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UN JOUR LES MUTANTS GOUVERNERONT LE MONDE - CE NE SERA PROBABLEMENT PAS PIRE QU'EN CE MOMENT

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LES MUTANTS EXTERMINERONT OU NON LES HUMAINS - ET NOUS TRAITERONS PROBABLEMENT AUSSI BIEN QU'ON SE TRAITE NOUS-MÊMES ENTRE NOUS - ET PROBABLEMENT AUSSI BIEN QUE L'ON TRAITE LA NATURE ET TOUT CE QUI VIT

samedi 6 mars 2010

3070. SUR L'ILLUSION DE LA RÉALITÉ ET LA PLUS GRANDE ILLUSION ENCORE DE SA «REPRÉSENTATION».

LA TENTATION DE (SAINT) FLAUBERT

Paul Valery

http://www.croire-et-vivre.fr/annexe/155_NP12_La-tentation-de-(saint)-Flaubert.html

J'AVOUE un faible pour La Tentation de saint Antoine. Pourquoi ne pas déclarer tout d'abord que ni Salammbô, ni la Bovary ne m'ont jamais séduit, l'une à son imagerie érudite, atroce et somptueuse, l'autre à sa « vérité » de médiocrité minutieusement reconstituée ?

Flaubert, avec son temps, croyait à la valeur du « document historique » et à l'observation du présent toute crue. Mais c'étaient là de vaines idoles.

Le seul réel dans l'art, c'est l'art.

Le plus honnête homme du monde, et le plus respectable des artistes, mais sans trop de grâce ni de profondeur dans l'esprit, Flaubert fut sans défense contre la formule si simple que propose le Réalisme et contre l'autorité naïve qui veut se fonder sur d'immenses lectures et la « critique des textes ».

Ce Réalisme à la mode de 1850 distinguait fort mal entre l'observation précise à la manière des savants et la constatation brute et sans choix des choses, selon la vision commune ; il les confondait, et sa politique les opposait identiquement à la passion d'embellir et d'exagérer qu'il dénonçait et condamnait dans le Romantisme.

Mais l'observation « scientifique » exige des opérations définies qui puissent transformer les phénomènes en produits intellectuels utilisables :

il s'agit de changer les choses en nombres et les nombres en lois.

La Littérature, au contraire, qui vise à des effets immédiats et instantanés, veut un tout autre « vrai », un vrai pour tous, qui ne peut donc s'éloigner de la vision de tous, de ce que sait exprimer le langage ordinaire.

Mais le langage ordinaire est dans la bouche de tous et la vision commune des choses est sans valeur, comme l'air que tous respirent, cependant que l'ambition essentielle de l'écrivain est nécessairement de se distinguer.

Cette opposition entre le dogme même du Réalisme – l'attention au banal – et la volonté d'exister en tant qu'exception et personnalité précieuse eut pour effet d'exciter les réalistes au soin et aux recherches du style.

Ils créèrent le style artiste.

Ils employèrent à décrire les objets les plus ordinaires, parfois les plus vils, des raffinements, des égards, un travail, une vertu assez admirables ; mais sans s'apercevoir qu'ils entreprenaient par là hors de leur principe, et qu'ils inventaient un autre « vrai », une vérité de leur fabrication, toute fantastique.

Ils plaçaient, en effet, des personnages des plus vulgaires, incapables de s'intéresser aux couleurs, de jouir des formes des choses, dans des milieux dont la description avait exigé un œil de peintre, une émotivité d'individu sensible à tout ce qui échappe à un homme quelconque.

Ces paysans, ces petits bourgeois vivaient donc et s'agitaient dans un monde qu'ils étaient aussi incapables de voir que l'est l'illettré de déchiffrer une écriture.

S'ils parlaient, leurs niaiseries et leurs propos clichés s'inséraient dans le système étudié d'un langage rare, rythmé, pesé mot par mot, et qui sentait ce respect de lui-même et ce souci d'être remarqué.

Le Réalisme aboutissait curieusement à donner l'impression de l'artifice le plus voulu.

Une de ses applications les plus déconcertantes est celle à laquelle j'ai fait allusion tout à l'heure et qui consiste à prendre pour « réalité » les données que nous offrent les « documents historiques » sur quelque époque plus ou moins lointaine, et à tenter de construire sur cette base d'écritures une œuvre qui donnât la sensation du « vrai » de ce temps-là.

Rien ne m'est plus pénible que de me figurer la quantité de travail dépensée à bâtir un conte sur le fondement illusoire d'une érudition toujours plus vaine que toute fantaisie.

Toute fantaisie pure prend sa source dans ce qu'il y a de plus authentique au monde, le désir de se plaire, et trouve sa voie dans les dispositions cachées des diverses sensibilités qui nous composent.

On n'invente que ce qui s'invente et veut être inventé.

Mais les produits forcés de l'érudition sont nécessairement impurs, puisque le hasard qui donne ou refuse les textes, la conjecture qui les interprète, la traduction qui les trahit, se mêlent à l'intention, aux intérêts, aux passions de l'érudit, sans parler de celles du chroniqueur, du scribe, de l'évangéliste ou des copistes.

Ce genre de production est le paradis des intermédiaires...

Voilà ce qui pèse sur Salammbô, et me pèse à sa lecture. J'ai beaucoup plus de plaisir à lire des contes d'antiquité fabuleuse toute libre, comme La Princesse de Babylone, ou bien l'Akédysseril de Villiers, livres qui ne font pas songer à d'autres livres.

(Ce que j'ai dit du vrai dans les Lettres peut se penser aussi bien à propos de ces ouvrages qui prétendent à une « vérité » dans l'observation intérieure.

Stendhal se flattait de connaître le cœur humain, c'est-à-dire de ne pas l'inventer.

Mais ce qui nous intéresse en lui ce sont, au contraire, les produits de Stendhal.

Quant à les faire entrer dans une connaissance organique de l'homme en général, cette intention supposerait ou une exigence bien modeste relativement à ce savoir, ou une confusion analogue à celle que l'on ferait entre la jouissance actuelle que procure un mets délicieux, préparation d'une exquise cuisine, et l'acquisition définitive que constitue une exacte et impersonnelle analyse chimique.)

Il n'est pas impossible que le soupçon des difficultés qu'entraîne la volonté de réalisme dans l'art, et des contradictions qui se développent dès qu'il se fait impératif, ait favorisé dans l'esprit de Flaubert l'idée d'écrire une Tentation de saint Antoine.

Cette « Tentation » – tentation de toute sa vie – lui était comme un antidote intime opposé à l'ennui (qu'il confesse) d'écrire ses romans de mœurs modernes

et d'élever des monuments stylistiques à la platitude provinciale et bourgeoise.

(...)

Un autre aiguillon put le presser. Je ne songe pas au tableau de Breughel qu'il vit au palais Balbi, à Gênes, en 1845. Cette peinture naïve et compliquée, combinaison de détails monstrueux - démons cornus, bêtes hideuses, dames trop tendres, toute cette imagination superficielle et parfois amusante – lui éveilla peut – être une envie de diableries, de descriptions d'êtres impossibles : de péchés incarnés, de toutes les formations aberrantes de la peur, du désir, du remords ; mais l'impulsion même qui lui fit concevoir et aborder l'ouvrage me paraît plutôt avoir été excitée par la lecture du Faust de Goethe.

Entre Faust et La Tentation, il y a similitude d'origines et parenté évidente des sujets : origine populaire et première, existence foraine des deux légendes, qui pourraient se disposer en « pendants », sous l'exergue commun : l'homme et le diable.

Dans La Tentation, le diable s'attaque à la foi du solitaire dont il sature les nuits de visions désespérantes, de doctrines et de croyances contradictoires, de corruptrices et luxurieuses promesses.

Mais Faust a déjà tout lu, tout connu, déjà brûlé tout ce qui peut s'adorer. Il a épuisé par lui-même ce que le Démon propose ou démontre par images à Antoine, et il ne reste d'abord que l'amour le plus juvénile qui puisse le séduire (ce que je trouve assez surprenant).

Il en arrive enfin à se donner, comme prétexte du désir de vivre, une sorte de passion esthétique, une soif suprême du Beau, une fois que le néant de la puissance politique et de l'illusionnisme de la finance lui a été révélé par l'expérience méphistophélique qu'il en a faite.

Faust en est à chercher ce qui pourrait bien le tenter ;

Antoine voudrait bien ne pas être tenté.

Flaubert me semble n'avoir fait qu'entrevoir ce que le sujet de La Tentation offrait de motifs, de prétextes et de chances à une œuvre véritablement supérieure.

Rien que ses scrupules d'exactitude et de références montrent ce qui lui manquait d'esprit décisionnaire et de volonté de composition pour la conduite de la fabrication d'une machine littéraire à grande puissance.

Trop de souci d'émerveiller par la multiplicité des épisodes, des apparitions et des changements à vue, des thèses, des voix diverses, engendre chez le lecteur une sensation croissante d'être la proie d'une bibliothèque soudain vertigineusement déchaînée, dont tous les tomes eussent vociféré leurs millions de mots en même temps, et tous les cartons en révolte vomi leurs estampes et leurs dessins à la fois.

« Il a trop lu », se dit-on de l'auteur, comme l'on dit d'un homme saoul qu'il a trop bu.

Mais Goethe, dans Eckermann, parlant de sa Nuit de Valpurgis, dit ceci :

« Un nombre infini de figures mythologiques se pressent pour y entrer ; mais je prends garde à moi. Et je n'accepte que celles qui présentent aux yeux les images que je cherche. »

Cette sagesse n'apparaît pas dans La Tentation. Flaubert toujours hanté par le Démon de la connaissance encyclopédique, dont. il a. essayé de s'exorciser en écrivant Buvard et Pécuchet.

Il ne lui a pas suffi, pour alimenter Antoine de prestiges, de feuilleter les gros recueils de seconde main, les épais dictionnaires du genre Bayle, Moreri, Trévoux et consorts ; il a exploré le plus de textes originaux qu'il a pu consulter.

Il s'et rendu positivement ivre de fiches et de notes.

Mais tout ce que lui prenait de travail le torrent de figures et de formules qui désole la nuit de l'anachorète, tout ce qu'il dépensait d'esprit aux innombrables entrées de ce ballet démoniaque, les thèmes des dieux et des déités, des hérésiarques, des montres allégoriques, il le retirait ou refusait au héros lui-même, qui demeure une pauvre et piteuse victime, au centre de l'infernal tourbillon de phantasmes et d'erreurs.

Antoine, il faut en convenir, existe peu.

Ses réactions sont d'une déconcertante faiblesse. On s'étonne qu'il ne soit ni plus séduit, ni plus ébloui ; ni plus irrité ou indigné par ce qu'il voit et entend ; qu'il ne trouve ni invectives, ni railleries, ni même d'oraison violemment éjaculée à proférer contre l'immonde mascarade et le flux des fort belles phrases révoltantes ou blasphématoires qui le persécutent.

Il est mortellement passif ; il ne cède ni ne résine ; il attend la fin du cauchemar, pendant lequel il n'aura su que s'exclamer assez médiocrement, de temps à autre. Ses répliques sont des défaites, et l'on a constamment, comme la reine de Saba, une furieuse envie de le pincer.

(Peut-être est-il ainsi plus « vrai », c'est-à-dire plus semblable à la plupart des hommes ?

Ne vivons-nous pas un rêve assez effroyable et tout absurde, et que faisons-nous ?)

Flaubert a été comme enivré par l'accessoire aux dépens du principal. Il a subi le divertissement des décors, des contrastes, des précisions « amusantes » de détails, cueillis çà et là dans des livres peu ou mal fréquentés : donc, Antoine lui-même (mais un Antoine qui succombe), il a perdu son âme - je veux dire l'âme de son sujet, qui était la vocation de ce sujet à devenir chef-d'œuvre.

Il a manqué l'un des plus beaux drames possibles, un ouvrage du premier ordre qui demandait à être.

En ne s'inquiétant pas sur toute chose d'animer puissamment son héros, il a négligé la substance même de son thème : il n'a pas entendu l'appel à la profondeur.

De quoi s'agissait-il ? De rien de moins que de figurer ce qu'on pourrait nommer la physiologie de la tentation, toute cette mécanique essentielle dans laquelle les couleurs, les saveurs, le chaud et le froid, le silence et le bruit, le vrai et le faux, le bien et le mal jouent le rôle de forces et s'établissent en nous en forme d'antagonismes toujours imminents.

Il est clair que toute « tentation » résulte de l'action de la vue ou de l'idée de quelque chose qui éveille en nous la sensation qu'elle nous manquait.

Elle crée un besoin qui n'était pas ou qui dormait, et voici que nous sommes modifiés sur un point, sollicités dans une de nos facultés, et tout le reste de notre être est entraîné par cette partie surexcitée.

Dans Breughel, le cou du gourmand s'allonge, s'étire vers la pâtée que ses yeux fixent, que ses narines hument, et l'on pressent que toute la masse du corps va joindre la tête, qui aura joint l'objet du regard.

Dans la nature, la racine pousse vers l'humide, la sommité vers le soleil, et la plante se fait de déséquilibre en déséquilibre, de convoitise en convoitise.

L'amibe se déforme vers sa minuscule proie, obéit à ce qu'il va transsubstantifier, puis se hale à son pseudopode aventuré et s'y rassemble.

Ce mécanisme est celui de toute la nature vive ; le Diable, hélas ! est la nature même, et la tentation est la condition la plus évidente, la plus constante, la plus inéluctable de toute vie.

Vivre est à chaque instant manquer de quelque chose - se modifier pour l'atteindre - et, par là, tendre à se replacer dans l'état de manquer de quelque chose.

Nous vivons de l'instable, par l'instable, dans l'instable :

c'est toute l'affaire de la Sensibilité, qui est le ressort diabolique de la vie des êtres organisés.

Quoi de plus extraordinaire à essayer de concevoir, et que peut-il y avoir de plus « poétique » à mettre en œuvre que cette puissance irréductible qui est tout pour chacun de nous, qui coïncide exactement avec nous-mêmes, qui nous meut, qui nous parle et se parle en nous, qui se fait plaisir, douleur, besoin, dégoût, espoir, force ou faiblesse, dispose des valeurs, nous rend anges ou bêtes, selon l'heure ou le jour ?

Je songe à la variété, aux intensités, à la versatilité de notre substance sensible, à ses infinies ressources virtuelles, à ses innombrables relais, par les jeux desquels elle se divise contre elle-même, se trompe elle-même, multiplie ses formes de désir ou de refus, se fait intelligence, langage, symbolismes, qu'elle développe et combine pour en composer d'étranges mondes abstraits.

Je ne doute pas que Haubert ait eu conscience de la profondeur de son sujet ; mais on dirait qu'il a eu peur d'y plonger jusqu'à ce point où tout ce qui peut s'apprendre ne compte plus ...

Il s'est donc égaré dans trop de livres et de mythes ;

il y a perdu la pensée stratégique, je veux dire l'unité de sa composition qui ne pouvait résider que dans un Antoine dont Satan eût été l'une des âmes...

Son ouvrage demeure une diversité de moments et de morceaux ; mais il en est qui sont écrits pour toujours.

Tel qu'il et, je le regarde avec révérence, et je ne l'ouvre jamais que je n'y trouve des raisons d'admirer son auteur plus que lui.

Reproduit par Le Figaro du 22 septembre 1942