DOUTEUR ET UNE PAGE INTÉRESSANTE

vendredi 16 avril 2010

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Le Vice-Président (M. Gendron): (...) Et je cède maintenant la parole pour la poursuite du débat sur le discours du budget, en rappelant qu'il vous reste, à l'opposition officielle, 23 minutes, à la députée de Marguerite-D'Youville pour son intervention. Mme la députée, à vous la parole.

Mme Monique Richard

Mme Richard (Marguerite-D'Youville): Merci, M. le Président. Nous débattons actuellement d'un budget libéral qui fait réagir, d'un budget libéral de plus en plus contesté et de plus en plus remis en question, d'un budget libéral qui alimente les discussions dans les lignes ouvertes, d'un budget libéral qui mobilise. Parlons de la mobilisation à Montréal, parlons de la manifestation à Québec, parlons des manifestations au Saguenay—Lac-Saint-Jean, et ce n'est pas terminé.

Pourquoi? Parce que les Québécoises et les Québécois sont convaincus que ce que nous propose le budget actuellement ne donne pas la juste mesure à leurs attentes et à leurs aspirations. Ce budget ne donne pas l'heure juste. Ce budget ne donne aucune garantie quant au 60 % assumé par le gouvernement dans l'assainissement des finances publiques. Ils sont cependant convaincus, M. le Président, que le 30 % qui leur est demandé par des hausses de tarifs, par des taxes, les contribuables le fourniront, bien sûr.

Ce que les Québécoises et les Québécois veulent, c'est un gouvernement qui gère, un gouvernement qui gouverne de manière transparente, de manière franche, de manière respectueuse des choix et des valeurs de la population québécoise, de manière juste. Ce que l'on nous propose actuellement par ce budget, c'est le flou, c'est la tromperie, c'est les privilèges. Nous ne nous opposons pas à l'évolution du modèle québécois. Ce à quoi nous nous opposons actuellement fermement, c'est au modèle libéral.

Mais qu'en est-il de ce fameux modèle libéral? Je vais vous le présenter. C'est un modèle qui a deux faces, une première qu'on a connue il y a 13... 16 mois, lors de la campagne électorale. Le premier ministre nous disait à ce moment-là: Pas de déficit, pas de hausse de taxes, pas de hausse de tarifs et surtout pas de problème à la Caisse de dépôt et de placement, on vous donnera les chiffres un peu plus tard, et des interventions qui ridiculisaient joyeusement les interventions faites par les représentantes et représentants du Parti québécois durant cette campagne électorale. On nous disait... On disait à la chef du parti qu'elle ne savait pas compter, qu'elle ne connaissait pas l'enjeu des finances publiques.

La deuxième face maintenant, qui prouve que nous avions raison de poser des questions à ce moment-là. Aujourd'hui, ce à quoi nous sommes confrontés: une hausse de tarifs de 1 300 $ pour les familles moyennes, la famille moyenne québécoise. Et, si on évalue que, la famille moyenne, son revenu est autour de 60 000 $, qu'en est-il des familles qui gagnent 30 000 $, 35 000 $?

Un contrôle des dépenses incertain. Et, quand on dit «incertain», je vous dirai, M. le Président, qu'on est très polis, parce qu'on doit constater que les années précédentes sont témoins d'un manque d'à-propos absolument constant de la part du gouvernement libéral. Pour preuve: au 31 mars 2009, la croissance réelle a été de 6,8 %, quand elle était prévue de 3 %. En 2008, elle était prévue à 2,7 %; réellement, elle a été de 6 %. Alors, quelles sont les garanties données au peuple québécois, aux citoyens et aux citoyennes, à l'effet que le 60 % devant être assumé par le gouvernement le sera réellement.

Constatons également ce qui se passe à la SAAQ. On a entendu aujourd'hui les coûts, ça a été soulevé par un collègue tout à l'heure. Les sociétés d'État qui se sont empressées de réagir après la lecture du budget pour dire que les bonus, c'était absolument important dans la gestion de la rémunération de leurs cadres.

On constate également un endettement accru, même s'il ne devait pas y avoir d'accroissement de la dette, comme jamais. Un an: 11 milliards; deux ans, 20 milliards. Qui peut faire mieux?

Des mesures inadmissibles. Je prends particulièrement la taxe en santé, le ticket modérateur. Taxer la maladie, comme propose le gouvernement actuellement, c'est inviter les gens, surtout les familles et les personnes à revenus modestes, à négliger leur santé. En bout de ligne, un ticket modérateur de 25 $ par visite médicale coûtera plus cher à tout le monde. Ça coûtera plus cher de soigner des gens plus malades qui auront repoussé leur consultation. Ça coûtera plus cher parce qu'on aura des professionnels épuisés dans un réseau de santé encore plus malmené. La taxe fixée à 200 $ par personne est hautement inéquitable puisqu'elle s'applique à tous, peu importent leurs revenus. Voilà pourquoi nous combattrons sans relâche ces deux mesures injustes et carrément indécentes, et la population est à nos côtés sur cette question.

Aucune solution pour les services en santé. La situation des infirmières qui s'expatrient dans d'autres pays, qui vont voir des agences, les journaux en parlent à peu près quotidiennement, même s'il y a une petite relâche actuellement, puisqu'il y a d'autres problèmes, bien sûr, tout aussi importants, mais je pense qu'il y a là aussi un problème très important dans le cadre de ce budget, où on ne prévoit pas les moyens nécessaires au réseau de la santé d'assumer les obligations qu'il aura à affronter.

En éducation, je vous dirai que je vois ça comme un mauvais film. On ne couvre même pas les coûts de système. Qu'en sera-t-il des besoins pour les enfants en difficulté d'adaptation et d'apprentissage qu'on décrit depuis nombre d'années, avec lesquels les enseignantes et les enseignants doivent conjuguer à tous les jours dans des classes avec un nombre d'élèves hautement trop élevé pour être en mesure de donner des services adéquats et d'éviter le décrochage?

Et, si on parle du décrochage, quand on n'est même pas capable d'assurer qu'on assumera les coûts de système, comment peut-on venir nous gargariser de discours où on dit qu'on mène sans relâche une lutte au décrochage sans avoir aucunement, dans ce budget, prévu les moyens de nos ambitions? Encore une fois, on sacrifiera des jeunes et, dans je ne sais pas combien d'années, on parlera encore d'un problème de décrochage au Québec, sans parler d'un 8 milliards qui est toujours laissé à Ottawa et pour lequel on ne fait même pas de démarche énergique quant à la capacité d'aller chercher ces argents.

Ce gouvernement qui voulait avoir les deux mains sur le volant n'amène aucune mesure non plus pour la création de la richesse collective. Ce qui nous est proposé, c'est un budget... c'est le budget le plus régressif et le plus idéologique que le Québec n'aura jamais eu à subir, un budget qui épargne les mieux nantis et les entreprises, tout en siphonnant encore plus la classe moyenne. Et c'est sans compter qu'il n'y a à peu près rien pour l'éducation, comme je le disais, pour les garderies, pour l'environnement, des domaines qu'il faut absolument soutenir si l'on veut créer de la richesse durable. Merci, M. le Président.

•(16 heures)•

Le Vice-Président (M. Gendron): Alors, je vous remercie, Mme la députée, de votre intervention.

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JOURNAL DES DÉBATS DE L'ASSEMBLÉE NATIONALE

39e législature, 1re session
(début : 13 janvier 2009)

Le mercredi 14 avril 2010
http://www.assnat.qc.ca/fr/travaux-parlementaires/assemblee-nationale/39-1/journal-debats/20100414/14735.html

- Vol. 41 N° 104