jeux de hasard, était «le pire poulailler à confier au renard».

Lors de cette même réunion, M. Frigon avait appris avec surprise de la bouche de Pauline Marois que ses gestes avaient été aussi soumis au procureur général, pour obtenir son avis.

«Une formalité dès que ce genre de vérification est effectuée» a-t-on expliqué hier.

Pauline Marois avait défendu mollement M. Frigon, se limitant à dire qu'une commission parlementaire ne devait pas se transformer en tribunal.

L'an dernier, l'ancien président de la SAQ avait été nommé à la tête de Loto-Québec, un des postes les plus prestigieux et lucratifs de la fonction publique à l'instigation du chef de cabinet de Bernard Landry, Claude H. Roy, qui avait côtoyé M. Frigon à la SAQ.

Pour placer M. Frigon, on avait délogé un mandarin grosse pointure, Michel Crête, qui dirigeait depuis 10 ans la société d'État.

Il était au terme d'un second mandat de cinq ans.

Mme Marois aurait préféré nommer une amie, Francine La Haye, de National, qui avait longtemps siégé au conseil d'administration de Loto-Québec.

D'autres poussaient la candidature de Gilles Godbout, sous-ministre des Finances qui était passé à un cheveu d'obtenir la présidence de la Société des alcools -Claude Roquet, délogé d'Investissement Québec, avait dans un premier temps refusé la SAQ avant de se raviser.

En dépit des pots cassés en période préélectorale, a-t-on appris, Bernard Landry entend encore une fois choisir le patron de Loto-Québec.

Mais cette fois on cherche une nomination qui ferait consensus, du type de celle faite à la Caisse de dépôt et placement, où l'arrivée d'un Henri-Paul Rousseau avait obtenu une approbation unanime dans le milieu des affaires.

Depuis une semaine, M. Frigon s'était retrouvé sur la sellette pour avoir établi une nouvelle procédure d'acquisition d'oeuvres d'art à Loto-Québec, qui possédait déjà une des collections les mieux cotées au Canada.

La police de Montréal avait passé un coup de fil l'automne dernier à Loto-Québec pour prévenir la société que 26 oeuvres, payées 128 000 $ et acquises depuis septembre 2002, étaient sinon des faux, à tout le moins grossièrement surévaluées (on aurait payé jusqu'à 20 fois le prix du marché).

Or il est apparu que sous M. Frigon, le même processus douteux d'acquisition avait été mis en place à la Société des alcools.

M. Frigon a soutenu ne pas connaître l'intermédiaire Pierre Antoine Tremblay, maintes fois condamné, précisant même que c'était l'ancien chef de cabinet du premier ministre Landry, Claude H. Roy qui avait établi le contact avec ce réseau douteux.

Or, un ancien collaborateur de M. Landry, Raymond Bréard, a confié hier à La Presse que c'est M. Frigon, et non Claude H. Roy, qui avait proposé de «passer par M. Tremblay», les deux hommes ayant une connaissance commune, selon lui.

Adresse originale : (Dossier disparu depuis)

[http://www.cyberpresse.ca/politique/article/1,153,1925,022003,201302.shtml->http://www.cyberpresse.ca/politique/article/1,153,1925,022003,201302.shtml]