vendredi 5 mars 2010
3033
FEU LA LIBERTÉ D'EXPRESSION?
Alain Gravel,
Animateur de l’émission Enquête
3 mars 2010
http://www.radio-canada.ca/nouvelles/carnets/2010/03/03/128176.shtml?auteur=2097
J'ai toujours beaucoup d'admiration pour les gens qui ont le courage d'exprimer haut et fort leurs points de vue sur la place publique pour dénoncer des injustices, alors qu'ils s'exposent à des représailles.
Il y en a qui le font, même en sachant les risques qu'ils encourent. Congédiement, poursuites judiciaires ou, dans le pire des cas, se faire « casser les deux jambes ».
Je constate aussi que les gens craignent de plus en plus de témoigner, même lorsqu'on leur garantit l'anonymat, tellement ils ont peur.
C'est à se demander si la liberté d'expression existe toujours dans notre belle société démocratique.
Je sais, c'est gros comme affirmation. Vous direz que j'exagère, mais c'est ma réalité quotidienne comme journaliste d'enquête d'essuyer des refus de témoignage parce que les gens ont peur des représailles.
Bien sûr, on peut toujours exercer notre liberté de manifester dans la rue pour de grands enjeux. Bien sûr, aussi, tout le monde peut s'exprimer librement entre amis ou entre membres d'une même famille, dans le confort du foyer, loin des regards indiscrets. Il n'y a quand même pas d'espions du KGB ou de la Stasi qui se cachent dans les placards.
DÉNONCER SON EMPLOYEUR
Sur la place publique, toutefois, lorsque notre prise de parole est significative et peut porter à conséquence, sommes-nous aussi libres que nous le croyons? On peut dire n'importe quoi sur n'importe qui tant que ce n'est pas significatif.
Mais trouvez-moi quelqu'un qui va oser dénoncer librement et publiquement l'entreprise qui l'embauche. Même sur des faits qui sont réels. Il n'aura même pas le temps de finir ce qu'il a à dire qu'il sera congédié sur-le-champ.
Même les employés syndiqués sont extrêmement limités dans leur liberté d'expression. C'est à se demander si notre devoir de loyauté à notre employeur prévaut sur la liberté d'expression. C'est connu : « On ne mord pas la main qui nous nourrit! »
Pourtant, s'il y a un endroit où la liberté d'expression devrait être absolue, c'est bien dans nos milieux de travail.
D'une part, parce qu'on y passe au moins le tiers de notre vie. Mais aussi parce que c'est souvent là que les grands enjeux qui nous concernent se dessinent. Et c'est là aussi que les intérêts se manifestent.
Quand on supprime des services à la population, dans les hôpitaux par exemple. Quand on tourne les coins ronds sur des travaux publics où la sécurité est en cause. Quand il y a des magouilles qui auront pour conséquence le vol de l'argent des contribuables, des clients ou des actionnaires.
C'est bien beau avoir les chartes des droits et libertés, mais à quoi servent-elles si les gens craignent de parler librement?
Au-delà du droit, il y a la vie de tous les jours. Celle où les gens qui possèdent des moyens financiers importants peuvent museler ceux dont les propos dérangent.
Des « Claude Robinson », ça ne court pas les rues!
Vivons-nous dans une démocratie de façade?
Alain Gravel,
Animateur de l’émission Enquête
3 mars 2010
http://www.radio-canada.ca/nouvelles/carnets/2010/03/03/128176.shtml?auteur=2097
J'ai toujours beaucoup d'admiration pour les gens qui ont le courage d'exprimer haut et fort leurs points de vue sur la place publique pour dénoncer des injustices, alors qu'ils s'exposent à des représailles.
Il y en a qui le font, même en sachant les risques qu'ils encourent. Congédiement, poursuites judiciaires ou, dans le pire des cas, se faire « casser les deux jambes ».
Je constate aussi que les gens craignent de plus en plus de témoigner, même lorsqu'on leur garantit l'anonymat, tellement ils ont peur.
C'est à se demander si la liberté d'expression existe toujours dans notre belle société démocratique.
Je sais, c'est gros comme affirmation. Vous direz que j'exagère, mais c'est ma réalité quotidienne comme journaliste d'enquête d'essuyer des refus de témoignage parce que les gens ont peur des représailles.
Bien sûr, on peut toujours exercer notre liberté de manifester dans la rue pour de grands enjeux. Bien sûr, aussi, tout le monde peut s'exprimer librement entre amis ou entre membres d'une même famille, dans le confort du foyer, loin des regards indiscrets. Il n'y a quand même pas d'espions du KGB ou de la Stasi qui se cachent dans les placards.
DÉNONCER SON EMPLOYEUR
Sur la place publique, toutefois, lorsque notre prise de parole est significative et peut porter à conséquence, sommes-nous aussi libres que nous le croyons? On peut dire n'importe quoi sur n'importe qui tant que ce n'est pas significatif.
Mais trouvez-moi quelqu'un qui va oser dénoncer librement et publiquement l'entreprise qui l'embauche. Même sur des faits qui sont réels. Il n'aura même pas le temps de finir ce qu'il a à dire qu'il sera congédié sur-le-champ.
Même les employés syndiqués sont extrêmement limités dans leur liberté d'expression. C'est à se demander si notre devoir de loyauté à notre employeur prévaut sur la liberté d'expression. C'est connu : « On ne mord pas la main qui nous nourrit! »
Pourtant, s'il y a un endroit où la liberté d'expression devrait être absolue, c'est bien dans nos milieux de travail.
D'une part, parce qu'on y passe au moins le tiers de notre vie. Mais aussi parce que c'est souvent là que les grands enjeux qui nous concernent se dessinent. Et c'est là aussi que les intérêts se manifestent.
Quand on supprime des services à la population, dans les hôpitaux par exemple. Quand on tourne les coins ronds sur des travaux publics où la sécurité est en cause. Quand il y a des magouilles qui auront pour conséquence le vol de l'argent des contribuables, des clients ou des actionnaires.
C'est bien beau avoir les chartes des droits et libertés, mais à quoi servent-elles si les gens craignent de parler librement?
Au-delà du droit, il y a la vie de tous les jours. Celle où les gens qui possèdent des moyens financiers importants peuvent museler ceux dont les propos dérangent.
Des « Claude Robinson », ça ne court pas les rues!
Vivons-nous dans une démocratie de façade?