jeudi 1 octobre 2009
1019. LES MAÎTRES DU MONDE
Ce fut à l’Empire, contre toute prévision, que Winston Churchill prononça son premier discours. Cela se passait le 3 novembre 1894. Il défendait la prostitution.
Mrs. Ormiston Chant, qui menait une croisade contre le vice, observait ce théâtre avec désapprobation depuis un certain temps. Comme celle de la plupart des music-halls, la direction avait construit un promenoir le long du bar des messieurs, et c’était là, tandis que les habitués vidaient leurs verres, que d’élégantes catins déambulaient, décrivant leurs spécialités et confiant leurs tarifs en aparté. (…) Winston n’était pas au nombre de leurs clients. Comme beaucoup de ses condisciples, il sublimait ses passions sexuelles et idéalisait les femmes . Il avait le béguin pour Mabel Love, une artiste du Lyric, et à sa demande écrite, elle lui avait envoyé une photographie dédicacée; mais ses sentiments étaient d’une chasteté exemplaire. Les cadets de son groupe faisaient régulièrement la tournée de tous les grands music-halls de Londres cependant, et il fut piqué au vif en apprenant que sur l’insistance de Mrs. Chant, une «barricade» avait été dressée entre l’Empire et son promenoir. Hostile d’instinct à toute autorité, il décida de ne pas laisser passer cela. Après 3 brouillons, il rédigea un discours qui, affirmerait Churchill adulte, «était un sérieux exposé de droit constitutionnel sur les libertés fondamentales des citoyens britanniques; sur les dangers que présentait l’ingérence de l’État dans les distractions d’honnêtes sujets de Sa Majesté; sur les nombreuses et pénibles conséquences qu’entraîne inévitablement une répression qui n’est pas soutenue par la partie saine de l’opinion publique». Apprenant par le Daily Telegraph que des partisans des courtisanes étaient en train de former une «Ligue de protection des distractions» pour défendre leur déshonneur, il résolut de ses joindre à eux. Ils devaient se réunir dans un hôtel miteux de Londres. Lorsqu’il arriva en cab, il découvrit qu’ils n’étaient que 2 membres, lui compris. Le fondateur de la ligue lui dit tristement : «C’est très difficile de faire quoi que ce soit pour les gens en Angleterre, aujourd’hui, il s sont sans réaction. Je ne sais pas ce qui est arrivé au pays : on dirait que les gens ont perdu courage.»
Winston jugea qu’il fallait que quelqu’un prît la défense de la liberté. (…) 3 jours plus tard, il rassembla des camarades en leur proposant d’aller s’amuser, et les emmena à l’Empire. Là, il découvrit que la fameuse «barricade» n’était qu’un écran de toile monté sur châssis. Il était venu, prêt à fomenter une émeute. Tous les éléments étaient réunis. Les hommes qui se trouvaient au bar se rangèrent à leurs côté pour déclarer que cette barrière était une honte. Un lourd silence tomba, annonciateur d’orage. Un homme passa sa canne à travers la toile. Un cadet la bouscula. Un autre lança un coup de pied , et l’écran bougea. En un clin d’œil la foule, soudain excitée et furieuse , se précipita sur le frêle obstacle et le mit en pièces. Au milieu du tumulte, Winston cria : «Dames de l’Empire! Je défends la Liberté.» (…) Winston était enflammé par la victoire. Bondissant sur une chaise – son texte révisé en main- il s’exclama : « Où le Londonien trouve-t-il toujours un accueil chaleureux? Où se rend-il lorsque, marqué par la guerre et épuisé par les voyages, il atteint sa terre natale? Qui est toujours présente pour l’accueillir d’un sourire et boire un verre avec lui? Qui est toujours fidèle, toujours loyale? Les dames du promenoir de l’Empire!
Winston Churchill. 1. Rêve de gloire : 1874-1931. William Manchester. P. 177
Mrs. Ormiston Chant, qui menait une croisade contre le vice, observait ce théâtre avec désapprobation depuis un certain temps. Comme celle de la plupart des music-halls, la direction avait construit un promenoir le long du bar des messieurs, et c’était là, tandis que les habitués vidaient leurs verres, que d’élégantes catins déambulaient, décrivant leurs spécialités et confiant leurs tarifs en aparté. (…) Winston n’était pas au nombre de leurs clients. Comme beaucoup de ses condisciples, il sublimait ses passions sexuelles et idéalisait les femmes . Il avait le béguin pour Mabel Love, une artiste du Lyric, et à sa demande écrite, elle lui avait envoyé une photographie dédicacée; mais ses sentiments étaient d’une chasteté exemplaire. Les cadets de son groupe faisaient régulièrement la tournée de tous les grands music-halls de Londres cependant, et il fut piqué au vif en apprenant que sur l’insistance de Mrs. Chant, une «barricade» avait été dressée entre l’Empire et son promenoir. Hostile d’instinct à toute autorité, il décida de ne pas laisser passer cela. Après 3 brouillons, il rédigea un discours qui, affirmerait Churchill adulte, «était un sérieux exposé de droit constitutionnel sur les libertés fondamentales des citoyens britanniques; sur les dangers que présentait l’ingérence de l’État dans les distractions d’honnêtes sujets de Sa Majesté; sur les nombreuses et pénibles conséquences qu’entraîne inévitablement une répression qui n’est pas soutenue par la partie saine de l’opinion publique». Apprenant par le Daily Telegraph que des partisans des courtisanes étaient en train de former une «Ligue de protection des distractions» pour défendre leur déshonneur, il résolut de ses joindre à eux. Ils devaient se réunir dans un hôtel miteux de Londres. Lorsqu’il arriva en cab, il découvrit qu’ils n’étaient que 2 membres, lui compris. Le fondateur de la ligue lui dit tristement : «C’est très difficile de faire quoi que ce soit pour les gens en Angleterre, aujourd’hui, il s sont sans réaction. Je ne sais pas ce qui est arrivé au pays : on dirait que les gens ont perdu courage.»
Winston jugea qu’il fallait que quelqu’un prît la défense de la liberté. (…) 3 jours plus tard, il rassembla des camarades en leur proposant d’aller s’amuser, et les emmena à l’Empire. Là, il découvrit que la fameuse «barricade» n’était qu’un écran de toile monté sur châssis. Il était venu, prêt à fomenter une émeute. Tous les éléments étaient réunis. Les hommes qui se trouvaient au bar se rangèrent à leurs côté pour déclarer que cette barrière était une honte. Un lourd silence tomba, annonciateur d’orage. Un homme passa sa canne à travers la toile. Un cadet la bouscula. Un autre lança un coup de pied , et l’écran bougea. En un clin d’œil la foule, soudain excitée et furieuse , se précipita sur le frêle obstacle et le mit en pièces. Au milieu du tumulte, Winston cria : «Dames de l’Empire! Je défends la Liberté.» (…) Winston était enflammé par la victoire. Bondissant sur une chaise – son texte révisé en main- il s’exclama : « Où le Londonien trouve-t-il toujours un accueil chaleureux? Où se rend-il lorsque, marqué par la guerre et épuisé par les voyages, il atteint sa terre natale? Qui est toujours présente pour l’accueillir d’un sourire et boire un verre avec lui? Qui est toujours fidèle, toujours loyale? Les dames du promenoir de l’Empire!
Winston Churchill. 1. Rêve de gloire : 1874-1931. William Manchester. P. 177