DOUTEUR ET UNE PAGE INTÉRESSANTE

vendredi 16 avril 2010

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La Vice-Présidente (Mme Houda-Pepin): (...) et je reconnais M. le député de Verdun, leader adjoint du gouvernement, pour un temps de parole de 13 minutes. M. le député.

M. Henri-François Gautrin

M. Gautrin: Je vous remercie, Mme la Présidente. Je commencerais par une phrase, de rappeler que savoir gouverner, savoir gouverner, Mme la Présidente, c'est parfois prendre des décisions, même si elles peuvent être impopulaires, le cas échéant.

À l'heure actuelle, le gouvernement du Parti libéral, lorsque l'indépendance de la justice... Lorsque des allégations ont mis en cause un des fondements mêmes de notre démocratie, qui est l'indépendance des juges et la manière dont les juges sont nommés, le premier ministre et le gouvernement n'ont pas tergiversé une seule minute. Les allégations qui ont été faites quant à la manière dont les juges auraient pu être nommés, les allégations au moment où on a prétendu que peut-être des effets extérieurs auraient pu entamer, entamer, Mme la Présidente, l'image d'impartialité des juges, le gouvernement n'a pas traîné. Ces allégations ont été faites lundi. Nous sommes aujourd'hui mercredi. Mercredi, Mme la Présidente, aujourd'hui, le gouvernement vient d'annoncer une commission publique d'enquête présidée par quelqu'un, et je pense qu'ici personne dans cette Chambre ne remettra en cause l'impartialité et la compétence, sur le plan juridique, du juge à la Cour suprême Michel Bastarache, qui a l'énorme qualité, Mme la Présidente, de n'avoir été nommé par aucun gouvernement, ni gouvernement du Parti québécois ni gouvernement du Parti libéral, parce qu'il vient d'une autre province, même s'il est né au Québec.

Et, Mme la Présidente, je pense qu'il n'y aura personne dans la société québécoise qui ira ici se lever pour remettre en doute l'impartialité du juge Bastarache.

Mme la Présidente, je voudrais rappeler aussi que le gouvernement a donné, lorsqu'on a tombé à une question aussi fondamentale... Le gouvernement n'a pas tergiversé lorsqu'on a soulevé une question aussi fondamentale que l'indépendance et la probité de certains juges. Le mandat a été le suivant, et je vais vous le lire, Mme la Présidente.

«Le mandat de la commission sera d'enquêter sur les allégations formulées par Me Bellemare concernant le processus de nomination des juges de la Cour suprême, de la Cour du Québec et au Tribunal administratif du Québec notamment au regard des allégations d'influence de tierces personnes dans ce processus, ainsi que le processus de nomination des juges des cours municipales et des membres du Tribunal administratif du Québec.

«La commission pourra éventuellement faire des recommandations.»

Je tiens à intervenir dans ce sens-là, Mme la Présidente, en rapport avec la proposition qui est devant nous, pour bien signaler que, lorsque des questions fondamentales, qui ne peuvent pas être traitées par d'autres cours ou d'autres éléments... le gouvernement ne tergiverse pas. En trois jours, après qu'on a mis en cause réellement un des piliers fondamentaux de notre démocratie, qui est l'indépendance du système judiciaire, nous n'avons pas tergiversé, et dès aujourd'hui le premier ministre, et la ministre de la Justice, et le leader du gouvernement ont annoncé la nomination d'une commission d'enquête.

Mme la Présidente, j'en reviens maintenant à la motion qui est devant nous. La motion qui est devant nous, nous allons voter contre et, je vais vous dire, pour trois raisons qui me semblent fondamentales. La première raison, c'est que le gouvernement, le gouvernement ne veut pas abdiquer en aucune manière ses responsabilités. Il ne serait question pour le gouvernement, et on l'a vu ici dans le cas qui est... que j'ai rappelé il y a un instant, c'est-à-dire celle de la commission qui a été nommée cet après-midi, s'il y a mandat à donner à une commission d'enquête, c'est la responsabilité du Conseil des ministres. C'est la responsabilité du Conseil des ministres, présidé par le premier ministre, de donner le mandat à une commission d'enquête, et jamais, parce que, même dans les périodes difficiles... nous n'abandonnerons cette responsabilité qui appartient à celui qui gouverne. Et celui qui gouverne aujourd'hui, Mme la Présidente, c'est le premier ministre, le député de Sherbrooke. Et, dans ce sens-là, Mme la Présidente, il n'est aucunement question que, si jamais on devait créer quelque commission d'enquête sur quelque sujet qu'il se soit, nous n'abandonnerions ce principe fondamental qui est celui que... qui est en partie au gouvernement de déterminer quel est le mandat et la composition éventuellement d'une commission d'enquête.

Pour ces raisons-là, et indépendamment, indépendamment, et je reconnais, et je... le même respect que ma collègue et amie la députée de Taschereau pour le Vérificateur général et j'ai le même respect aussi pour je juge Gomery, bien, Mme la Présidente, il me semble, à l'heure actuelle, que nous ne pourrions pas ici abandonner cette responsabilité qui est première à un gouvernement. Lorsqu'il constitue une commission publique d'enquête, il doit... il a... il est de sa responsabilité d'en déterminer le mandat et d'en... de déterminer la composition, et le nombre, et les rôles des commissaires, Mme la Présidente, comme nous l'avons très justement fait à l'heure actuelle dans, comme je vous l'ai rappelé, dans la commission qui est... qui va enquêter à l'heure actuelle sur les nominations des juges.

J'en reviens maintenant au deuxième point de la motion qui est devant nous, qui est le sujet qui est soulevé au sujet de la commission d'enquête. Elle est sujet sur deux sujets. J'imagine, quand il y a allégations, ils auraient probablement mis «allégations de quelque chose», bien, enfin, il y a une allitération, qu'ils ont oublié ici un mot. Enfin, «des allégations», ma collègue de Taschereau a fait état... «allégations de collusion, de corruption», enfin de choses différentes. Elle touche deux éléments. Je vais vous expliquer, Mme la Présidente, pourquoi à l'heure actuelle nous revenons. C'est un débat que nous avons déjà eu entre nous ici, qui a déjà fait objet d'un premier vote, qui a fait déjà l'objet d'une première discussion, d'un premier rejet par cette Assemblée, sur deux points.

•(16 h 40)•

On parle ici du financement du Parti libéral. Je pense qu'il n'y a pas eu de soulevé, à l'heure actuelle, de problème quant au financement du Parti libéral. Et, si tant est, Mme la Présidente, qu'il y a des questions qui sont soulevées par rapport au financement du Parti libéral, il existe... Et nous nous sommes dotés à la fois de la part de mon... C'était une motion, une volonté unanime de cette Chambre, aussi bien de la part de mes collègues du Parti québécois, des autres partis à l'époque et du Parti libéral, nous avons... nous nous sommes dotés d'une loi sur le financement des partis politiques. Et, dans le cadre de cette loi sur le financement des partis politiques, nous avons confié, confié, de part et d'autres, à un individu cette responsabilité, ce pouvoir, le pouvoir de faire enquête s'il y a dérogation ou si quelqu'un a des allégations de dérogation par rapport à la loi sur le financement des partis politiques.

Mme la Présidente, le Directeur général des élections a le pouvoir. De son propre chef, s'il pense qu'il y a une situation qui est anormale ou qu'il y a une dérogation par rapport à la loi, le Directeur général des élections peut, de son propre chef, enquêter sur le financement des partis politiques. Donc, Mme la Présidente, on n'a pas besoin, à l'heure actuelle... Et, si un tiers, Mme la Présidente, si un tiers pense aujourd'hui... et, si je comprends, puisqu'elle présente cette motion, ma collègue la députée de Taschereau, à l'heure actuelle, pense, à l'heure actuelle, qu'il y a des malversations, elle utilise même «de la corruption» dans le financement des partis politiques, il existe, à l'heure actuelle... et du Parti libéral, il existe, à l'heure actuelle, un organisme, un organisme qui a le pouvoir de faire enquête, qui a probablement éventuellement fait enquête et qui n'a jamais, actuellement, été en mesure de condamner ou de lever des doutes quant à la manière dont le financement se fait à l'intérieur de notre propre parti, c'est le Directeur général des élections.

Si tant est qu'elle a des doutes, si tant est qu'elle pense qu'il peut y avoir actuellement un risque, bon Dieu, qu'elle soulève des cas précis et qu'à ce moment-là le Directeur général des élections puisse utiliser le pouvoir, le pouvoir, madame, que, nous, Mme la Présidente, que, nous, les parlementaires, nous lui avons donné, le pouvoir de pouvoir faire enquête, enquête sur le financement des partis politiques et, dans ce sens-là et si jamais il pense qu'il y a quelque chose, d'en faire rapport public. Il l'a d'ailleurs fait lorsqu'il y a eu certains éléments sur le financement du Parti québécois et il a été en mesure de soulever, à ce moment-là, des interrogations dans certaines manières, activités de financement à l'intérieur du Parti québécois. Je n'ai pas l'intention aujourd'hui de commencer à débattre de ces questions-là. Nous avons, à l'heure actuelle, nous avons, à l'heure actuelle, Mme la Présidente, un organisme, le Directeur général des élections, faisons-lui confiance, faisons en mesure de voir, à l'heure actuelle... Si jamais il y a des questions qui sont soulevées, faisons en sorte que le Directeur général des élections puisse faire son travail.

Deuxième élément, Mme la Présidente, les questions de l'industrie de la construction. Mme la députée de Taschereau, pour laquelle j'ai beaucoup de respect et on travaille ensemble souvent à la Commission de l'administration publique, soulève parfois des interrogations, et le Vérificateur général a... s'est soulevé des interrogations sur certains contrats qui ont pu être donnés à l'intérieur du ministère des Transports. Je l'ai, moi-même, aussi remarqué à travers d'un travail de moine que j'ai pu faire à l'intérieur de cette commission. Mais, Mme la Présidente, nous avons agi. Nous avons agi parce que, s'il y a corruption, s'il y a collusion, il s'agit essentiellement d'un acte criminel, il s'agit d'un acte criminel, Mme la Présidente. Et qu'est-ce qu'a fait le gouvernement face à cet acte criminel? Il s'est doté d'une escouade spéciale à l'intérieur de la police, l'escouade Marteau, qui comprend des gens de la Sûreté du Québec, des gens des policiers, des polices municipales et de l'aide de la GRC, de faire en sorte de faire enquête, de faire la lumière, d'utiliser le potentiel énorme qu'on peut avoir sur ces gens qui ont l'habitude, la pratique de faire des enquêtes pour pouvoir... mais faire la lumière, faire la lumière dans ces cas.

Alors, commencer à mettre sur pied une commission publique d'enquête qui va prendre six mois pour essayer d'enquêter sur des actes, Mme la Présidente, et je reviens là-dessus, des allégations à caractère criminel... De la corruption, la collusion, c'est des actes criminels, à l'heure actuelle. Et les actes criminels, Mme la Présidente, dans notre système, actuellement, relèvent principalement de la police, de la police. Et, dans ce sens-là, nous avons créé cette escouade Marteau, qui commence d'ailleurs, et vous l'avez vu, les quelques arrestations qui commencent à se faire, la manière dont l'escouade Marteau, qui a été mise sur pied par mon collègue le député de Saint-Laurent et ministre de la Sécurité publique, l'escouade Marteau est en train de commencer à donner des résultats.

Alors, Mme la Présidente, pourquoi, pourquoi on va donc voter contre cette motion? Pour toutes ces raisons, et je vais les résumer rapidement: parce que, un, au début, nous, comme gouvernement responsable, nous voulons maintenir à l'heure actuelle le principe que c'est le gouvernement qui détermine tous les mandats des commissions publiques d'enquête; deuxièmement, pour le principe que le DGE peut faire enquête sur toutes les allégations de malversation dans les financements des partis politiques; et, troisièmement, parce que, lorsqu'il y a actuellement un danger, nous avons confiance dans l'escouade Marteau.

La Vice-Présidente (Mme Houda-Pepin): Je vous remercie, M. le député de Verdun. Y a-t-il...

Une voix: ...

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JOURNAL DES DÉBATS DE L'ASSEMBLÉE NATIONALE

39e législature, 1re session
(début : 13 janvier 2009)

Le mercredi 14 avril 2010
http://www.assnat.qc.ca/fr/travaux-parlementaires/assemblee-nationale/39-1/journal-debats/20100414/14735.html

- Vol. 41 N° 104