TENDANCES DE L’ORIENT »
RETOUR AUX ANCIENNES MÉTHODES COLONIALES
par Pierre Khalaf
Chercheur au Centre d’Etudes Stratégiques Arabes et Internationales de Beyrouth.
11 juillet 2011
Beyrouth (Liban)
http://www.voltairenet.org/Retour-aux-anciennes-methodes
En dépit de la catastrophe et de « l’impasse stratégique », provoquées par l’invasion de l’Irak et de l’Afghanistan, les politiques états-unienne et européennes au Proche-Orient reflètent une détermination à revenir aux méthodes coloniales anciennes.
Avec le déclenchement des révolutions dans le Monde arabe, l’Occident a saisi une occasion pour tenter d’améliorer son image laminée dans la région.
Il est ensuite passé à la contre-attaque, en procédant à une honteuse transaction : la Libye contre Bahreïn.
En d’autres termes, il a fermé les yeux et couvert politiquement et diplomatiquement l’écrasement de la révolution dans le petit royaume du Golfe, en contrepartie du silence arabe complet sur l’intervention de l’Otan en Libye,
où des milliers de personnes sont mortes en quatre mois, tandis que le conflit semble sans issue, avec un pays divisés et détruit.
[On a attiré l'attention des médias vers certains endroits plutôt que d'autres et ces derniers, bien obéisssants, on focalisé l'attention de tous vers les endroits désignés. Sans mise en contexte. Bien sûr. Tous les pays du Moyen-Orient sont des dictatures - y compris Israël- seul le nom change tandis que la forme varie. La dictature étant l'état presque naturel des relations du pouvoir envoir le peuple depuis des millénaires. Et, encore à notre époque, sur les presque 200 pays du monde. On attirera donc notre attention sur certains états plutôt que d'autres qui disparaîtront (pour, peut-être, réapparaître un jour). Si on n'en parle pas, il n'existe pas. Ainsi on peut faire «disparaître» des millions de personnes. En tirer certaines population du chapeau de magicien. Il ne suffira pas de la faire apparaître, il faudra la nommer. On désignait à une certaine époque certains états comme «autoritaires» et d'autre comme «soumis à une dictature». Les premiers dépendant de l'URSS, les autres étant les créatures des USA. Donc supposées bonnes. Quoique imparfaites. Les premières étant simplement diaboliques. Nous sommes dans les choses simples et les mots courts. Avec le temps, les mots changent. Un pays peut massacrer sa population ou sa minorité comme les Tamouls, on en parle brièvement et plus du tout. Si certaines minorités de la Chine sont supposément maltraitées: Tibet, Oygours, on fait les gros yeux à la Chine et on implore sa clémence sans oser aller plus loin. Par contre, de tous les pays du Moyen Orient, on choisira certains plutôt que d'autres. Depuis la Tunisie et l'Égypte, la révolte population (que l'on n'appellera pas «révolution» terme honni il y a peu.). On ne dira pas non plus «rebelle» «rébellion» «insurgés». Termes réservés aux Talibans en Afghanistan et au Pakistan. Ces mots désignent de mauvaises choses. La réaction des autorités devant les grouillements populaires est généralement de faire tirer dans la foule. Ce qui était, il y a peu, une bonne chose. Car toute personne qui se révoltait était, il y a un peu plus longtemps, désigné comme «révolutionnaire» donc adepte du culte de Moscou, donc âme damnée. Il n'y a pas si longtemps, on l'a désigné come «terroriste». Ce qui est mal. Et, tout récemment, encore un changement de vocabulaire. Maintenant, c'était un manifestant pacifique réclament des droits, la démocratie. On a sans doute pensé conseiller au gouvernement Tunisien et Égyptien de tirer dans la foule et si ça ne suffisait pas de tirer encore plus. Par exemple, à partir d'un hélicoptère Apache à la mitrailleuse lourde. Mais la population locale des «démocratie» s'étant prise de sympathie pour les manifestants pacifiques avant qu'on puisse grâce au média la retourner, on décida d'appuyer cette cause noble. Les mêmes pays n'hésitant pas à faire matraquer leurs propres manifestants pacifiques au besoin. Le pouvoir Tunisien et Égyptien étant emporté, on essaya de calmer le jeu. Les autres états où se répandait cette contagion démocratique firent tirer dans leur foule pour les calmer. Et on évita d'en parler. Puisqu'on y était pourquoi ne pas se servir de ces initiatives populaires pour compléter le grand plan de l'époque Bush: remodeler le Moyen-Orient. Si on évita d'attirer l'attention sur les «bons» gouvernements (ce qui restait de nos alliés) qui tirait sur les foules, on désigna certains autres comme particulièrement mauvais et menaçants. En commençant par le plus petit: la Lybie. Il y avait là aussi des manifestants qui manifestaient mais pas assez nombreux pour produire les résultats que l'on voulait. On décida donc de les armer. Si les manifestants pacifiques et sans armes face au pouvoir pas pacifique du tout et très armés nous avaient rendu sympathiques les Tunisiens, il fallut un temps avant de savoir doser l'info pour que les télespectateurs comprennent qu'il ne s'agissait plus seulement de manifestants pacifiques sans défense douloureusement réprimé mais de protestataires armées, de combattants de la liberté face à une dictature. Les combattants de la liberté voulant bien sûr instaurer un état de droit. Personne ne leur a demandé mais c'était sans doute leur intention. On oublia le fait qu'il n'y pas si longtemps, une telle attitude aurait été vu comme une guerre civile, du terrorisme, avec Ben Laden caché pas loin. Comme ce n'était pas assez pour la Libye, le nombre des mécontents n'était pas assez élevé sans doute, on prit les grands moyens. Les États occidentaux décidèrent de détruire le pays avec leurs avions pour laisser toute la place au futur gouvernement de «transition». Transition avant les inévitables, probables élections. Si on abattu le gouvernement Lybien, on se prépare avec les mêmes mots, les mêmes idées, les mêmes moyens à jeter à terre les gouvernements Syrien et Iraniens. Avec les meilleures intentions du monde. Ces États sont plus puissants donc plus dangereux mais l'idée est si tentant. Les derniers ennemis d'Israël et des USA dans la région disparaitraient. Avec une partie de la population. Mais on s'en fout. Si, encore une fois, l'attention est portée sur les adeptes du renouveau Libyen, on ne parle pas des morts qu'ils font, de la population des civils bombardée. Des morts utiles. Comme dirait certains. Ou comme le dirait certains généraux cuisiniers: on ne fait pas d'omelettes sans casser des oeufs. Que ceux-ci soit la fille, la femme ou le mère de quelqu'un n'a aucune importance. C'est être à la mauvaise place au mauvais moment. Comme dans un accident de la route. Ce sont des choses qui arrive. Il y a sans doute d'autres choses à dire mais on fatigue.]
SI L’ACTION DE L’OTAN EN LIBYE EST DICTÉE PAR DES CONSIDÉRATIONS PÉTROLIÈRES,
EN SYRIE, ELLE L’EST PAR LE SOUCI DE PROTÉGER LES INTÉRÊTS D’ISRAËL
En Égypte, l’Occident pratique le chantage économique et la coercition politique dans le but de contraindre le nouveau pouvoir à ne pas lever le blocus de Gaza et à se soumettre, totalement, aux impératifs sécuritaires israéliens.
Enfin, la complicité des pays européens à faire avorter le projet de la Flottille pour la liberté 2, en empêchant les navires de prendre le large ou de se regrouper dans les ports méditerranéens, fait tomber le masque des intentions réelles de l’Occident.
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LA TENDANCE EN SYRIE
FERMETÉ ET RÉFORMES, FACE AUX INGÉRENCES ÉTRANGÈRES
Face aux ingérences étrangères, notamment occidentales, qui prennent des formes de plus en plus outrageuses, la Syrie œuvre sur deux fronts :
lutter contre les groupes extrémistes armés qui sèment la terreur dans certaines villes.
Et aller de l’avant dans le processus de démocratisation et de modernisation du pays.
Sur le premier plan, le ministère des Affaires étrangères a convoqué, dimanche, les ambassadeurs des États-Unis et de France à Damas, Robert Ford et Éric Chevallier, pour exprimer « sa forte objection » pour leur visite, jeudi et vendredi dans la ville de Hama, sans autorisation préalable, ce qui constitue une violation flagrante de la convention de Vienne.
Ils se sont rendus dans cette ville, un bastion des Frères musulmans, pour inciter les gens à manifester contre le pouvoir central.
Sur le second plan, la rencontre du dialogue national s’est ouverte dimanche, pour examiner le mécanisme des réformes décidées par le président Bachar el-Assad.
Ces réformes comprennent, entre autres, la révision de la Constitution, y compris l’article 8 instaurant le monopole du pouvoir pour le parti Baas, en prévision de la rédaction d’une nouvelle loi fondamentale ;
l’adoption d’une loi sur le multipartisme, assurant un climat propice à des élections législatives basées sur le pluralisme politique ; l’élaboration d’une nouvelle loi sur les médias, garantissant la liberté d’expression selon les normes internationalement reconnues ; la préparation d’une nouvelle loi électorale moderne, offrant la meilleure représentation populaire ; la rédaction d’une nouvelle loi sur les collectivités locales, accordant plus de pouvoir et d’autonomie aux conseils municipaux et aux gouverneurs des provinces.
Autant de principes que le vice-président syrien, Farouk Chareh, a réaffirmé dans son allocution inaugurale
Une centaine de personnalités indépendantes et proches du régime, ou opposantes ont pris part à cette réunion. Parmi les opposants qui étaient présents figure le célèbre intellectuel Al-Tayyeb Tizini. D’autres, comme Michel Kilo, Aref Dalila, Luay Hussein et Fayez Sarah, ont décliné l’invitation, refusant tout dialogue avant le retrait de l’armée des villes.
Mais leur exigence parait irréaliste à un moment où des mouvements islamistes intégristes, composés de courants au sein des Frères musulmans et de groupes takfiristes d’obédience salafiste et wahhabite, exacerbent les dissensions confessionnelles et alimentent les haines sectaires, à travers un discours venu du Moyen-âge, véhiculé par des médias audiovisuels au financement occulte.
Tel est notamment le cas du cheikh salafiste Adnane al-Arhour, à travers sa chaine de télévision satellitaire al-Wissal, basée en Arabie saoudite.
Ces mouvements rejettent le principe même du dialogue et semblent vouloir plonger la Syrie dans une guerre civile interreligieuse.
Pour cela, ils n’ont pas hésité à recourir à la violence armée contre les forces de sécurité, mais aussi contre les manifestants pacifiques, dans le but de faire couler le sang afin d’instituer une spirale de violence.
Pendant des semaines, les médias occidentaux ont complètement occulté l’apparition de groupes armés,
bien que 400 militaires aient été tués et 1 300 autres blessés depuis le début des troubles, le 15 mars.
Il a fallu que l’AFP publie des images d’insurgés armés, non loin de la frontière syro-turque, et que l’agence de presse états-unienne UPI rapporte des nouvelles sur des attaques contre les forces de sécurité, pour que l’opinion publique commence à réaliser que l’image qu’elle recevait sur les événements de Syrie était partiale et partielle.
Le plus éloquent reste, cependant, le reportage publié par le Sunday Times, le 18 mai, sur la région de Maarrat el-Nahman, où son reporter a vu de ses propres yeux les groupes armés en pleine activité pendant les manifestations pacifiques.
Cette opposition violente mène une intense campagne politique et médiatique contre le régime syrien dans les capitales occidentales, et plaide pour une intervention militaire de l’Otan en Syrie.
C’était en substance l’objectif des opposants syriens réunis par Bernard-Henri Lévy à St-Germain-des-Près, à Paris.
[Le ministre des Affaires Étrangères autoproclamé de la France. (Et d'Israël)]
Cette attitude irresponsable ignore le fait que toute guerre contre la Syrie risquerait de déborder et de provoquer un embrasement généralisé de la situation au Proche-Orient, dont les conséquences seraient incalculables.
De plus, le démembrement de l’État syrien, comme cela s’est produit en Irak à cause de l’invasion US, offrira aux groupes intégristes affiliés à Al-Qaïda, une nouvelle « Terre de Jihad », aux frontières de l’Europe.
Le terrorisme islamique aura une chance inespérée pour se régénérer, en présentant une éventuelle attaque de l’Otan contre la Syrie comme une Croisade des temps modernes contre « Dar el-Islam », la terre de l’Islam.
L’affaiblissement du pouvoir central en Syrie et l’émergence d’une mouvance islamiste radicale et active constitue un danger direct pour les deux millions de chrétiens syriens.
Conscient de cette réalité indiscutable, le Vatican a réagi avec beaucoup de prudence à l’égard des événements en Syrie.
Le pape et d’autres prélats de l’Église romaine ont exprimé à plusieurs reprises leur profonde inquiétude. Dans une homélie prononcée le 16 mai, le pape Benoît XVI a dit :
« Ma pensée va à la Syrie, où il est urgent de rétablir une coexistence basée sur la concorde et l’unité. Je demande à Dieu qu’il n’y ait pas de nouvelle effusion de sang dans cette Patrie des grandes religions et des grandes civilisations ».
Benoît XVI a souhaité le retour à la paix intérieure en Syrie où les chrétiens sont une minorité bien intégrée.
C’est l’une des plus anciennes communautés chrétiennes du Proche et du Moyen-Orient.
De son côté, le nouveau patriarche maronite, Mgr Béchara Raï, a affirmé que le projet du nouveau Moyen-Orient vise à diviser le monde arabe en entités confessionnelles et sectaires.
Lors d’une conférence prononcée au Vatican, fin juin, le prélat a exprimé sa crainte au cas où des « régimes radicaux arrivaient au pouvoir dans les pays de la région ».
Pour sa part, le père Paul Karam, directeur des Œuvres pontificales missionnaires au Liban, a déclaré que les minorités chrétiennes de Syrie courent un grave risque « si le régime de Bachar el-Assad venait à tomber. En effet, on pourrait voir se répéter ce qui s’est passé en Irak après la chute de Saddam Hussein ».
Pour le père Karam, au vu de la croissance du fondamentalisme sunnite et du fanatisme, si le cadre politique devait radicalement changer, il est possible que les chrétiens deviennent une cible.
Il est donc urgent de poser la question de l’avenir des communautés chrétiennes en Syrie et dans les pays qui vivent le « Printemps arabe ».
Au vu de toutes ces réalités, il est étonnant que des pays européens continuent d’avoir une attitude irrationnelle, voire suicidaire, à l’égard de la crise en Syrie.
L’intérêt de l’Europe n’est-il pas d’avoir à ses frontières une République démocratique et civile, stable et pacifiée, plutôt qu’un pays déchiré par la guerre civile, et devenu un foyer d’exportation du terrorisme islamique ?
[Les USA se foutent des population. Comme l'a déjà dit un des leurs penseurs: comment se fait-il que «notre» pétrole se touve sous «votre» sable. Cette injustice historique doit être réparé. Tant qu'il reste encore du pétrole. Ainsi, on interviendra si nécessaire dans certains pays pour «sécuriser» les champs pétroliers avec forts, fortins, bases laissant le reste du sable au bédouins locaux. On sécurisera aussi les ports et les aéroports. Que le reste de la population ruinée s'égorge pour les dieux païens qu'elle voudra. On s'en crisse.]
[Et les intérêts de la Russie et de la Chine ne sont aucunement de voir tout le Moyen-Orient redevenu colonie de l'Occident avec mainmise sur le pétrole. Nous verrons donc bientôt les moyens qu'ils utiliseront dans ce but.]
[C'est un monde Darwinien où règne la loi de jungle qui n'est pas une «loi» mais simplement l'action du plus fort sur le plus faible. La raison du plus vicieux. Du plus cruel. Les femmes connaissent très bien cette «loi» qui, en ce qui les concerne, s'appelle depuis toujours la loi du viol. Celui qui gagne, peu importe les moyens prend tout. Tout le reste n'est que des mots vides à l'usage des ignorants naïfs. Ceux qui sont trop loin pour sentir les coups.]