vendredi 20 novembre 2009
1445. LA TRAVERSE DE LÉVIS (SUITE)
BEN LADEN, T'ES FICHTREMENT FICHU
Gagné, Jean-Simon
18 novembre 2009
Le Soleil
Huit ans après les attentats du 11 septembre 2001, le gouvernement fédéral et la Société des traversiers passent à l'attaque. Ben Laden n'a qu'à bien se tenir!
Au cours des prochaines semaines, une barrière antiterroriste de quatre mètres de hauteur sera érigée le long des quais utilisés par les traversiers à Québec, à Lévis, à Sorel et à Tadoussac.
Et pas n'importe quelle barrière, j'aime autant vous le dire! Hérissée de pointes de métal, la structure ne détonnerait pas sur la ligne de démarcation qui sépare les deux Corées ennemies. À moins qu'on ait récupéré les surplus de l'enclos des raptosaures, dans le Parc Jurassique.
À Québec, la future barrière achèvera de déguiser les abords de la traverse vers Lévis, déjà hypotéqués par un odieux mur de béton et par un bric-à-brac de verrières pseudo-futuristes bon marché.
À deux pas de la place Royale et du quartier du Petit-Champlain, nul doute que cette clôture digne d'un minicamp retranché produira le meilleur effet.
[Et le maire Labaume qui vient d'engagner monsieur Clotaire Rapaille pour revamper l'image de la ville de Québec!]
Pour compléter l'ambiance dans le secteur, on pourrait peut-être ajouter un mirador.
Ou faire résonner une sirène d'alarme à intervalles réguliers pour maintenir tout le monde sur le qui-vive.
Qu'on se le dise. Quelque part au Waziristan ou en enfer, Oussama ben Laden et ses potes d'Al-Qaida courent un grave danger. Celui de mourir de rire. Tout ça, dans l'hypothèse très improbable où ils apprendraient l'existence de nos barrières antiterroristes.
Car au moment même où l'on s'apprête à barricader les quais des traversiers, un très faible pourcentage des navires qui naviguent sur le Saint-Laurent font l'objet d'une inspection.
Dans le port de Montréal, entre le 1er avril 2007 et le 31 mars 2008, environ 600 000 conteneurs provenant de l'étranger ont été entreposés sur les quais. À peine 4 % auraient été inspectés...
Contruire une barrière antiterroriste à la traverse Québec-Lévis? Dans le contexte, ça revient à installer quatre verrous sur chaque fenêtre de la maison, tout en laissant la porte d'entrée grande ouverte.
Ne souriez pas. Et poussons les choses jusqu'à l'absurde. Si un terroriste est assez fou - ou s'il a suffisamment de temps à perdre - pour vouloir faire exploser un traversier à Québec, pourquoi se donnerait-il le mal de bondir dedans à partir d'un quai? Il lui suffit de monter à bord, au volant d'une voiture bourrée d'explosifs. Personne ne le fouillera, de toute façon.
Du calme. Et acceptons de voir la réalité en face, à la manière de cet humoriste américain, qui disait : "Des gardes armés de mitraillettes patrouillent les aéroports du pays, vêtus d'habits de camouflage. Mais ça n'a pas réussi à faire diminuer la criminalité sur les lieux. Loin de là. La preuve, on demande encore quatre dollars pour une tablette de chocolat."
En 2005, le magazine The Atlantic avait demandé à Richard Clarke, l'ancien responsable de la lutte contre le terrorisme à la Maison-Blanche, d'imaginer une deuxième vague d'attentats contre les États-Unis.
Comme un météorologue dessinant la tempête du siècle, Clarke avait fait preuve d'un enthousiasme délirant.
Il avait imaginé une campagne d'attentats à la bombe et d'attaques suicides. D'abord contre les grands centres commerciaux. Puis les casinos. En l'espace de quelques semaines, l'économie plongeait dans le chaos.
"Un scénario pessimiste, concédait-il. Mais pas le pire."
Clarke était le premier à concéder que bon nombre de mesures antiterroristes servent d'abord à impressionner la population.
Selon lui, les gouvernements n'aiment pas admettre qu'ils ne peuvent pas tout prévoir. Surtout, ils détestent qu'on leur répète que les gadgets antiterroristes ne remplacent jamais une politique étrangère intelligente.
"Soyons positifs, et constatons que nous avons évité le pire jusqu'ici, disait David Letterman. Imaginez seulement que les paranos de la lutte antiterroriste à travers le monde aient décidé d'imputer le réchauffement climatique à des terroristes. Ils auraient été capables d'expédier 20 000 soldats sur le soleil pour effectuer une attaque préventive..."
À moins qu'ils n'aient eu l'idée d'y ériger une barrière.
Gagné, Jean-Simon
18 novembre 2009
Le Soleil
Huit ans après les attentats du 11 septembre 2001, le gouvernement fédéral et la Société des traversiers passent à l'attaque. Ben Laden n'a qu'à bien se tenir!
Au cours des prochaines semaines, une barrière antiterroriste de quatre mètres de hauteur sera érigée le long des quais utilisés par les traversiers à Québec, à Lévis, à Sorel et à Tadoussac.
Et pas n'importe quelle barrière, j'aime autant vous le dire! Hérissée de pointes de métal, la structure ne détonnerait pas sur la ligne de démarcation qui sépare les deux Corées ennemies. À moins qu'on ait récupéré les surplus de l'enclos des raptosaures, dans le Parc Jurassique.
À Québec, la future barrière achèvera de déguiser les abords de la traverse vers Lévis, déjà hypotéqués par un odieux mur de béton et par un bric-à-brac de verrières pseudo-futuristes bon marché.
À deux pas de la place Royale et du quartier du Petit-Champlain, nul doute que cette clôture digne d'un minicamp retranché produira le meilleur effet.
[Et le maire Labaume qui vient d'engagner monsieur Clotaire Rapaille pour revamper l'image de la ville de Québec!]
Pour compléter l'ambiance dans le secteur, on pourrait peut-être ajouter un mirador.
Ou faire résonner une sirène d'alarme à intervalles réguliers pour maintenir tout le monde sur le qui-vive.
Qu'on se le dise. Quelque part au Waziristan ou en enfer, Oussama ben Laden et ses potes d'Al-Qaida courent un grave danger. Celui de mourir de rire. Tout ça, dans l'hypothèse très improbable où ils apprendraient l'existence de nos barrières antiterroristes.
Car au moment même où l'on s'apprête à barricader les quais des traversiers, un très faible pourcentage des navires qui naviguent sur le Saint-Laurent font l'objet d'une inspection.
Dans le port de Montréal, entre le 1er avril 2007 et le 31 mars 2008, environ 600 000 conteneurs provenant de l'étranger ont été entreposés sur les quais. À peine 4 % auraient été inspectés...
Contruire une barrière antiterroriste à la traverse Québec-Lévis? Dans le contexte, ça revient à installer quatre verrous sur chaque fenêtre de la maison, tout en laissant la porte d'entrée grande ouverte.
Ne souriez pas. Et poussons les choses jusqu'à l'absurde. Si un terroriste est assez fou - ou s'il a suffisamment de temps à perdre - pour vouloir faire exploser un traversier à Québec, pourquoi se donnerait-il le mal de bondir dedans à partir d'un quai? Il lui suffit de monter à bord, au volant d'une voiture bourrée d'explosifs. Personne ne le fouillera, de toute façon.
Du calme. Et acceptons de voir la réalité en face, à la manière de cet humoriste américain, qui disait : "Des gardes armés de mitraillettes patrouillent les aéroports du pays, vêtus d'habits de camouflage. Mais ça n'a pas réussi à faire diminuer la criminalité sur les lieux. Loin de là. La preuve, on demande encore quatre dollars pour une tablette de chocolat."
En 2005, le magazine The Atlantic avait demandé à Richard Clarke, l'ancien responsable de la lutte contre le terrorisme à la Maison-Blanche, d'imaginer une deuxième vague d'attentats contre les États-Unis.
Comme un météorologue dessinant la tempête du siècle, Clarke avait fait preuve d'un enthousiasme délirant.
Il avait imaginé une campagne d'attentats à la bombe et d'attaques suicides. D'abord contre les grands centres commerciaux. Puis les casinos. En l'espace de quelques semaines, l'économie plongeait dans le chaos.
"Un scénario pessimiste, concédait-il. Mais pas le pire."
Clarke était le premier à concéder que bon nombre de mesures antiterroristes servent d'abord à impressionner la population.
Selon lui, les gouvernements n'aiment pas admettre qu'ils ne peuvent pas tout prévoir. Surtout, ils détestent qu'on leur répète que les gadgets antiterroristes ne remplacent jamais une politique étrangère intelligente.
"Soyons positifs, et constatons que nous avons évité le pire jusqu'ici, disait David Letterman. Imaginez seulement que les paranos de la lutte antiterroriste à travers le monde aient décidé d'imputer le réchauffement climatique à des terroristes. Ils auraient été capables d'expédier 20 000 soldats sur le soleil pour effectuer une attaque préventive..."
À moins qu'ils n'aient eu l'idée d'y ériger une barrière.