mardi 28 avril 2009
370
L’AUTRE SCANDALE
Joseph Facal
http://www.josephfacal.org/lautre-scandale/
2 mars 2009
Le désastre survenu à la Caisse de dépôt ne devrait pas nous faire oublier un autre immense gâchis : la construction projetée des deux méga-hôpitaux dans le centre-ville de Montréal à un coût minimal de près de 4 milliards de dollars.
Le projet anglophone recevra la moitié de cet argent alors qu’un médecin sur deux formé à McGill quitte le Québec, et qu’on y forme 4 fois moins de médecins pratiquant au Québec que du côté francophone. Question évidemment taboue chez tous ceux, libéraux comme péquistes, qui furent associés à cette décision.
Du côté francophone, on ne sait tellement plus par quel bout prendre ce naufrage qu’on en a oublié le plus vieux principe de gestion au monde : quand vous êtes dans un trou, arrêtez de creuser.
La décision de construire sur le site de l’actuel hôpital St-Luc est une gigantesque erreur : il n’y a pas assez de place, et il est beaucoup plus coûteux de réparer du vieux que de construire du neuf. Tous ceux qui suivent l’affaire de près le savent parfaitement.
Mais on continue comme si de rien n’était. Et ceux qui défendent le projet en public le font parce qu’ils se sentent obligés de le faire. Mais ils disent le contraire en privé.
Phénomène fascinant, non ? Comment un projet absurde peut-il avancer alors que chaque individu sait pertinemment que cela n’a aucun bon sens ?
Prenez les membres du gouvernement et ceux de l’équipe de direction du projet. Tous des gens supérieurement intelligents et lucides.
Chacun d’entre eux sait que c’est fou, mais se dit que le premier à l’admettre fera perdre la face au groupe. Il se tait, et le train fou continue d’avancer vers le gouffre.
Chacun sait que c’est fou, mais il se tait pour ne pas donner de munitions aux opposants. Et la folie se perpétue.
Chacun sait que c’est fou, mais il espère que quelqu’un d’autre finira par siffler l’arrêt du train. Mais comme chacun se dit cela, la folie se perpétue.
Chacun sait que c’est fou, mais comme le projet prendra encore des années, tous se disent que ceux qui viendront après eux se débrouilleront. Et la folie se perpétue.
Chacun sait que c’est fou, mais il se dit que le premier à l’admettre publiquement se fera varloper par les autres, qui savent, dans leur for intérieur, que le premier a raison. Et la folie se perpétue.
Toute l’affaire est folle, mais certains se laissent enivrer par les défis techniques du projet et perdent de vue l’absurdité de la situation globale. Rappelez-vous du célèbre film Le pont de la rivière Kwaï : le général britannique dirige inflexiblement ses propres soldats prisonniers des Japonais dans la construction d’un pont… qui servira à ses ennemis.
Bref, cette dynamique du silence et des petites lâchetés individuelles, absurde mais qui s’explique rationnellement, fait que de gens qui, individuellement, sont intelligents et lucides, accouchent collectivement d’un monstre auquel personne ne croit.
Je vous le dis : ce naufrage va nous hanter encore plus longtemps que la Caisse de dépôt.
Joseph Facal
http://www.josephfacal.org/lautre-scandale/
2 mars 2009
Le désastre survenu à la Caisse de dépôt ne devrait pas nous faire oublier un autre immense gâchis : la construction projetée des deux méga-hôpitaux dans le centre-ville de Montréal à un coût minimal de près de 4 milliards de dollars.
Le projet anglophone recevra la moitié de cet argent alors qu’un médecin sur deux formé à McGill quitte le Québec, et qu’on y forme 4 fois moins de médecins pratiquant au Québec que du côté francophone. Question évidemment taboue chez tous ceux, libéraux comme péquistes, qui furent associés à cette décision.
Du côté francophone, on ne sait tellement plus par quel bout prendre ce naufrage qu’on en a oublié le plus vieux principe de gestion au monde : quand vous êtes dans un trou, arrêtez de creuser.
La décision de construire sur le site de l’actuel hôpital St-Luc est une gigantesque erreur : il n’y a pas assez de place, et il est beaucoup plus coûteux de réparer du vieux que de construire du neuf. Tous ceux qui suivent l’affaire de près le savent parfaitement.
Mais on continue comme si de rien n’était. Et ceux qui défendent le projet en public le font parce qu’ils se sentent obligés de le faire. Mais ils disent le contraire en privé.
Phénomène fascinant, non ? Comment un projet absurde peut-il avancer alors que chaque individu sait pertinemment que cela n’a aucun bon sens ?
Prenez les membres du gouvernement et ceux de l’équipe de direction du projet. Tous des gens supérieurement intelligents et lucides.
Chacun d’entre eux sait que c’est fou, mais se dit que le premier à l’admettre fera perdre la face au groupe. Il se tait, et le train fou continue d’avancer vers le gouffre.
Chacun sait que c’est fou, mais il se tait pour ne pas donner de munitions aux opposants. Et la folie se perpétue.
Chacun sait que c’est fou, mais il espère que quelqu’un d’autre finira par siffler l’arrêt du train. Mais comme chacun se dit cela, la folie se perpétue.
Chacun sait que c’est fou, mais comme le projet prendra encore des années, tous se disent que ceux qui viendront après eux se débrouilleront. Et la folie se perpétue.
Chacun sait que c’est fou, mais il se dit que le premier à l’admettre publiquement se fera varloper par les autres, qui savent, dans leur for intérieur, que le premier a raison. Et la folie se perpétue.
Toute l’affaire est folle, mais certains se laissent enivrer par les défis techniques du projet et perdent de vue l’absurdité de la situation globale. Rappelez-vous du célèbre film Le pont de la rivière Kwaï : le général britannique dirige inflexiblement ses propres soldats prisonniers des Japonais dans la construction d’un pont… qui servira à ses ennemis.
Bref, cette dynamique du silence et des petites lâchetés individuelles, absurde mais qui s’explique rationnellement, fait que de gens qui, individuellement, sont intelligents et lucides, accouchent collectivement d’un monstre auquel personne ne croit.
Je vous le dis : ce naufrage va nous hanter encore plus longtemps que la Caisse de dépôt.