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dimanche 2 août 2009

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EXPLOSION

Encyclopédie Universalis
http://www.universalis-edu.com/article2.php?napp=27935&nref=T903216

René NOTO, médecin-colonel, anesthésiste-réanima-teur, chargé de l'enseignement de la médecine d'urgence et de la médecine de catastrophe au Service de Santé des armées.

Le traumatisme par effet de souffle ou blast injury des auteurs anglo-saxons, bien individualisé cliniquement depuis la Seconde Guerre mondiale, regroupe l'ensemble des lésions et des troubles constatés chez des patients soumis aux effets d'une explosion.

Ces lésions sont provoquées par l'onde de pression qui suit l'explosion et qui se propage dans l'atmosphère (blast aérien), dans l'eau (blast liquidien) ou dans les solides (blast solide) ; le blast aérien étant le plus fréquent.

Décrits initialement comme une pathologie de temps de guerre, les traumatismes par effets de souffle sont devenus relativement fréquents en médecine d'urgence quotidienne. Ils sont liés aux risques technologiques en milieu de travail, mais aussi aux différents accidents domestiques ; il peut s'agir d'explosions de liquides inflammables, de gaz comprimés, d'appareils sous pression ; depuis quelques années, la multiplication des attentats par engins explosifs a permis de retrouver des aspects lésionnels décrits initialement lors des conflits armés.

Ces explosions surviennent dans un contexte topographique très varié : espaces clos ou ouverts, avec des charges explosives très diverses. Cela explique le caractère individuel ou collectif de l'accident, la gravité variable des lésions d'un sujet à l'autre pour une même explosion, la fréquence des autres lésions associées : lésions mécaniques (plaies, fractures...) liées à la projection des différents matériaux qui réalise souvent le polycriblage, les lésions thermiques (brûlures) et éventuellement des atteintes toxiques dues à l'inhalation des gaz issus de l'explosion.

La gravité des lésions de blast, comme des lésions associées, est en grande partie liée aux caractères physiques de l'onde de choc et de sa propagation. En fait il faut considérer :

la durée de l'onde de choc qui varie suivant le lieu où se produit l'explosion ; pour une même puissance explosive, les effets sont plus importants dans un local fermé que dans un espace ouvert (réflexion de l'onde de choc) ;

la distance qui sépare les victimes de l'épicentre de l'explosion, les variations de pression s'atténuant avec la distance ;

l'éventuelle protection mécanique qui peut être assurée par la position du corps (incidence par rapport à la surface absorbante), la nature physique des surfaces de protection (vêtements, écrans protecteurs, etc.).

Cela explique qu'à la suite d'une explosion les équipes de secours puissent avoir à prendre en charge des victimes de gravité différente, présentant soit un blast isolé, soit un blast intriqué à d'autres lésions ; c'est dans ces conditions qu'a été décrite une nouvelle forme d'agression : le brûlé, blasté, blessé (B.B.B.).

De même, suivant les régions atteintes on constatera un blast crânien (commotion cérébrale avec troubles de conscience plus ou moins accentués), un blast abdominal avec des lésions intra-abdominales (lésions spléniques, hépatiques, éclatements des organes creux : intestin, estomac), un blast oculaire avec des lésions des différentes structures anatomiques de l'œil (troubles de la vue uni- et bilatérale...).

Les blasts auditifs et pulmonaires sont de loin les atteintes les plus fréquentes.

Le blast auditif est une atteinte localisée qui se manifeste avec une certaine latence après l'explosion par des acouphènes, des vertiges, des douleurs auriculaires ; la constatation de ces signes, même discrets, est un bon « marqueur » d'un traumatisme général par effet de souffle et doit entraîner un examen otoscopique.

Le blast pulmonaire, dont le pronostic peut être vital, évolue en deux phases : la phase initiale - en l'absence de lésions associées - est le plus souvent cliniquement muette ; après une période de sidération neuro-psychique liée aux bruits, à la lueur, à l'onde de choc, aux réactions émotives, succède une phase neutre où le sujet véritablement euphorique, « rescapé », répugne à tout bilan et encore plus à toute idée d'hospitalisation.

C'est donc secondairement, avec une latence de quelques minutes à plusieurs heures, que la scène clinique se détériore et évolue vers une détresse ventilatoire pouvant entraîner la mort malgré la réanimation entreprise.

Il est donc indispensable que les secours médicaux puissent intervenir sur place pour prendre en charge toute personne soumise aux effets d'une explosion et prendre des mesures conservatoires immédiates :

repos strict et examen clinique rigoureux (pulmonaire, auditif) pour déceler tout stigmate d'atteinte ;

hospitalisation pour surveillance de 24 à 48 heures pour les formes simples et les sujets apparemment indemnes ;

mise en route d'un traitement symptomatique pour les formes plus sévères ; traitement qui sera poursuivi en service de réanimation.